«When We Rise»: Après «Harvey Milk», Gus Van Sant poursuit sa fresque LGBT

série Le scénariste et le réalisateur de l’oscarisé « Harvey Milk » lancent une minisérie pour ABC, diffusée dès ce mercredi sur Canal + Séries, sur la lutte pour la reconnaissance des droits LGBT dans les années 1970 aux Etats-Unis…

Anne Demoulin
Austin P. MCKenzie, Britt Irvin et Matt Ellis dans la série «When  We Rise».
Austin P. MCKenzie, Britt Irvin et Matt Ellis dans la série «When We Rise». — American Broadcasting Companies

Une minisérie en sept épisodes sur l’histoire de la lutte pour la reconnaissance des droits LGBT aux Etats-Unis des années 1970 à nos jours. Aux commandes de When We Rise, l’équipe d’Harvey Milk, le long-métrage sorti en 2008 avec Sean Penn.

Le showrunner et créateur de cette série, Dustin Lance Black, avait obtenu l’Oscar du meilleur scénario en 2009 pour le biopic, tandis que le cinéaste Gus Van Sant, Palme d’or en 2003 avec Elephant, produit le show et réalise le pilote. When We Rise, diffusée du lundi 27 février au 3 mars sur ABC aux Etats-Unis, sera retransmise en France du 1er au 4 mars à 22h15 sur Canal + Séries.

Pourquoi When We Rise est en quelque sorte un spin off d’ Harvey Milk ?

Le portrait de trois activistes LGBT

Tandis qu’Harvey Milk retraçait les huit dernières années de la vie du premier Américain ouvertement gay élu à des fonctions politiques, When We Rise raconte les destins croisés de trois activistes qui ont, eux aussi, réellement existé.

La série suit ainsi la leader féministe Roma Guy (incarnée d’abord par Emily Skeggs, puis Marie-Louise Parker, l’ex-héroïne de Weeds) qui découvre sa sexualité en s’engageant aux côtés de ses amies lesbiennes et cofonde le San Francisco Women’s Building avec sa compagne, Diane. On suit aussi le vétéran afro-américain du Vietnam Ken Jones (campé d’abord par Jonathan Majors, puis Michael Kenneth Williams, ancien de The Wire, Boardwalk Empire et The Night Of) dans sa lutte contre le racisme et pour la diversité dans la communauté gay, jusque dans son engagement dans la lutte contre l’épidémie de sida.

Mais le héros de When We Rise, c’est Cleve Jones (incarné d’abord par Austin McKenzie puis par Guy Pearce, l’acteur australien révélé avec Priscilla, folle du désert). Ce fervent supporter d’Harvey Milk est à l’origine du NAMES Project AIDS Memorial Quilt et c’est lui qui a mené la Marche nationale pour l’égalité en 2009. Dans le film Harvey Milk, le personnage était incarné par Emile Hirsch.

Une plongée dans le San Francisco des années 1970

Cleve Jones est le narrateur de la série, en partie inspirée de ses propres mémoires When We Rise : My Life in the Movement. Alors que le livre débute en 1969, lors des émeutes de Stonewall à New York, la série commence en 1971, à Scottsdale, dans la banlieue de Phoenix en Arizona où Cleve Jones, jeune homosexuel de 18 ans, vit dans la peur, mais découvre, grâce à un reportage du magazine Life sur le mouvement Gay Liberation qui invite au coming out avec le slogan « Out of the closets, Into the streets ! » (« Hors des placards, dans la rue ! »), qu’il n’est « pas seul » et qu’il existe une terre promise pour les gays et les lesbiennes : San Francisco.

Alors qu’il confie son homosexualité à son père psychiatre, ce dernier lui rétorque : « C’est une maladie, cela peut être traité ». Lobotomie et autres électrochocs sont les méthodes barbares utilisées alors pour traiter cette « pathologie ». Le jeune homme part vivre à San Francisco. Mais, en 1971, le summer of love a laissé place à l’hiver de la répression policière. Il ne tarde pas à faire la connaissance de Roma Guy et Ken Jones, dans le quartier gay de San Francisco (connu plus tard sous le nom du Castro), et à s’engager dans la lutte pour la reconnaissance des droits LGBT. « Qui que tu sois, tu ne seras plus jamais seul », se réjouit-il.

Une « histoire qui doit être racontée »

Comme avec Harvey Milk, la série s’autorise peu de libertés formelles, emprunte les conventions du biopic et restitue avec exactitude l’atmosphère des années 1970. When We Rise respecte la chronologie des événements, reconstitués avec un souci remarquable de vérité historique, ponctués d’images d’archives.

La série accueille également une pléiade de guest stars : Whoopi Goldberg dans le rôle de l’activiste Pat Norman, Dylan Walsh (un des deux chirurgiens de Nip/Tuck) dans la peau du Dr Marcus Conan qui fut l’un des premiers médecins à diagnostiquer et à traiter le sida, Rachel Griffiths (Six Feet Under) dans le rôle de la compagne de Roma Guy, Kevin McHale (Glee) qui prête ses traits à Bobbi Campbell, un militant qui s’est battu contre le sida, Carrie Preston (The Good Wife) en activiste lesbienne et la transgenre Ivory Aquino qui joue la militante Cecilia Chung…

Regrets et louanges

« C’est une histoire qui doit être racontée et doit être entendue (…) Mais on a un peu l’impression que When We Rise est un programme qui aurait pu (et aurait dû) être fait il y a 15 ans, sinon plus », fait remarquer Entertainment Weekly. « Même en 2017, alors que nous aimons penser que les frontières ont été repoussées encore plus loin et que les voix de la diversité sont de plus en plus entendues, When We Rise résonne comme une curiosité étonnante, sur une grande chaîne de télévision », estime au contraire The Hollywood Reporter.

A l’heure où une des premières mesures de Donald Trump est un décret anti-avortement, que le très anti-gay vice-président Mike Pence est à l’origine dans l’Indiana de la RFRA ( Religious Freedom Restoration Act), loi qui permet aux entreprises de refuser les personnes homosexuelles et aux transsexuelles en invoquant les convictions religieuses, il n’est certainement pas inutile de rappeler l’histoire des luttes féministes et LGBT. « Si Donald Trump regarde le show, il pourrait l’aimer », avait toutefois lancé le showrunner Dustin Lance Black en janvier lors du rendez-vous de la Television Critics Association.