Réalité virtuelle : Van Gogh entre dans le game au musée d’Orsay
SUIVEZ LE GUIDE « 20 Minutes » a pu tester l’expérience de réalité virtuelle proposée dès mardi par le Musée d'Orsay autour de l’exposition « Van Gogh à Auvers-sur-Oise - Les derniers mois »
- Pour son exposition « Van Gogh à Auvers-sur-Oise - Les derniers mois », au Musée d’Orsay jusqu’au 4 février 2024, l’établissement propose une expérience en réalité virtuelle autour de l’œuvre du peintre.
- S’associant au fabricant de casques VR HTC, Orsay a ainsi développé « La palette de Van Gogh », un parcours immersif, à 360°, saisissant de réalisme et d‘émotion.
- Associer la réalité virtuelle au monde de l’art est désormais un axe de développement fort pour le musée national qui compte aller encore plus loin.
Plonger en immersion dans la palette de Van Gogh. En marge de l’exposition Van Gogh à Auvers-sur-Oise - Les derniers mois qui ouvre ses portes au public ce mardi*, le Musée d’Orsay invite les visiteurs à plonger dans l’univers créatif du peintre avec un casque VR sur la tête. 20 Minutes a pu tester cette expérience en avant-première.
« Un saut technologique »
Avant de découvrir une quarantaine d'œuvres (parmi les soixante-quatorze existantes) que l’infatigable peintre réalisa au cours des deux mois passés à Auvers (95), avant de se donner la mort le 27 juillet 1890, une salle est dédiée à l'entre à une expérience nouvelle baptisée La palette de Van Gogh, que l'administrateur général d'Orsay, Pierre-Emmanuel Lecerf décrit comme « un saut technologique, mais aussi un moment émouvant ». Et c’est HTC, le fabricant de casques de réalité virtuelle, à travers sa division HTC Vive Arts, qui est à la manœuvre.
Dans cet espace, douze casques XR Elite attendent les visiteurs. Ce modèle haut de gamme (d’une valeur de 1.399 euros) et léger malgré sa batterie intégrée (275 g) dispose de quatre caméras. Ici, elles permettent de matérialiser les mains de l’utilisateur, appelé à interagir avec du contenu. Le casque intègre également ses propres écouteurs. Une fois assis sur un tabouret rotatif, place à l’éblouissement ! Déconseillée aux moins de 8 ans, l’expérience est accessible aux personnes à mobilité réduite.
Mélanger les couleurs
Nous voilà immédiatement projetés dans la maison du Docteur Gachet, le praticien amoureux de l’art, immortalisé par Van Gogh et l’une de ses toiles. Margueritte Gachet, fille du médecin, joue la narratrice : « Monsieur Vincent épuisait un nombre invraisemblable de tubes, du rouge, du vert, du bleu de Prusse. Il se plaignait beaucoup, il disait souvent qu’il n’en avait jamais assez ». Notre hôtesse nous invite à nous emparer d’une palette de peinture, posée sur la table du salon. Il n’y a qu’à tendre le bras pour la faire sienne.
VR oblige, l’idée n’est pas de rester statique sur son tabouret, mais de tourner sur l’assise, lever et baisser la tête, laisser son regard happer par tel ou tel détail. Et même de jouer avec la matière. Ce que l’on ne tarde pas à faire. Alors que des bulles de couleurs flottent dans l’air, on peut les manipuler, les mélanger, les distordre et, peut-être, ainsi comprendre comment Van Gogh associait ses tubes de couleurs. Ces quelques minutes sont pleines de poésie.
D’émotion aussi, comme avec cette évocation du tableau baptisé « Racines d’arbres ». Peint le jour même du suicide de Van Gogh, l’œuvre se révèle sous un nouveau jour en réalité virtuelle. Ainsi le visiteur est-il aspiré dans l’entrelacs des racines bleutées et dénudées du tableau, happé sous la surface du sol, sujet à une sensation presque étouffante lorsqu’en levant la tête se révèle au-dessus de lui un arbre majestueux. Troublant... On ne peut s’empêcher d’être saisi par les sentiments qui devaient alors oppresser le peintre, qui se tira une balle dans la tête quelques heures après avoir achevé sa toile. « Ma vie à moi aussi est attaquée à la racine même », écrivait-il quelques jours plus tôt…
Un parcours cadré dans le temps et bordé techniquement
Tout au long du parcours en VR, un martin-pêcheur sert de fil rouge. Il suffit de le suivre pour passer d’un univers interactif à un autre. Parcours qui, bien que fusionnel, reste logiquement cadré dans le temps : dix minutes. On aurait aimé pouvoir s’attarder ici ou là, profiter parfois davantage de telle ou telle séquence. Le casque XR Elite d’HTC, censé offrir une zone de « jeu » jusqu’à 10 mètres est ici utilisé de façon statique, assis. L’expérience proposée par le Musée d'Orsay, dont on comprend les contraintes logistiques, est ainsi volontairement limitée techniquement. Un développement en réalité augmentée, fusionnant des images d’Auvers-sur-Oise d’aujourd’hui, avec celles immortalisées par Van Gogh, aurait sans doute mérité d’être travaillé. Mais les 6 euros demandés pour cette déambulation en VR en plus du prix de la visite de l’exposition* en valent vraiment la peine.
Si HTC a assuré la partie technique de cette expérience, Orsay s’est associé avec Lucid Realities, société française spécialisée dans les expériences immersives, et la société de production de documentaires Tournez S’il Vous Plaît pour proposer sa réjouissante Palette de Van Gogh.
Toucher de nouvelles communautés
En réalisant cette expérience, se révèle aussi tout le potentiel que la technologie peut apporter à l’art, et à l’art pictural, qui, comme ici, n’a absolument rien de figé dans ses encadrements. « Cela permet de toucher des communautés et des publics qui ne s’intéressent pas forcément au musée, de moderniser notre image par la gamification, la ludification », confirme Agnès Abastado, directrice du numérique au Musée d’Orsay. Musée d’Orsay qui n’en restera pas là. Pour les 150 ans de l’Impressionnisme, l’établissement préparerait, toujours avec HTC Vive Arts, une nouvelle expérience. Plus ambitieuse encore, celle-ci devrait pouvoir réunir simultanément dans une zone de 500 m2 jusqu’à 80 personnes équipées d’un casque de réalité virtuelle sans être obligées de rester statiques. Rendez-vous en 2024 pour une exposition qui, pour le reste, sera bien réelle !
* du 3 octobre 2023 au 4 février 2024. Entrée libre pour les personnes bénéficiant de la gratuité ; 16 euros (plein tarif).