reportageDans le chaudron, Attal passe son grand oral avec un débit mitraillette

Attal à l’Assemblée : Agriculteurs, censure… Le Premier ministre passe son grand oral avec un débit mitraillette

reportageLe Premier ministre passait son grand oral ce mardi après-midi devant les députés
Les infos à retenir du discours du Premier Ministre Gabriel Attal
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Trois semaines après sa nomination à Matignon, Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale à l’Assemblée nationale.
  • Pendant une bonne heure et en pleine crise agricole, le chef du gouvernement a tenté de rassurer, sans apporter de réponses précises.
  • Très chahuté par les élus insoumis, le Premier ministre a déroulé son discours avec un débit mitraillette.

A l’Assemblée nationale,

Il a délaissé les bottes de foin pour l’enceinte feutrée de l’Assemblée nationale. Trois semaines après sa nomination à Matignon, Gabriel Attal a (enfin) passé son « grand oral », ce mardi à 15 heures, devant les députés. Pendant une bonne heure, le chef du gouvernement a prononcé son discours de politique générale dans un Palais-Bourbon bouillonnant. En pleine crise agricole, le Premier ministre a tenté de rassurer, sans apporter de réponses précises. Son discours ne lui permettra pas non plus d’échapper à sa première motion de censure, déposée par la gauche avant même sa prise de parole. Retour sur cette journée mouvementée.

Un débit mitraillette

« Il ne voit pas ça comme un Himalaya, mais comme le Puy-de-Dôme. Il n’est pas stressé », promettait un visiteur de Matignon. Alors que les ministres et les députés arrivent au compte-gouttes dans l’hémicycle, l’homme du jour est déjà présent. Sa jambe s’agite nerveusement sous son banc, Gabriel Attal semble impatient d’en découdre. Il échange deux mots avec son ministre de la Justice, Eric Dupont-Moretti, reçoit les encouragements des collègues, et s’élance.

A peine au micro, le chef du gouvernement est chahuté par les invectives des députés insoumis. « Comme c’est beauuuu ! », se moque l’un d’eux à la première envolée. Au brouhaha quasi-continu du groupe LFI, le chef du gouvernement oppose un débit mitraillette, sans jamais jeter un regard à ses contradicteurs. La présidente de l’Assemblée appelle au calme, il réplique, agacé : « J’ai promis que je ne m’arrêterai pas malgré leurs hurlements, je peux continuer sans difficulté. » Une ligne tenue jusqu’à la fin malgré les tentatives de déstabilisation des insoumis.

Une touche personnelle

Mis à part quelques allusions à sa jeunesse – il est le plus jeune Premier ministre de la Ve République –, Gabriel Attal ne sort pas vraiment les tripes. Pas d’allusion à son parcours personnel… avant la toute fin du discours. « Etre Français en 2024, c’est dans un pays qu’il y a dix ans seulement se déchirait encore sur le mariage pour tous, pouvoir être Premier ministre en assumant ouvertement son homosexualité », lance le chef du gouvernement, faisant pour la première fois une référence aussi explicite à son homosexualité depuis son arrivée à Matignon. « Dans tout cela, je vois la preuve que notre pays bouge. La preuve que les mentalités évoluent », dit-il, chaleureusement applaudi par le camp présidentiel.

Un discours percuté par la crise agricole

Au moment même où Gabriel Attal montait à la tribune, un convoi de tracteurs s’acheminait vers le marché de Rungis, en plus du blocage de plusieurs axes routiers. En pleine crise agricole, l’intervention du chef du gouvernement était donc très attendue par les agriculteurs en colère. « Notre agriculture est notre force et notre fierté », évoque le Premier ministre. Après l’annonce de mesures jugées « décevantes » vendredi dernier, il promet que son gouvernement sera « au rendez-vous » des attentes. Mais le chef du gouvernement n’en dit pas plus pour le moment et se montre flou sur les contours de l'« exception agricole française », annonçant une « suppression des normes » sans plus de précision.

Motion de censure

La gauche n’attendait rien de cette prise de parole. Pour preuve, les groupes de la Nupes ont annoncé dès la matinée vouloir faire tomber le gouvernement. « Nous déposerons une motion de censure qui permettra d’avoir, puisque nous n’avons pas de vote de confiance, un vote de défiance », a confirmé Mathilde Panot, la cheffe de file du groupe LFI. « Cela fait déjà trois semaines qu’il parle à tort et à travers. La logique de sa politique est déjà bien connue, c’est de continuer à appuyer sur le champignon hyper libéral », a abondé le député communiste Pierre Dharréville à la mi-journée. La motion devrait être débattue en fin de semaine.

Tout sur le discours de politique générale de Gabriel Attal

Droite échaudée craint l’eau froide

En promettant de lutter contre le déficit public et l’immigration illégale, Gabriel Attal a tenté de séduire la droite de l’hémicycle. Mais même la promesse de réforme « avant l’été » de l’Aide médicale d’Etat (AME) ne devrait pas suffir à calmer l’ardeur des élus LR. Ces derniers n’ont toujours pas digéré l’épisode du projet de loi immigration, largement retoqué par le Conseil constitutionnel. Les plus échaudés ont d’ailleurs menacé (une fois encore) de déposer leur propre motion de censure. « On est absolument prêts à en déposer une dans les semaines qui viennent, la seule capable de faire tomber le gouvernement », assure l’élu LR Pierre-Henri Dumont à quelques journalistes. « Il faut simplement trouver le moment opportun pour qu’elle soit votée », ajoute-t-il. En attendant, Gabriel Attal et son gouvernement peuvent souffler.

Sujets liés