Afrique du Sud - Irlande : Puissants mais imprécis, ces Springboks sont prenables pour les Bleus

RUGBY Les Springboks, champions du monde en titre, seront les probables adversaires des Bleus en quarts de finale après leur défaite contre l’Irlande samedi soir. Que retenir des Sud-Africains ?

William Pereira
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Afrique du Sur - Irlande : Le débrief express de la victoire irlandaise — 20 Minutes

Au Stade de France,

Le mensonge est un don propre à l’humain, une faculté naturelle que nul en ce monde ignore. Mais il y a mentir, et le faire droit dans les yeux de son interlocuteur sans sourciller. Après l’échec des Springboks contre l’Irlande, quasiment synonyme de quart de finale contre le XV de France, le sélectionneur de l’Afrique du Sud, Jacques Nienaber jurait ne pas penser aux Bleus, ni à Antoine Dupont, rien, niet, walou. « Je n’ai pas encore analysé le XV de France. Tout d’abord, nous devons nous concentrer sur les Tonga avant de penser à la France. »

Oui, bien sûr, les fameuses îles Tonga, 15e nation mondiale, l’ogre du Pacifique, celui-là même qui a pris 59 pions dans le museau face aux Irlandais le 16 septembre. Sans doute. Pas à nous, Jacques, pas à nous. Dans le même genre, on saluera la panne de traduction évoquée par son homologue Andy Farrell au moment de répondre à une question sur son soulagement d’éviter les Bleus. « Nous ne pensons qu’à l’Ecosse. » Décidément, les Bleus n’intéressent personne. C’en est limite vexant.

Bon, on est un peu mauvaises langues, surtout avec le sélectionneur des Springboks. Accordons-lui d’avoir donné son avis sur la blessure d’Antoine Dupont. « C’est comme pour nous. Nous perdons un joueur important [Malcom Marx]. Je pense que ça ne sera pas la seule blessure. Les blessures font partie du rugby. Je pense qu’il reviendra certainement au cours de la compétition. J’en serais ravi. Une Coupe du Monde, c’est fait pour que les grands joueurs jouent. » Un mensonge, un autre. Si les grands joueurs peuvent ne jouer que contre les autres, c’est toujours mieux.

Violence et imprécision

Blague à part, on n’est nous-mêmes pas certains d’avoir envie de voir Antoine Dupont se prendre Eben Etzebeth et Pieter-Steph Du Toit dans la gueule - l’équivalent de se faire renverser par un semi-remorque - avec des bouts de métal à la place des joues. On a déjà du mal à comprendre comment Johnny Sexton, pris pour cible pendant 80 minutes comme Sandrine Rousseau sur Twitter, a pu survivre à ce déferlement de violence. En conférence de presse post-match, l’ouvreur irlandais ne s’est d’ailleurs pas privé d’évoquer « les placages limites » tout au long de ce match « vraiment très physique ».

Bref, c’est donc un combat au sens propre du terme qui attend les hommes de Fabien Galthié en quarts de finale de son Mondial. Une tare, mais pas une fatalité. D’autant que, grâce à ces bons vieux Irlandais, le staff français a un modèle sur lequel prendre exemple pour mettre en échec les champions du monde. Le match de samedi, c’était un peu « comment gratter 12 ballons aux Sud-afs dans les rucks, et leur faire péter un câble dans nos 22 mètres, pour les nuls ». Le second point est important. Jouer face à l’Afrique du Sud, c’est se résigner à passer beaucoup de temps à défendre sa ligne ou au mieux ses 22. Face à l’Irlande, l’approche territoriale des Springboks était en soi pertinente, il n’a manqué que l’efficacité pour concrétiser la domination des 20 premières minutes de la seconde période. Ces derniers, à l’image du pilier Ox Nché, en sont bien conscients. « On doit travailler plus dur sur notre exécution et notre réalisme dans les 22 mètres. On doit réussir à conserver le ballon plus longtemps pour mettre l’adversaire sous pression. »

Les Springboks craignent la pression

Et que dire du jeu au pied catastrophique de la charnière De Klerk-Libbok, pas fichue d’en coller une entre les perches et par extension responsable de la faillite de leur équipe ? « Pendant l’échauffement les pénalités étaient passées sans problème, donc je ne sais pas ce qui s’est passé », avouait Nienaber. Cette équipe aussi puissante et expérimentée soit-elle, serait-elle perméable à la pression ? « Quand il y a moins de pression, c’est plus facile à gérer. Mais les joueurs s’habituent à la pression à mesure que la compétition avance. […] On va devoir parler de la façon dont on gère la pression. » Pas trop quand même hein ? Faudrait pas progresser trop en trois semaines.

Dès lors qu’on a dressé les quelques points faibles sud-africains, que peut-on attendre de nos Bleus ? Grégory Alldritt dans le rôle du mec qui soulève Etzebeth façon James Lowe (sans doute le plus grand moment de rugby du Mondial pour l’instant), Thomas Ramos dans celui du buteur dont rêvent les Springboks, Jalibert au sommet de sa créativité pour faire déjouer les avants destructeurs, Fickou façon Aki pour percer la défense de l’Afrique du Sud ? Se laisser embraser par un stade acquis à sa cause, comme ce fut le cas pour les Irlandais à Saint-Denis, ou plutôt devrions-nous dire Saint-Patrick ? Sans doute un peu de tout ça à la fois.