«Assassin’s Creed»: Après le jeu et le film, la série, une bonne idée?
SERIE Après le jeu vidéo et le film, le directeur de contenu de la licence « Assassin’s Creed » pour Ubisoft a promis l’adaptation en série, à l’instar de nombreuses autres franchises vidéo ludiques…
Après le film, la série télé ! La saga vidéo ludique « Assassin’s Creed », franchise phare d’Ubisoft, devrait être déclinée en série télé. « C’est comme pour le film, les gars, nous allons prendre notre temps pour être certain de sortir quelque chose dont nous pouvons être fiers. Mais si vous voulez savoir si c’est dans nos plans, la réponse est… OUI », a répondu à ce sujet lors d’une discussion avec les fans Azaïzia Aymar, directeur de contenu de la licence pour Ubisoft, sur le site spécialisé Reddit. De Super Mario Bros à Warcraft en passant par Mortal Kombat, les adaptations de jeu vidéo au cinéma ont souvent laissé les gamers déçus. Alors adapter un jeu vidéo en série télévisée, est-ce une meilleure idée ?
« La série est le nouveau format à la mode »
« La série est le nouveau format à la mode, qui correspond à notre génération et à celle des joueurs », lance Julien Hubert, rédacteur en chef adjoint de Gameblog. De nombreuses séries télé ont d’ores et déjà été adaptées en jeu. Le jeu Walking Dead a même été qualifié par nos confrères des Inrocks comme « meilleur que la série », tandis que le développement du jeu Game of Thrones a commencé avant celui de la série culte de HBO.
L’adaptation de jeux vidéo en série est plus rare. La série Mortal Kombat, créée en 1998 par Juan Carlos Coto, n’a pas laissé un souvenir impérissable aux sériephiles. L’éditeur de jeux vidéo Trion Worlds et la chaîne Syfy ont développé conjointement une série, diffusée en 2013, et un jeu, Defiance, mettant en place un univers commun aux deux médias. Halo : Nightfall a été dévoilé en 2014 sous la forme d’une série en cinq épisodes via la plateforme Xbox. Les liens entre les jeux vidéo et le petit écran concernent surtout les séries animées de Pacman à Pokemon jusqu’à la future Castle Vania, bientôt diffusée sur Netflix.
« L’adaptation de jeux vidéo en série est une tendance qui émerge, il y a beaucoup de projets qui viennent d’être annoncés », commente Julien Hubert, comme les adaptations deBattlefield, Myst ou encoreLife is Strange.
« La stratégie transmédia »
Pourquoi ? « Les éditeurs de jeux vidéo pensent désormais à la stratégie transmédia, avec le cinéma, les séries, les livres, les BD. C’est un moyen pour eux de populariser leur univers, de re-médiatiser le jeu sous un autre format, de toucher un public plus large que celui des gamers », explique l’expert.
Cette dimension transmédia devient même centrale dans la stratégie de certains groupes. « Ubisoft n’a pas confié la licence Assassin’s Creed à un tiers pour son adaptation ciné, mais a développé un département cinéma », remarque Julien Hubert. Après les critiques assénées sur les adaptations filmiques, cette stratégie sera-t-elle la bonne ?
« Depuis Super Mario Bros, le jeu vidéo a beaucoup changé ! Les univers, les histoires, développées par des scénaristes, et les personnages sont plus complexes et profonds », rappelle l’expert. Un « énorme réservoir fictionnel potentiel pour tous les formats », considère le rédacteur en chef adjoint de Gameblog.
« Il faut respecter l’univers d’origine »
Au prix du respect de certaines règles. « Il faut respecter l’univers d’origine, être fidèle à celui-ci », édicte Julien Hubert. Comme pour les adaptations de comics, les gamers, qui ont une connaissance experte de l’univers du jeu puisqu’ils ont passé de nombreuses heures à jouer, ne doivent pas se sentir trahis. « Les réalisateurs et producteurs de la série doivent bien connaître et respecter l’œuvre originale », insiste le spécialiste, à l’instar de Christophe Gans et Paul W.S. Anderson, deux cinéastes joueurs qui ont porté au cinéma deux adaptations de jeux, saluées comme fidèles, Silent Hill et Mortal Kombat.
Pas question cependant de créer un clone du jeu non interactif. « Dans un jeu, on reste souvent accroché à l’avatar principal, ce qui empêche parfois de raconter des choses Off Screen, en marge. Avec la série, on peut tout à fait adopter des points de vue différents sur l’histoire ; c’est très intéressant ça », recommandent Raoul Barbet, le Game Director et Michel Koch, le directeur artistique et codirecteur du jeu Life is Strange.
« Ce que l’on perd en interactivité, on le gagne en richesse narrative »
L’écriture linéaire d’une série, n’a rien à voir avec celle interactive d’un jeu. Les deux peuvent cohabiter. « L’adaptation télévisuelle doit apporter quelque chose », déclare Julien Hubert. Dans le jeu Life is strange, « on est contraint de suivre Max [l’héroïne], ce qui est très bien pour s’attacher au personnage, mais dans les autres médias comme la littérature ou les séries TV, on peut s’intéresser davantage aux autres personnages. Ce que l’on perd en interactivité, on le gagne en richesse narrative », veut croire Raoul Barbet.
En ce sens, le film Assassin’s Creed, développé par Ubisoft, est un modèle du genre. Fidèle à l’univers, le long-métrage, comme les jeux vidéo, repose sur « le principe de la mémoire génétique qui fait revivre les souvenirs d’un ancêtre, sur fond d’un combat millénaire entre Assassins et Templiers », résume Julien Hubert. Mais le film permet au spectateur de découvrir un nouveau héros, une nouvelle unité de lieu et de temps, l’Espagne sous l’Inquisition, qui n’avait pas encore été mis en scène dans les jeux de la franchise. Si la saga adaptée sur grand écran n’a pas séduit tous les fans, le film a malgré tout rapporté plus de 240 millions de dollars de recettes, tous pays confondus. « L’adaptation cinématographique est réussie, et celle en série peut être plus intéressante encore », juge le journaliste. Lorsque la dernière demi-heure du film condense trop d’informations pour le spectateur qui n’est pas familier de l’univers vidéo ludique, « une série pourrait s’attacher aux personnages, développer une histoire en longueur », note encore Julien Hubert. Nul doute que les univers des séries et des jeux vidéo peuvent être complémentaires.