Coupe Gambardella : Pourquoi le « rusé » Mohamed El Arouch est perçu comme le nouveau phénomène de l’académie de l’OL

FOOTBALL Le prometteur milieu relayeur de 18 ans, déjà passé professionnel l’été dernier à Lyon, sera l’une des principales curiosités de la finale de la Coupe Gambardella, ce samedi (17h15), entre l’OL et le Stade Malherbe de Caen

Jérémy Laugier
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Mohamed El Arouch, ici mercredi lors d'un entraînement à Meyzieu, trois jours avant la finale de la Coupe Gambardella contre Caen.
Mohamed El Arouch, ici mercredi lors d'un entraînement à Meyzieu, trois jours avant la finale de la Coupe Gambardella contre Caen. — Jérémy Laugier/20 Minutes
  • Vingt-cinq ans après son dernier sacre en Coupe Gambardella, l’Olympique Lyonnais rêve de l’emporter contre Caen, ce samedi (17h15) au Stade de France.
  • Parmi les talents de moins de 19 ans qui incarnent la réussite de la formation lyonnaise, le milieu relayeur Mohamed El Arouch fait partie des leaders de ce groupe.
  • Repéré par l’OL dès l’âge de 11 ans à Orange (Vaucluse), le néo-professionnel allie « qualité technique, intelligence sur le terrain et vision du jeu ».

Cela fait 25 ans que l’OL court après la quatrième Coupe Gambardella de son histoire. Cela s’apparente à une anomalie tant la formation lyonnaise a fait ses preuves depuis l’épopée victorieuse de la génération Malbranque-Balmont-Bréchet dans l’épreuve reine réservée aux U19. Bien que porté par des talents prometteurs ayant un contrat professionnel en poche, à savoir Karim Benzema et Hatem Ben Arfa en 2005 et 2006, puis Maxwel Cornet en 2015, l’Olympique Lyonnais n’a jusque-là jamais remporté la moindre finale au Stade de France.

Le défi sera à la hauteur du groupe d’Eric Hély, ce samedi (17h15) contre le Stade Malherbe de Caen, et notamment de son milieu de terrain Mohamed El Arouch (18 ans), seul joueur de sa génération déjà passé professionnel (en juillet 2021). Impliqué sur les trois buts de la demi-finale de Gambardella contre Troyes (3-1), l'international U18 tricolore avait séduit Peter Bosz dès l’été dernier, et celui-ci lui avait même fait participer à deux matchs de préparation.

La signature du premier contrat professionnel (jusqu'en 2024) de Mohamed El Arouch a été officialisée en juillet 2021 par son club formateur.
La signature du premier contrat professionnel (jusqu'en 2024) de Mohamed El Arouch a été officialisée en juillet 2021 par son club formateur. - Olympique Lyonnais

« Il rivalisait avec des garçons ayant 2 ans de plus que lui »

Si l’histoire entre Mohamed El Arouch et l’OL a officiellement commencé en 2017, après un essai puis un tournoi sous le maillot lyonnais, durant lesquels « il a fait l’unanimité au club », son observation remonte à 2015-2016. Recruteur pour l’académie de l’OL de 2000 à 2021, Gilles Signoret est prévenu cette saison-là par l’entraîneur du Sporting club d’Orange (Vaucluse), conscient d’avoir dans son groupe un garçon très prometteur.

« Mohamed n’avait alors que 11 ans mais il était déjà surclassé avec les U13 du club, raconte Gilles Signoret. En général, un surclassement à cet âge est lié à un profil de joueur nettement plus rapide ou costaud que ceux de sa catégorie. Mais ce n’était pas le cas de Mohamed : il était surclassé pour sa qualité technique, son intelligence sur le terrain et sa vision du jeu. Quand on voit un tel bout de chou rivaliser avec des garçons ayant deux ans de plus que lui, on n’a guère de mérite à le détecter. »

Un poster de Juninho dans sa chambre d’enfant à Orange

Grâce à « une relation de confiance instaurée avec la famille », l’OL coiffe les nombreux autres clubs professionnels français intéressés, comme l’OGC Nice. De sa première visite dans l’appartement des El Arouch à Orange, Gilles Signoret se souvient du poster de Juninho découvert dans la chambre de Mohamed, qui n’avait pourtant que 5 ans lorsque le légendaire milieu brésilien quittait Lyon. « Depuis tout petit, dans son club d’Orange comme à Lyon, il aime prendre la responsabilité des coups francs, et Juninho a forcément été un modèle pour lui à ce niveau », précise le recruteur.

Formateur à l’OL, Amaury Barlet a vu débarquer « Momo » à 13 ans dans la toute nouvelle académie du club à Meyzieu (Rhône), avant de l’avoir pleinement sous ses ordres en U16 puis en U17 nationaux. Sa saison réussie en 2019-2020 (3 buts et 8 passes décisives), avant son interruption en raison du Covid-19, a définitivement convaincu Amaury Barlet sur le potentiel du jeune milieu relayeur.

