«On aurait pu arrêter Mohamed Merah»
INTERVIEW Jean-Charles Doria signe le documentaire «Mohammed Merah, itinéraire d'un tueur» mercredi à 20h45, dans le cadre de la soirée spéciale de France 3...
Les avocats d’une famille de victimes ont demandé en février la déprogrammation de votre documentaire. Avez-vous craint qu’il ne soit pas diffusé?
Non, car France 3 a été très clair sur son intention de le diffuser. De plus, il n’y avait pas de motif qu’il soit déprogrammé. Personne n’avait vu le documentaire, surtout! Le reproche -qui n’était pas partagé par toutes les familles de victimes- était que la mère et la sœur de Merah s’exprimaient dans le doc. Mais sur 105 minutes, elles ont la parole sept minutes! J’ai interrogé des policiers, des familles de victimes, des dizaines de personnes, au cours de mes huit mois d’investigation.
L’affaire est cependant très sensible…
Effectivement, et ces huit mois se sont passés sous tension, d’autant que l’instruction est toujours en cours. Il était très difficile de faire parler les protagonistes de l’affaire. Il y avait de la peur, de l’émotion, de la défiance envers les journalistes. Ce que j’ai cherché à montrer avec ce documentaire, c’est comment on arrive à une telle tragédie, quel était son parcours, sa famille, le rôle des services de renseignements… Est-ce que d’autres affaires Merah peuvent se produire?
Dans la version que nous avons pu visionner, le documentaire montre très vite une reconstitution d’assassinat. Vous n’avez pas peur de choquer?
La reconstitution permet d’avancer dans la narration et cette scène était une manière d’illustrer la froideur, la lâcheté et la brutalité de l’homme. Après, il faut savoir que nous avons revu, peaufiné, travaillé, modifié jusqu’au bout le documentaire; peut-être que la version que vous avez vue différera sur quelques points de la version définitive. Mon but n’est pas de choquer.
Au cours de votre longue enquête, qu’est-ce qui vous a le plus surpris?
Sans doute le fait qu’on aurait pu l’arrêter avant les tueries. Et le double jeu très poussé de Mohamed Merah, son art de la dissimulation et de la manipulation. Il a mis au point une stratégie très poussée et perverse pour enfumer tout le monde, y compris ses proches. Il y a un décalage systématique entre ce qu’il montre et ce qu’il est.