Ligue 1 : Les supporteurs redoutent-ils une indigestion de football avec cette reprise inédite durant les fêtes ?

FOOTBALL Seulement dix jours après la finale de Coupe du monde France-Argentine, la Ligue 1 est de retour ce mercredi, puis les 1er et 2 janvier, à une période inédite qui suscite différentes réactions chez les supporteurs

Jérémy Laugier
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Neymar et Kylian Mbappé, ici à l'entraînement mardi au Camp des Loges, devraient donc être associés pour des matchs de Ligue 1 le 28 décembre et le 1er janvier. Qui aurait misé sur ce scénario lors de leur arrivée au PSG en 2017 ?
Neymar et Kylian Mbappé, ici à l'entraînement mardi au Camp des Loges, devraient donc être associés pour des matchs de Ligue 1 le 28 décembre et le 1er janvier. Qui aurait misé sur ce scénario lors de leur arrivée au PSG en 2017 ? — JULIEN DE ROSA / AFP
  • La Ligue 1 va fêter son retour sur une période totalement insolite, avec une 16e journée programmée ce mercredi et jeudi, puis une 17e journée les 1er et 2 janvier.
  • Dire qu’il y a seulement dix jours, la France disputait la quatrième finale de Coupe du monde de son histoire contre l’Argentine.
  • Entre difficultés à se plonger dans ce quasi Boxing Day à la française et boycott de certains matchs par des groupes, 20 Minutes a interrogé quatre supporteurs de différents clubs pour prendre le pouls quant aux risques d’indigestion de football.

Il y a seulement dix jours, vous étiez en train de vibrer comme rarement lors des deux égalisations de Kylian Mbappé contre l’Argentine. Même lorsqu’on est accro à la Ligue 1, et surtout à son club de cœur, peut-on réellement se replonger dans un Troyes-Nantes, un Brest-OL, ou même un PSG-Strasbourg ce mercredi ? Ne risque-t-on pas purement et simplement une indigestion post-repas de fête gargantuesque à la sauce qatarie lors de cette reprise de notre championnat ?

Quatre témoins, supporteurs de Paris, Lyon, Strasbourg et Nantes, vont nous aider à y voir plus clair sur ce calendrier insolite aux allures de Boxing Day à la française, avec ces deux journées de Ligue 1 placées entre le 28 décembre et le 2 janvier.

Sylvain (40 ans), supporteur parisien, avant PSG-Strasbourg ce mercredi (21 heures), puis Lens-PSG dimanche (20h45)

« Je pense que ça fait plusieurs années que des journées de championnat auraient pu se disputer durant les fêtes comme en Angleterre. C’est un moment idéal pour suivre le foot, les gens sont dispos, en famille et souvent en vacances », estime Sylvain, même s’il reconnaît « ne pas être super excité par cette reprise » concernant le PSG. « Mais ça va être intéressant de voir comment on va gérer le match à Lens sans certains internationaux, et en premier lieu Messi. Ça peut potentiellement relancer le suspense du championnat. »



Plus que l’absence de l’attaquant argentin, Sylvain redoute de récupérer des Brésiliens « au fond du trou » après leur élimination prématurée contre la Croatie. « Oui, je suis inquiet pour Neymar et Marquinhos, ce n’est pas de bon augure pour la Ligue des champions », insiste-t-il. Car comme chaque année, la vraie date cochée par les supporteurs parisiens n’est évidemment pas cette reprise en Ligue 1 mais les deux bouillants affrontements du 14 février et du 8 mars face au Bayern Munich. Pour lui, ces deux matchs de la semaine sont comparables à un plat de saison (encore que) : « C’est comme une raclette avec des potes entre Noël et Nouvel An. On a sans doute déjà trop mangé du foot avec ce Mondial chouette à suivre, on a moyennement faim, mais on y retourne avec plaisir. »

Nicolas (33 ans), supporteur lyonnais, avant Brest-OL ce mercredi (21 heures), puis OL-Clermont dimanche (17 heures)

