Finale France – Argentine : Mais c’est quoi, cette malédiction des Bleus aux tirs au but ?

FOOTBALL La France s’est inclinée aux tirs au but ce dimanche au bout d’une incroyable finale de la Coupe du monde contre l’Argentine au Qatar (3-3, 4-2 aux t.a.b.). Une très mauvaise habitude

Nicolas Stival
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Emiliano Martinez a remporté son face-à-face avec Hugo Lloris lors de la séance de tirs au but de la finale de la Coupe du monde au Qatar entre l'Argentine et la France, ce dimanche au stade de Lusail.
Emiliano Martinez a remporté son face-à-face avec Hugo Lloris lors de la séance de tirs au but de la finale de la Coupe du monde au Qatar entre l'Argentine et la France, ce dimanche au stade de Lusail. — Martin Meissner / AP / Sipa
  • Encore une fois, comme en finale du Mondial 2006 et en 8es de finale de l’Euro 2021, la France a raté sa séance de tirs au but face à l’Argentine, ce dimanche, en finale de la Coupe du monde au Qatar (3-3, 4-2 aux t.a.b.).
  • Les Bleus n’ont plus remporté un match de cette manière depuis le quart de finale de la Coupe du monde 1998 contre l’Italie.
  • Les gardiens français (Fabien Barthez et Hugo Lloris) ont encaissé les 14 derniers tirs au but tirés par des adversaires.

Oui, c’est très, très facile à dire après coup. Surtout au terme d’une finale de Coupe du monde comme cette indescriptible affiche France - Argentine (3-3, 2-4 aux tirs au but) au déroulé que même le scénariste le plus allumé de Bollywood n’aurait jamais osé proposer. Mais quand Randal Kolo Muani a échoué devant Emiliano Martinez tout au bout des prolongations, on s’est dit qu’en dépit du parfum d’irréel qui a baigné le stade de Lusail ce dimanche, les Bleus ne pouvaient pas gagner.

Pourquoi ? Parce que des tireurs chevronnés comme Olivier Giroud ou Antoine Griezmann avaient quitté la pelouse depuis une éternité, alors que leur équipe semblait davantage partie pour en prendre une bonne que pour revenir de 0-2 à 2-2, puis de 2-3 à 3-3 par la grâce de Kylian Mbappé, auteur de deux penos dans le match puis d’un tir au but, après le raté fatal de l’an dernier en 8es de finale de l’Euro contre la Suisse (3-3, 5-4 aux t.a.b.). Mais aussi parce que Hugo Lloris.



Le capitaine des désormais ex-champions du monde, recordman national de sélections (145), est un superbe gardien, et a sorti une compétition et même une finale que son début de saison quelconque ne laissait pas forcément présager. Mais lorsque vient l’heure décisive, au moment de se retrouver face à un tireur à 11 mètres de lui, sa cage semble trop grande pour son gabarit pourtant conséquent (1,88 m, 82 kg), alors que l’Argentin Martinez certes plus grand et massif (1,95 m, 85 kg) occupe tout l’espace.

Martinez déjà décisif en quart de finale

Déjà décisif en quart contre les Pays-Bas (deux tentatives néerlandaises repoussées), au bout d’une rencontre au scénario curieusement comparable à cette finale (2-2, 4-3 aux t.a.b.), le gardien d’Aston Villa a repoussé la tentative de Kingsley Coman et contraint Aurélien Tchouaméni à frapper à côté. Celui de Tottenham lui, a tout encaissé, en dégageant le même sentiment d’impuissance que lors de la déception helvète à l’Euro 2021.

Ou que Fabien Barthez à l’issue de la finale de la Coupe du monde 2006 face à l’Italie (1-1, 5-3 aux t.a.b.). Ou, plus loin encore, que Jean-Luc Ettori au bout de l’étouffante demi-finale devant la RFA, lors du Mondial 1982 (3-3, 5-4 aux t.a.b.), même si l’on oublie que le Monégasque avait réussi à repousser une tentative, celle d’Uli Stielike.



La stat est terrible : la France a encaissé les 14 derniers tirs au but qui ont été frappés face à elle lors d’une Coupe du monde ou un Euro. Pour trouver trace d’un raté, il faut remonter à l'ascension des Bleus d’Aimé Jacquet vers leur première étoile, en 1998, lors du quart de finale remporté contre la Squadra Azzurra (0-0, 4-3 aux t.a.b.) : une frappe de Luigi Di Biagio sur la transversale, qui venait après un tir de Demetrio Albertini repoussé par Barthez.

Mission impossible

« Mon arrêt devant Albertini ? Je considère qu’un penalty arrêté par un gardien est avant tout un penalty mal tiré ! », lâchera le divin chauve bien plus tard, sur le site de la FIFA, à propos de la seule victoire française aux tirs au but de l’histoire en Coupe du monde avec le quart de finale face au Brésil en 1986 (1-1, 4-3 aux t.a.b.). 

La devise reste hélas ce dimanche celle des portiers français, et pousse les supporteurs des Bleus à prier pour qu’un joueur adverse veuille bien dévisser sa frappe à l’instant crucial. Mais depuis 24 ans, que ce soit Trezeguet en 2006, Mbappé en 2021 ou Coman et Tchouaméni aujourd’hui, l’erreur est toujours venue de notre camp. Didier Deschamps a toujours considéré l'exercice comme une loterie et ne l'avait, par exemple, pas fait travailler avant le 8e de finale contre la Pologne et son présumé rideau de fer (3-1). Une loterie où l'on perd à tous les coups.