Roland-Garros : Trois sets et 3h51 de jeu… Retour sur le match de dingue entre Sorribes Tormo et Haddad Maia

TENNIS Il aura fallu trois sets de folie et 3h51 pour que la Brésilienne Beatriz Haddad Maia vienne à bout de l’Espagnole Sara Sorribes Tormo, le tout dans un Suzanne-Lenglen en fusion

Aymeric Le Gall
— 
Beatriz Haddad Maia serre le poing après sa victoire face à Sara Sorribes Tormo, lundi, après 3h51 de jeu.
Beatriz Haddad Maia serre le poing après sa victoire face à Sara Sorribes Tormo, lundi, après 3h51 de jeu. — Jean-Francois Badias/AP/SIPA

A Roland-Garros,

Seize minutes, seize petites minutes, c’est le temps qu’il aura manqué à l’Espagnole Sara Sorribes Tormo, devenue tristement célèbre la veille après l’épisode de la balle dans la tête d’une ramasseuse de balle, et à la Brésilienne Beatriz Haddad Maia, pour battre le record du match féminin le plus long de l’histoire à Roland-Garros. A l’époque, en 1995, Virginie Buisson et Noëlle van Lottum avaient passé 4h07 sur le court, quand nos deux marathoniennes du jour n’ont tenu « que » 3h51.

A l’arrivée, c’est la Brésilienne qui s’est imposée (6-7, 6-3, 7-5) dans un Suzanne-Lenglen en fusion, qui a offert aux deux joueuses une standing ovation amplement méritée. Ce match entre tout de même dans la légende en montant sur la troisième marche du podium des oppositions les plus longues de l’histoire de Roland (Le deuxième ayant duré 3h55 entre Kerry Melville et Pam Teeguarden en 1972).



En arrivant en conférence de presse d’après-match, Haddad Maia s’est permis de déboucher la bouteille de Perrier servant habituellement de publicité sur le pupitre des athlètes et de descendre quelques généreuses gorgées. Avant, enfin, de parler de ce match de dingue. « Le tennis ce n’est pas un 100 mètres, c’est un marathon, surtout mes matchs, s’est-elle marrée. J’ai joué pas mal de matchs de plus de trois heures dans ma carrière, et je me rends compte que plus les matchs avancent, meilleure je suis, c’est l’une de mes grandes qualités. J’ai appris depuis toute petite à ne jamais abandonner, même quand c’est dur et que le match ne tourne pas en ma faveur. Je suis fière de moi et fière de mon physio ! ».




Un scénario de folie et une ambiance de feu

Menant 5-2 dans le premier set, la Brésilienne a servi deux fois pour le gain de la première manche, avant que Sorribes Tormo ne change sa manière de jouer et se mette à défendre comme une morte de faim, attendant simplement de pousser son adversaire à la faute. C’est ce qui s’est produit, pour nous offrir le début d’un match d’anthologie. Haddad Maia : « A 5-2, c’est là qu’elle a commencé à jouer plus profond avec des balles en hauteur, j’ai essayé de rester calme et de me surpasser mais elle est bien revenue. A un moment donné j’ai regardé l’horloge et je me suis dit "ok, on va jouer trois heures !" ». Un peu plus, au final.

Bien qu’éliminée, Sara Sorribes Tormo avait le sourire en prenant la suite de son adversaire sur l’estrade de la salle de presse de Roland. « Pour être honnête, j’ai adoré ce match ! C’était dur mais j’ai vraiment adoré, a-t-elle assuré. J’étais tellement bien que je n’avais pas la sensation qu’on avait joué autant. Franchement c’était un super match, je crois qu’on a fait jeu égal, parfois c’est moi qui ai pris les devants, parfois c’était elle. » Le public du Suzanne-Lenglen a lui aussi pris son pied et chaque jeu accroché était accompagné de hurlements et d’encouragements de partout.

Sorribes Tormo a eu « peur » en entrant sur le Lenglen

Une ambiance que les deux femmes ont appréciée, même si Sorribes Tormo a reconnu être entrée sur le court avec un peu de stress. Epinglée la veille par de nombreux fans de tennis sur les réseaux sociaux, qui lui reprochaient d’avoir réclamé la disqualification de la paire indonéso-nippone, après un tir involontaire de Miyu Kato dans la tête d’une ramasseuse de balle, l’Espagnole ne savait pas quel accueil allait lui réserver le Lenglen. « Mais très rapidement je me suis rendu compte que le public n’avait rien contre moi », a-t-elle expliqué. Au contraire, il se souviendra longtemps, et en bien, de ce match de fada et de ses deux héroïnes.