« C’était déjà un gamin rusé, qui anticipait les passes adverses »

« C’est un leader technique mais aussi un leader d’engagement et de combativité sur la répétition et l’intensité des courses, confie l’entraîneur. Il sait gratter beaucoup de ballons. » Un profil qui n’est donc pas sans rappeler Maxence Caqueret. « Il y a de ça, car tout comme Maxence, c’est un garçon très apprécié dans un groupe, plein d’humilité, toujours souriant, et très intelligent dans le jeu », approuve Amaury Barlet. Une caractéristique qui avait déjà sauté aux yeux de Gilles Signoret lors de ses observations à Orange.

Mohamed était bien sûr très talentueux techniquement, et avec un gros volume de jeu. Mais ce qui m’avait encore plus frappé, c’était sa capacité à lire le jeu de l’adversaire. C’était déjà un gamin rusé, qui devinait et anticipait systématiquement les passes des joueurs d’en face. »

Des « excès d’altruisme » pas communs pour un jeune virtuose

Amaury Barlet poursuit l’étude pointue du profil de son ex-protégé, qui brille désormais entre la catégorie U19 et l’équipe réserve en National 2, sans oublier sa présence fréquente dans les entraînements de Peter Bosz : « Il identifie très vite les problèmes qu’il peut y avoir dans certains matchs et il en parle aussitôt avec ses coéquipiers et le staff. Son leadership et son sens du jeu se voient là aussi ». Dans ce concert de louanges autour de la principale curiosité de cette finale de la Coupe Gambardella à Saint-Denis, même le principal défaut détecté n’en est pas vraiment un.


« Mohamed a toujours préféré la passe au but, résume Amaury Barlet. Je me souviens d’une action en U17, où il s’était retrouvé seul face au gardien à l’entrée de la surface. Même là, il avait préféré servir un partenaire. Sur le coup, j’avais voulu lui faire remarquer qu’il devait frapper. Mais finalement, je ne lui avais même pas dit car en fait, ses excès d’altruisme ne me dérangeaient pas. » On peut aisément le comprendre, tant ce type de caractéristique tend à disparaître dans un football moderne de plus en plus individualiste et tourné vers les statistiques.

« Il fait ce que le jeu réclame »

A ce propos, l’entraîneur des U19 lyonnais Eric Hély louait mercredi la mentalité de son groupe : « Ces joueurs ont le goût de l’effort. Quelquefois, les joueurs doués pensent que leur talent va suffire, mais pas eux ». Un constat qui colle parfaitement à Mohamed El Arouch, pas avare en efforts défensifs, et qui a profité des 15 mois sans compétition officielle, durant le Covid-19, pour se tester face à des joueurs bien plus âgés lors de matchs amicaux régulièrement organisés par l’OL. « Il s’est souvent un peu fait chatouiller dans les matchs car il est dur à attraper pour un adversaire, ce qui en énervait certains, sourit Amaury Barlet. Ce n’est jamais du chambrage, il fait ce que le jeu réclame. Mais on a tout de même effectué un travail avec lui pour la prévention des risques de blessures. »

Le plus gros défi de ce petit gabarit d'1,66 m n’est-il pas d’assumer un statut d’espoir le plus scruté de la génération 2004, avec toute la pression que cela entraîne dans une académie aussi reconnue que celle de l’OL ? Son aîné Rayan Cherki (18 ans), actuellement blessé, a par exemple eu des difficultés à faire décoller sa carrière professionnelle pour de bon cette saison. « "Momo" est un gamin très bien entouré par sa famille, qui est pleine de valeurs et qui a les pieds sur terre, indique à ce propos Gilles Signoret. Tout le monde autour de lui tient à ne pas brûler les étapes. » La découverte ce samedi de l’intimidant Stade de France, en ouverture de la finale de la Coupe de France entre le FC Nantes et l’OGC Nice, est déjà un passage majeur.

Mohamed El Arouch annonce être « déterminé comme un lion » avant son premier match au Stade de France, ce samedi face à Caen.
Mohamed El Arouch annonce être « déterminé comme un lion » avant son premier match au Stade de France, ce samedi face à Caen. - Jérémy Laugier/20 Minutes

« Il passait son temps à dribbler sa mère dans la cuisine »

Ses coéquipiers comptent sur la précision de ses coups de pied arrêtés et sa vista dans le cœur du jeu, comme l’indique le capitaine Yannis Lagha : « C’est un très bon joueur, je pense que tout le monde le sait maintenant. Il nous apporte beaucoup offensivement. Les grands joueurs sont décisifs dans les grands moments, et je pense qu’il en fait partie ».

« Nous sommes déterminés comme des lions », lançait spontanément l’intéressé au micro d’OL Play, à trois jours de cette finale de la Coupe Gambardella. A en croire ses proches, Mohamed El Arouch ne ressent jamais de pression sur un terrain. « C’est avant tout un gamin qui aime le jeu plus que tout depuis toujours, résume Gilles Signoret. Ses parents me racontaient qu’il passait son temps à dribbler sa mère dans la cuisine de l’appartement familial. » Une école encore meilleure que le futsal pour régner avec le ballon dans les petits espaces, non ?