Taxe à 75%: Cinq questions sur la grève des clubs de football professionnels

Romain Baheux
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Mathieu Valbuena lors du match entre Marseille et Saint-Etienne le 24 septembre 2013.
Mathieu Valbuena lors du match entre Marseille et Saint-Etienne le 24 septembre 2013. — MAGNIEN/20 MINUTES/SIPA

La menace est bien réelle. Réunis en assemblée générale ce jeudi, les clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 ont annoncé «une journée blanche», soit une grève, le week-end du 30 novembre pour protester contre la mise en place de la taxe à 75%, votée il y a une semaine. Ils ne devraient ainsi pas jouer la journée de championnat prévue à cette date. Mais comment en est-on arrivé là?

Pourquoi les clubs français font-ils grève?

Parmi les mesures phares de la campagne de François Hollande, la taxation à 75 % de la tranche des revenus au-dessus du million annuel crispait le football français depuis son annonce. La décision, contrainte par le Conseil constitutionnel, d’appliquer la loi à l’entreprise et non à l’individu met les clubs en première ligne. La Ligue de football professionnel estime à 44 millions d’euros par an à partir de 2014 le coût de cette mesure pour ses clubs. Une somme jugée bien trop importante par les dirigeants du football tricolore.

Qui va payer?

En toute logique, les clubs avec les joueurs les mieux rémunérés. Le PSG, avec plus de vingt joueurs au-dessus du million annuel, est naturellement le premier concerné. A la base, le club parisien aurait dû débourser quarante millions d’euros mais la limitation de cet impôt à 5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise n’obligera les dirigeants du PSG à ne payer «que» vingt millions d’euros. Derrière, Marseille, Lyon, Lille, Bordeaux et Rennes font partie des plus touchés. En tout, quatorze clubs ont des joueurs visés par cette taxe. Deuxième puissance financière de Ligue 1, Monaco sera épargné puisque le club princier n’est tout simplement pas basé en France et ne relève donc pas du droit fiscal hexagonal.

Seuls quatorze clubs sont impactés, pourquoi les autres suivent?

Tous les footballeurs de Ligue 1 ne sont pas millionnaires et aucun de l’échelon inférieur ne l’est. Dans l’élite du football français, Evian, Reims, Lorient, Sochaux et Nantes ne sont ainsi pas concernés par cette mesure mais soutiennent les clubs impactés et ont annoncé leur intention de faire grève, tout comme les clubs de Ligue 2. Ces derniers pourraient en effet souffrir des déboires financiers de leurs homologues de l’élite. «Pour que mes bilans soient équilibrés, je suis obligé de vendre des joueurs, souvent à des clubs de Ligue 1, explique le président de Caen (Ligue 2), Jean-François Fortin. Je n’ai pas d’intérêts à ce que demain, ils n’aient plus les moyens de recruter chez moi.»

Que va-t-il se passer le week-end du 30 novembre?

Les quarante clubs des deux premières divisions ont annoncé leur intention de ne pas jouer les rencontres prévues dans le calendrier de la Ligue de football professionnel ce week-end-là. A Saint-Etienne, le président Bernard Caïazzo pense déjà ouvrir Geoffroy-Guichard au public pour que les supporters puissent «aller à la rencontre les joueurs». D’autres envisagent une minute de silence en hommage au Mans et à Sedan, deux anciens clubs professionnels placés en liquidation judiciaire cette année.

Vont-ils vraiment faire grève?

C’est encore la grande inconnue. En annonçant une échéance précise, les clubs signifient clairement qu’ils n’ont pas l’intention de reculer. En programmant cette grève dans plus d’un mois et non pas ce week-end, ils se laissent la possibilité de revenir en arrière si le gouvernement entend leurs doléances. Une entrevue avec le président de la République doit se tenir jeudi. Pour l’instant, Matignon ne recule pas et a publié un communiqué moins d’une heure après l’annonce de la grève indiquant qu’«un club de football est traité comme une entreprise comme une autre». Le lobby du football hexagonal espère maintenant que François Hollande se montrera plus souple sur le sujet.