France - Nouvelle-Zélande : Tribunes en fusion, tension et délivrance, récit d’un sacré premier match de Coupe du monde

rugby On vous raconte cette soirée dont le rugby français rêvait depuis des mois, avec le sacré succès du XV de France en ouverture de sa Coupe du monde de rugby 2023, vendredi face aux All Blacks (27-13)

Nicolas Camus
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Les Bleus saluent le public du Stade de France, après leur victoire contre la Nouvelle-Zélande en ouverture de la Coupe du monde, le 8 septembre.
Les Bleus saluent le public du Stade de France, après leur victoire contre la Nouvelle-Zélande en ouverture de la Coupe du monde, le 8 septembre. — Christophe Ena/AP/SIPA
  • Le XV de France a battu la Nouvelle-Zélande lors du match d’ouverture de la Coupe du monde de rugby (27-13), vendredi soir au Stade de France.
  • La soirée tant attendue a tenu ses promesses, de l’ambiance en tribunes au succès finalement assez large des Bleus sur le terrain.
  • La tension va maintenant pouvoir retomber un peu, avant d’attaquer les prochains matchs de poule et de se projeter vers les quarts de finale, si tout va bien.

Au Stade de France,

Ça y est, c’est passé. Des semaines, voire des mois qu’on se projetait sur ce premier match de la Coupe du monde de rugby grandiose et on ne sait pas bien par où commencer pour raconter cette soirée au Stade de France. Peut-être par le fait qu’on a vibré, déjà. Pas vraiment grâce à la cérémonie d’ouverture, exercice toujours un peu casse-gueule et qui n’a pas dérogé à la règle : c’est très dur de ne pas se moquer. L’ambiance bal musette avec accordéons, hommes en marcel ou veston et le combo baguette-saucisson, au cas où on n’avait pas saisi que le rugby était un sport de terroir… Un hommage à la France, certes, mais qui n’existe plus depuis longtemps.

Elle aura au moins eu le mérite de finir de chauffer le public avec une Peña Baiona qui donnait envie de se jeter dans un paquito géant avec les spectateurs. Ça aurait eu de la gueule, avec le passage de la Patrouille de France au même moment pour emballer le tout. Les 80.000 chanceux qui étaient de la partie n’en sont pas arrivés là, mais ils étaient bouillants pour accueillir les Bleus à l’échauffement, quelques minutes plus tard. « Dès qu’on est sortis des vestiaires, on a pris une claque », confie Melvyn Jaminet.

Et quand tout le stade a entonné un « qui ne saute pas n’est pas français » juste avant le coup d’envoi, les joueurs ont senti que ça tremblait sous leurs pieds. « C’était fou, s’illumine l’arrière Arthur Vincent, qui venait de s’asseoir sur le banc à ce moment-là. Quand tu entends ça, que tu vois que ça saute dans tous les sens, tu sors du match deux secondes et tu te dis "wahou". On a vécu des moments incroyables, et c’est important parce que ça peut faire basculer des matchs. »

Le public n’aura pas été de trop, c’est certain, pour aider les Bleus à renverser la Nouvelle-Zélande. Si l’essai dès la 2e minute de Mark Telea a jeté un gros froid alors même que le thermomètre n’est jamais descendu sous les 30 °C, les encouragements ont vite repris, ranimés par le pied de Thomas Ramos. « L’ambiance était géniale, salue le buteur du XV de France. On commence à être habitués aux ambiances un peu folles ici, et sur l’ouverture d’une Coupe du monde à la maison, on savait que les supporteurs répondraient encore plus présent. On prend beaucoup de plaisir à les entendre pendant le match. »

Explosion générale sur l’essai de Jaminet

La tension, palpable dans la moiteur ambiante, est tout de même longtemps restée accrochée dans le ciel de Saint-Denis. Le rugissement entendu sur l’essai de Damian Penaud, au cœur de la seconde période, a reflété l’angoisse qui rôdait encore. Tout a été beaucoup plus léger ensuite. « On se sentait portés, ça nous a poussés à aller chercher tous ces petits efforts supplémentaires pour bien rester ensemble en défense », décrit Gabin Villière. Un bruyant soutien pour bien défendre, certes, mais aussi pour pousser toujours plus loin les actions dans le camp néo-zélandais, jusqu’à l’explosion générale, staff compris, quand Melvyn Jaminet a planté la dernière banderille en pleine Marseillaise.

La petite dizaine de joueurs de l’équipe de France de football qui était venue voir les collègues au lendemain de leur victoire contre l’Irlande au Parc des Princes n’en a pas loupé une miette. Kylian Mbappé, Antoine Griezmann, Theo Hernandez, Jules Koundé, Olivier Giroud, Dayot Upamecano, Aurélien Tchouameni et Ousmane Dembélé ont apprécié le spectacle, et ont été le dire aux héros du soir dans les vestiaires après la rencontre. « Ça fait plaisir qu’ils soient venus nous voir, raconte Thomas Ramos. Dans notre équipe, il y a de grands amateurs de foot, mais je ne suis pas sûr qu’eux, ils regardent beaucoup de rugby. Alors de les voir là, c’est top. »

On t'a vu François Berléand.
On t'a vu François Berléand. - FRANCK FIFE / AFP

L’arrière des Bleus n’a pas reçu les félicitations de Kylian Mbappé pour son adresse au pied. « Non, mais j’ai parlé avec Olivier Giroud, il est plus habitué aux duels aériens », dit-il en se marrant. Très souvent mis sous pression par le long jeu au pied de Beauden Barrett, Thomas Ramos a il est vrai pas mal ramassé à la retombée. Dans tous les sens du terme puisque c’est lui que Will Jordan renverse sur l’action qui mène au carton jaune des All Blacks.

A écouter les joueurs du XV de France en zone mixte, une bonne heure après le coup de sifflet final, ce qu’ils ont vécu ressemble en tout cas à la soirée parfaite. Il y a un bon paquet de choses à revoir dans le jeu, mais la mission est remplie avec cette large victoire, et l’engouement qui les escorte n’est pas près de retomber. « Il y a des points d’amélioration mais avoir traversé ce match et en sortir victorieux, ça va nous faire du bien, à toute la délégation », pose Fabien Galthié.

Les Bleus ont terminé cette soirée lessivés, autant physiquement que mentalement, à l’image d’un Charles Ollivon qu’on n’avait jamais vu aussi marqué. « C’était un premier match de Coupe du monde, avec la pression qu’on connaît, une énorme intensité. Il va falloir récupérer, mais avec la victoire, c’est plus facile », dit le troisième ligne avant de s’éclipser rapidement. « C’est une entame idéale mais il faut rester concentrés, prévient Thomas Ramos. On a de quoi faire de belles choses alors on se doit de rester sérieux. » Ce sera le mot de la fin, avant de filer dans le car et rejoindre le camp de base de Rueil-Malmaison. Avec le sentiment, mérité, d’avoir été à la hauteur des (immenses) attentes.