Bayern-PSG : « Il est déjà une petite légende du club »… Kingsley Coman, discret taulier de l’institution Bayern

football L’ailier français, au club depuis 2015, n’est pas le plus expansif mais a acquis un véritable statut par ses performances sur le terrain

Nicolas Camus
 Kingsley Coman lors de Wolfsburg - Bayern Munich en Bundesliga, le 5 février 2023.
Kingsley Coman lors de Wolfsburg - Bayern Munich en Bundesliga, le 5 février 2023. — Action Press//SIPA
  • L’ailier tricolore Kingsley Coman fait partie des tauliers de l’équipe bavaroise malgré sa discrétion hors des terrains.
  • Désormais membre du conseil des joueurs consulté par les dirigeants bavarois, le buteur du match aller est considéré comme le joueur le plus talentueux de l’effectif quand il n’est pas blessé.

Le FC Hollywood, très peu pour lui. On vous l’accorde, ça fait un petit moment que ce surnom, hérité de l’époque Effenberg et Matthäus au mitan des années 90, n’a plus cours au Bayern Munich (quoique…). Mais il convoque assez de souvenirs pour arriver là où on voulait : Kingsley Coman représente à peu près tout ce que n’était plus vraiment le club bavarois à ce moment-là, à savoir une institution bien gérée, gardant toute son énergie pour sa quête obsessionnelle de trophées nationaux et européens.

Un gars « simple »

S’intéresser à la vie de l’ailier français à Munich, c’est vite se heurter à un mur. « Ce qu’on voit de lui pendant les matchs suffit à raconter ce qu’il est, lance d’emblée Ali Farhat, journaliste basé en Allemagne depuis neuf ans. Il n’y a rien de spécial à dire en dehors, c’est un mec très discret, on ne le voit jamais traîner à droite à gauche. »

Même l’Obktoberfest, tradition ancestrale en Bavière et rendez-vous important pour tous les membres du club, ne semble pas le passionner plus que ça. « La première année où il était là [2015], on l’avait vu partir en douce, très tôt », raconte notre confrère. Ça n’a pas forcément été comme ça tous les ans, mais ça dépeint le personnage. Pour des photos en train de faire le guignol en Lederhose (la fameuse culotte de peau arrivant aux genoux, si possible avec les bretelles qui vont bien), on comptera plutôt sur Thomas Müller (prononcez « Moullaaaaaa », bien sûr).

L'inénnarable Thomas Müller à la Fête de la bière à Munich, en octobre 2019.
L'inénnarable Thomas Müller à la Fête de la bière à Munich, en octobre 2019. - People Picture/Willi Schneider/REX/SIPA

« C’est un atypique, un garçon charmant, qui ne va pas parler à tout va ou chercher à se mettre en avant sur les réseaux sociaux, à pousser le côté marketing, décrit Laurent Bonadei, l’un de ses formateurs au PSG. C’est peut-être ce qui le met en retrait par rapport à d’autres top joueurs, d’ailleurs. S’il se mettait plus en valeur, il serait sûrement vu différemment. Mais pour moi, c’est tout à son honneur. Il a d’autres passions que le foot, sans avoir besoin que le monde entier soit au courant. Il sait rester simple. »

Membre du conseil des joueurs

En huit ans au club, on ne l’a jamais entendu faire une déclaration fracassante ou se plaindre de son positionnement, lui qui a vu les quatre coins du terrain. Coman a tout de même connu ses petits coups de chaud, comme la fois où il en est venu aux mains avec Robert Lewandowski à l’entraînement, ou quand il s’était pointé au Bayern Campus, le centre d’entraînement flambant neuf du club allemand, dans une voiture d’une autre marque qu’Audi, le sponsor officiel.

Tout juste de quoi prouver qu’il n’est pas non plus une ombre qui passerait son temps à raser les murs. Car le Francilien est énormément respecté en interne, à tel point qu’il fait désormais partie du conseil des joueurs, avec les piliers Manuel Neuer, Thomas Müller, Joshua Kimmich et Leon Goretzka. Ce qui ne surprend pas son ancien mentor, aujourd’hui adjoint d’Hervé Renard à la tête de l’Arabie saoudite :

En jeunes, il faisait partie des trois ou quatre joueurs référents. Il avait déjà un bon sens de la réflexion, il était capable d’être force de proposition, d’apporter son expérience. Ce n’est plus un jeune joueur aujourd’hui et je pense qu’il peut être de bons conseils. Il a du crédit dans ce club, et c’est mérité. Il n’est pas le genre à se défiler face à une quelconque responsabilité. »

Quand il a fallu faire un effort pour finaliser sa prolongation de contrat, signée après quelques mois de négociations en début d’année dernière jusqu’en 2027, les dirigeants se sont laissés convaincre de bonne grâce. « Ça leur tenait vraiment à cœur, assure Georg Holzner, qui suit le Bayern pour le journal Kicker. Ils ont conscience que c’est un joueur essentiel, sans doute le meilleur de l’effectif quand il est en pleine forme. »

On en vient là à ce qui fait la force du King : le terrain. Malgré ses incessants allers-retours à l’infirmerie (40 blessures répertoriées depuis 2015 par le site transfermarkt, dont cinq qui l’ont tenu éloigné des terrains pendant au moins deux mois), Coman a conquis son monde par ses fulgurances, sa vitesse, ses dribbles et sa constance.

« Pas adulé comme Ribéry », mais…

« Pour moi, il est l’un des deux ou trois meilleurs ailiers du monde », a encore salué son entraîneur Julian Nagelsmann la semaine passée. Au club, il est en tout cas perçu comme le numéro 1, que ce soit à droite ou à gauche, devant Leroy Sané, Serge Gnabry ou Sadio Mané. Il marque en plus des buts qui comptent double, par exemple contre le PSG.

« Son but en finale de C1 en 2020 fait qu’il est déjà une petite légende du club, estime Georg Holzner. Les supporters le respectent beaucoup. Il n’est peut-être pas adulé comme l’était Franck Ribéry, parce qu’il n’a pas le même caractère, mais ils savent tout ce qu’il apporte. Et puis on ne sait jamais, s’il marque encore beaucoup de buts dans des grands matchs, il peut toujours accéder à ce statut. »

Depuis le retour de la Coupe du monde, Coman est en pleine bourre en tout cas. Double buteur à Wolfsburg en février, homme du match au sommet contre l’Union Berlin il y a 10 jours (un but et une passe), c’est encore lui qui a fait tomber son club formateur en 8e de finale aller au Parc des Princes. Et malgré toute l’affection qu’il lui porte encore, il n’hésitera pas si l’occasion se présente lors du deuxième round mercredi. Car Coman a trouvé « une famille » en Bavière, comme il l’a dit lors de sa prolongation. En moins ronflant, un club qui correspond parfaitement à ce qu’il est.

« C’est une grosse institution, avec un fonctionnement clair, une hiérarchie respectée, et des joueurs au service du club avec beaucoup d’estime pour ce qui a pu être fait avant. Kingsley est un joueur comme ça. Il ne rechigne jamais, et ces clubs-là savent le valoriser », apprécie Laurent Bonadei, qui lui envoie toujours quelques messages, « surtout quand ça va moins bien ». Ça doit commencer à faire un petit moment que Coman n’a pas entendu parler de lui.