Toulouse : Le célèbre collectif d’artistes Mix’art Myrys à la rue… Comment en est-on arrivé là ?
CUTURE Depuis trois semaines, le vaste local qui accueillait l’emblématique collectif artistique Mix’Art Myrys est fermé pour raisons de sécurité et le dialogue semble rompu avec la métropole. Retour sur cette tumultueuse histoire
- Après 26 ans d’existence agitée, le célèbre collectif artistique Mix’Art Myrys se retrouve une nouvelle fois à la rue.
- La mairie a fermé pour raisons de sécurité sa grande halle des Minimes.
- Le bâtiment appartient depuis 2018 à la métropole qui n’a pas engagé les travaux de mise aux normes.
- Mix’art Myrys et la collectivité se renvoient la balle sur les raisons de cette situation qui donnerait le tournis à un acrobate.
Voilà 26 ans que le collectif Mix'art Myrys agite le monde culturel toulousain, passant du rang de squatteur de bâtiments publics avec son concept d'« illégalité légitime » à celui d’acteur artistique à part entière. On croyait les choses apaisées depuis que Mix’art logeait aux Minimes, dans un vaste bâtiment de la rue Ferdinand-Lassale avec pour mission officielle de faire rayonner les arts plastiques. Mais patatras. La mairie a pris le 20 janvier un arrêté de fermeture du lieu, pour raisons de sécurité.
Et le torchon brûle à nouveau avec Toulouse métropole, le propriétaire. En mode revival, une pétition dépasse déjà les 10.000 signatures de soutien. 20 Minutes fait le point sur ce dossier brûlant qui ressemble fort à un serpent qui se mord la queue.
Pourquoi le bâtiment est fermé
Mix’art « habite » depuis 2005 dans la grande halle de stockage des Minimes. Jusqu’en 2018, la métropole payait le loyer à un propriétaire privé. En 2018, elle a racheté le bâtiment pour 2,1 millions d’euros. Mix'art Myrys y accueille régulièrement du public. Le 14 janvier 2021, la commission de sécurité – municipale – a mené une inspection inopinée, « prévue de longue date, mais repoussée en raison des deux confinements », de source municipale. Le bâtiment n’a pas d’issue de secours, pas d’alarme, il abrite des chalumeaux, des chauffages d’appoint, des matériaux combustibles… Le 20 janvier, le couperet est tombé : fermeture administrative. Plus personne ne rentre, ni les six salariés permanents, ni les artistes accueillis.
Pourquoi les travaux n’ont pas été faits
C’est là que le serpent se mord la queue. Au moment du rachat, la métropole a mis sur la table une enveloppe de 3 millions d’euros pour la mise aux normes du hangar de stockage. Parallèlement, le collectif devait signer une « convention d’occupation ». Il ne l’a jamais paraphée au motif, affirme-t-il, que le bâtiment n’était pas aux normes « du Code du travail ». Quant à la métropole, elle n’a pas engagé les travaux, au motif que la convention n’était pas signée…
Une décision collégiale
Alors, comment en est-on arrivé à cette situation inextricable ? « Nous avions un vrai souhait sur les arts plastiques mais on n’est pas d’accord sur le projet. Ils ont choisi un autre chemin », affirme Nicole Yardeni, adjointe chargée des relations avec les acteurs culturels au Capitole et présidente de la commission Culture de la Métropole. La nouvelle élue indique que Mix’art Myrys remet à intervalles réguliers un autre projet [imaginé pour son déménagement avorté dans les halles de la Cartoucherie] « à 9 voire 11 millions d’euros ». D’où le blocage.
Même son de cloche du côté de Gérard André, le vice-président socialiste de la commission : « C’est un dossier qui dure depuis quinze ans et qui n’a jamais abouti quelles que soient les mandatures, rappelle-t-il. C’est un problème de dimensionnement du projet, entre les souhaits du collectif et ceux des élus qui sont aussi garants des deniers publics ». Quant à la rumeur d’une opération immobilière juteuse rue Ferdinand-Lassale, Nicole Yardeni coupe court : « Je n’en ai jamais entendu parler et c’est d’ailleurs, malheureusement, un secteur où les friches ne manquent pas ».
« Réécrire l’histoire »
La version politique d’un collectif trop gourmand a le don d’agacer du côté de Mix’art. « Cette façon de réécrire l’histoire, de jeter le doute sur notre bonne foi, c’est limite insultant », réagit Joël Lecussan, le porte-parole. Il assume de ne pas avoir signé la convention : « Elle indiquait que le bâtiment était aux normes du Code du Travail, ce qui n’était pas le cas. En ne la signant pas, nous avons protégé la métropole », souligne-t-il. Il admet aussi que l’enveloppe de 3 millions d’euros ne leur paraissait pas suffisante. Mais il y avait une possibilité de financements complémentaires avec d’autres collectivités comme la Région. Un document mentionne même la somme de 4,4 millions d’euros en 2019. « De quoi refaire le toit fibro-amianté », glisse Joël Lécussan « mais depuis c’est silence radio ». Il reste persuadé que « l’histoire ne peut pas s’arrêter là » et qu’il y a encore une possibilité d’en « sortir par le haut ».