Tcheumeo, du terrain de foot au tapis des Mondiaux

JUDO Ceinture blanche il y a cinq ans, la judoka vise une médaille aux championnats du monde de Tokyo chez les moins de 78kg...

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La judoka Audrey Tcheumeo, le 31 août 2010 à Bondy.
La judoka Audrey Tcheumeo, le 31 août 2010 à Bondy. — S.Ortola/20minutes

L’allure est clairement nonchalante. Mains dans les poches,  claquettes et survet’ relevé à hauteur des mollets. Il n’y a qu’en dehors d’un  tatami qu’Audrey Tcheumeo avance sans se presser. La judoka de Villemonble  réserve son explosivité et son regard guerrier à ses adversaires, jeudi, pour  les championnats du monde de Tokyo. «J’aime la bagarre, me battre, voir les  meufs et les torturer», lance celle qui ne cache rien de son côté «garçon  manqué». A 20 ans, Audrey Tcheumeo parle haut et a bien conscience de détonner  dans l’univers «propret» et reservé du judo. Il y a encore cinq ans, la jeune  femme n’avait d’ailleurs jamais enfilé un kimono. Jusqu’au jour où, un peu par  hasard, un copain du quartier de Bondy la traîne dans un dojo.

«Je  galérais en bas de chez moi. Un de mes amis m’a dit: "Tchou, viens on va faire  du judo". Je lui ai dit: "Tu m’as bien vue?" J’étais réticente. Ce n’était  vraiment pas mon univers, le respect, tout ça. Au début, je n’ai pas trop aimé…»  Rapidement, son premier entraîneur, Omar, la pousse à persévérer. «J’étais  ceinture blanche et il m’a donné une ceinture verte pour faire une compétition.  Il m’a dit, vas-y, on verra après.» La jeune fille termine deuxième des  championnats de France chez les moins de 78kg et bluffe tous les entraîneurs  nationaux.

«Le foot, ça ne paie pas beaucoup»

Dans les murs de  l’Insep, personne ne se souvient d’une progression aussi rapide. «Sa trajectoire  est vraiment impressionnante, reconnaît Martine Dupond, responsable de l’équipe  féminine. Elle a de grosses qualités physiques et une combativité hors norme.  Evidemment, en cinq ans, on ne peut pas être performante dans tous les secteurs  techniques. Elle a une immense marge de progression.» En attendant, Tcheumeo est  déjà la numéro 2 de l’équipe de France, derrière Céline Lebrun. Pas si mal pour  une athlète qui pourrait aussi évoluer dans une équipe de football de haut  niveau.

«En fait, j’aurais dû aller à Juvisy (L1 féminine). Mais le  foot, ça ne paie pas beaucoup et on n’est pas trop connue. Alors autant percer  dans un autre sport.» Avant d’enchaîner les ippons, celle qui «kiffe» Andy  Murray a donc tout testé. Tennis, football, hand et même un peu de boxe. «Si je  n’avais pas trouvé le judo, je serais dans mon univers. Je ne sais pas si  j’aurais mal tourné. Peut-être que oui. J’étais rebelle. Têtue à l’école. J’ai  fait des conneries mais je me suis calmée.» Dans le groupe France, «Tchou» reste  pourtant la bonne camarade avec qui on peut blaguer. «C’est une folle, piaffe  Pénélope Bonna, titulaire chez les moins de 52kg. Si tu veux rire, tu vas avec  elle. Elle est naturelle, spontanée. Un peu fatigante parfois quand tu as envie  de te reposer.» Sur un tatami, il paraît que cela fonctionne  aussi.