Lyon : Ecolo et sociale, la marque Collectif Fringué réinvente le sac banane

MODE ETHIQUE La marque Collectif Fringué recycle de vieux tissus dans des ateliers de réinsertion à l’emploi pour confectionner des bananes, accessoires vintages mais incontournables aujourd’hui

Elise Martin
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A Lyon, Collectif Fringué recycle les vêtements pour en faire des bananes — 20 Minutes
  • Un trou dans un vêtement ou des chutes de tapisseries. Rien ne doit être jeté pour Agathe qui s’est lancée dans le recyclage de tissus afin de créer d’autres accessoires à travers la marque Collectif Fringué.
  • Elle parcourt alors les friperies et les ressourceries de la région lyonnaise pour dénicher chaque pièce qui formera ensuite, une banane, un chouchou, un bob ou un sac.
  • Depuis le lancement de son entreprise, la jeune créatrice fait appel à des ateliers de réinsertion à l’emploi pour confectionner ces produits.

Des jupes en velours, des bouts de rideaux ou encore des morceaux de housses de couette. « Jamais tu ne mets ça chez toi, mais en banane, ça rend trop bien ! », s’exclame Agathe, 30 ans, en train de fouiller dans ce qu’elle appelle, « son joyeux bazar ». Depuis un an et demi, cette jeune entrepreneuse « revalorise des vêtements existants » pour en faire un accessoire unique, très en vogue : la sacoche.

« Cette chute, je l’ai récupérée dans une tapisserie qui l’a ressortie d’une vieille armoire, présente-t-elle fièrement. Elle a plus de 50 ans ! ». Entre friperies et ressourceries, Agathe parcourt la région lyonnaise pour dénicher ces tissus, leur offrir « une seconde vie » et ainsi « faire de la mode éthique la norme de demain » à travers sa marque Collectif Fringué.

Une marque pour réduire son impact sur l’environnement

Rien ne prédestinait vraiment Agathe à devenir créatrice de mode. Employée de manière indéterminée en marketing après une école de commerce, elle quitte tout et part en Asie. La crise sanitaire la rattrape. Elle comprend alors qu’elle a envie « de faire quelque chose qui a du sens ». « J’ai toujours eu un goût pour la mode et en voyageant, j’ai découvert les dessous de la fast fashion. Je me suis dit qu’on ne pouvait pas continuer comme ça », résume-t-elle.

Attirée par la dynamique de Lyon et de sa réputation pour les petits créateurs, la Rémoise d’origine s’installe et lance Collectif Fringué. A l’origine, la marque fait des vêtements de prêt-à-porter. Mais très vite, elle se rend à l’évidence. Son truc à elle, ce sont les bananes. « J’en faisais déjà avec les chutes des habits pour jeter le moins possible », explique-t-elle. Et le surplus de ces sacoches alors ? « Je les utilise pour faire des chouchous ! », sourit-elle. Et la boucle est bouclée. Et même zippée. Car même les fermetures éclair sont recyclées : « Elles viennent d’anciennes usines du nord de la France, précise-t-elle. Ces entreprises allaient fermer, alors une personne est allée récupérer ces Zip et m’en a envoyé. »

Des bananes « made in Lyon »

En plus de cette démarche d’upcycling, Agathe s’attache à avoir du « made in France » et même « in Lyon ». « Je travaille avec deux ateliers de réinsertion et l’entreprise Emerjean*, à Villeurbanne, expose-t-elle. C’était essentiel pour moi de connaître le nom des personnes qui cousent les accessoires de ma marque. En même temps, je voulais permettre à des publics en rupture socioprofessionnelle de s’épanouir par la couture. »

Et le plaisir est partagé du côté des couturières. Sonia est arrivée dans l’atelier d’Emerjean en 2018 sans « jamais avoir touché une machine à coudre ». Elle est désormais, avec deux autres couturières, responsable de la production d’Agathe. « Ensemble, on a réfléchi à un prototype pour un prochain produit », lance-t-elle fièrement montrant un petit sac, fait à partir de jean. « C’est plus adapté à une mère de famille qu’une sacoche », plaisante-t-elle.

Revaloriser les vêtements et valoriser les couturières

« J’adore confectionner des accessoires maintenant, ajoute Sonia. On fait tout de A à Z de nos mains. En plus, on sent qu’on progresse au fur et à mesure grâce aux exigences d’Agathe. Au début, on se demande ce que ça va donner. Mais quand c’est fini, on se dit « "waouh, j’ai fait ça !" »

Pour Arta, 49 ans, l’exercice est plus simple. « Quand je vivais en Albanie, j’ai fait ce métier pendant treize ans mais c’était à la chaîne dans une grosse usine. Ici, ça n’a rien à voir. Je prends plus de plaisir à faire ce que je fais. » Halima, qui encadre l’atelier textile à Emerjean, conclut : « Une collaboration telle que celle avec Collectif Fringué valorise les couturières. Elles sentent qu’elles comptent et qu’elles font partie d’un collectif. C’est une vraie aventure humaine. »

*Emerjean, une entreprise villeurbannaise

*Emerjean est une entreprise créée en 2016, située à Villeurbanne, qui compte une centaine d’employés en CDI et à temps choisi qui étaient au chômage depuis plus d’un an du quartier Saint-Jean. A partir des compétences de ses salariés, elle développe des activités qui répondent aux besoins du quartier, de ses habitants, de ses entreprises et de la collectivité.

« Grâce aux différentes activités qu’on a développées en fonction des appétences de chacun, les employés montent rapidement en compétences », explique Halima, responsable de secteur chez Emerjean. Pour elle, c’est « une énorme fierté » de contribuer à l’épanouissement de ces personnes. « Elles étaient injustement éloignées de l’emploi, souvent à cause de discriminations, et maintenant, elles sont considérées et font ce qu’elles aiment, sans que ça ne passe par de l’associatif. »