Ne comptez pas sur Nicolas, ni sur la plupart des suiveurs de l’Olympique Lyonnais, pour partager l’enthousiasme de Sylvain. Entre l’actuelle 8e place en Ligue 1, le rachat au forceps du club par John Textor après plus de trois mois de flou, et la défaite (1-2) contre Monza (14e de Serie A) lors de l’ultime match de préparation, il faut dire qu’ils ne sont pas épargnés. « La coupure de la Coupe du monde m’a fait un bien phénoménal tant la situation est maussade à tous les niveaux à l’OL, peste Nicolas. Ce club parle beaucoup mais déçoit systématiquement, avec sans cesse une fuite en avant. »

Ce ne sont pas les affiches bien fades contre Brest (16e) et Clermont (10e) qui risquent de transcender ce supporteur, dans la foulée de l’aventure des Bleus au Qatar. « Je vais regarder ces matchs, mais l’OL ne sera plus autant une priorité qu’avant dans ma vie. Je ne redoute pas de subir une indigestion de foot mais de me voir servir un plat dégueu. Je suis dans le même état qu’avant un mâchon lyonnais : c’est cool de préparer un moment festif mais en vrai, il y a beaucoup de tripes à table et ça n’a jamais été mon truc. »



Philippe Wolff (42 ans), président de la Fédération de supporteurs du Racing club de Strasbourg, avant PSG-Strasbourg ce mercredi (21 heures), puis Strasbourg-Troyes le 2 janvier (15 heures)

La 19e place du Racing en championnat ne pousse déjà pas à l’emballement général. Mais si le parcage de supporteurs alsaciens devrait être plein ce mercredi soir au Parc des Princes, « même si on aurait préféré qu’il manque plus de mondialistes côté PSG », la LFP a porté le coup de grâce avec sa programmation de la 17e journée le lundi 2 janvier à 15 heures. « Une reprise rapide après la Coupe du monde ne me dérange pas forcément, assure Philippe Wolff. Mais là, cet horaire qui ne rime à rien pour un match en semaine, c’est juste inacceptable, et c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. On nous dit que c’est exceptionnel, mais ça peut vite devenir une tendance inquiétante. »

C’est pourquoi huit groupes de supporteurs du RCS sont sur la ligne d’un boycott collectif de la Meinau lundi, qui n’a rien à voir avec la délicate situation sportive du club. Si souvent en fusion la saison passée, l’enceinte strasbourgeoise va donc sonner creux dans une rencontre aux allures de petit tournant dans la course au maintien. « On se sent dans un état de lendemain de fête, en pleine gueule de bois, résume Philippe Wolff. Cette réception de Troyes sera un match quasi mort, sans animation ni ambiance. »



Thierry Tissot (49 ans), président des Activ Nantes Supports, avant Troyes-Nantes ce mercredi (15 heures) et Nantes-Auxerre dimanche (15 heures)

Même son de cloche pour les supporteurs nantais. Neuf groupes, dont la Brigade Loire, boycottent ces deux rendez-vous de reprise, en raison de l’horaire « foutage de gueule » ce mercredi, puis en solidarité avec les fans strasbourgeois pour la journée suivante de Ligue 1. « Si on ne se soutient pas entre groupes de supporteurs, on n’aura plus aucune crédibilité auprès des instances », juge Thierry Tissot, qui ne pense même pas regarder les deux rencontres de son club de cœur à la télévision. « Je ne ressens pas une impatience de fou car on sort juste de Noël, et c’est dur de se remettre dans le foot. C’est une tradition de longue date en Angleterre, mais pas du tout chez nous », rappelle le Nantais.

Avant la décision de boycott, celui-ci avait demandé au FC Nantes si les supporteurs auraient le droit d’apporter des huîtres à la Beaujoire le 1er janvier après-midi. Il ironise : « On n’a eu droit qu’à deux victoires depuis le début de la saison en championnat, donc ce n’est vraiment pas une saison de football champagne. C’est pourquoi ça aurait pu être rigolo de se faire un match contre Auxerre avec 3 grammes d’alcool. On aura du foie gras au réveillon de la Saint-Sylvestre, mais là, avec ces deux matchs, ceux qui iront au stade doivent s’attendre à de la pâtée pour chiens ». Ça sent la réussite populaire totale, ces débuts de la Ligue 1 durant les fêtes, non ?