La quetsche ne compte pas pour des prunes

Ludovic Meignin
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Les producteurs vendent aujourd'hui leurs fruits aussi bienà la grande distribution, qu'aux grossistes et aux consommateurs.
Les producteurs vendent aujourd'hui leurs fruits aussi bienà la grande distribution, qu'aux grossistes et aux consommateurs. — G. VARELA / 20 MINUTES

   Une tradition séculaire se perpétue dans les vergers alsaciens. La récolte de la quetsche, production typiquement régionale dont les origines remonteraient à l'antiquité, bat son plein en cette rentrée. Et la cueillette devrait se poursuivre une dizaine de jours encore. D'ores et déjà, la production s'annonce cette année « très bonne, autant en qualité qu'en quantité et en calibre », se félicite Willy Huffschmitt, président de l'Association des producteurs de fruits à noyaux d'Alsace. Riche en vitamines, la quetsche entre dans la composition des tartes ou encore accompagne les viandes. On peut aussi en faire des confitures ou la déguster telle qu'elle. Le fruit peut, enfin, être distillé pour produire de l'alcool blanc. Ce fut longtemps un de ses principaux débouchés en rapport avec le privilège des bouilleurs de cru. 

   Aujourd'hui, ses canaux de distribution sont nettement plus diversifiés. La filière s'est organisée pour vendre sa production à la fois à la grande distribution, aux grossistes et directement au consommateur. « Les fruits récoltés le jour même se retrouvent dès le lendemain sur les étals de nos stands installés sur des marchés de Strasbourg », explique Willy Huffschmitt. Son exploitation de vingt hectares, installée à Westhoffen, en compte quatre réservés aux arbres à quetsches. L'agriculteur revendique une production fruitière « raisonnée » en assurant « limiter au maximum le recours aux pesticides » sous le contrôle d'un organisme certificateur agréé. 

   L'avenir de la quetsche d'Alsace semble florissant. Et pourtant, les professionnels de la filière sont inquiets. « Nous souffrons de la concurrence de l'Allemagne [premier producteur de l'Union européenne] où nos homologues emploient de nombreux saisonniers venus des Pays de l'Est, s'émeut le producteur Frédéric Kugel. Leurs charges sont 30 à 40 % moins élevées que les nô­tres. L'Europe doit réequilibrer les choses, sinon je crains pour l'avenir. » 

   De fait, si Frédéric Kugel ramasse encore les quetsches à la main, cette pratique tend à reculer. Pour réduire les coûts de main-d'oeuvre face à la concurrence, quatre producteurs locaux se sont associés pour mettre au point une machine unique en son genre. Ce prototype récolte rapidement les fruits en secouant les arbres et en réduisant le nombre de récoltants. Selon Willy Huffschmitt, il permet de réduire le coût de production d'environ 10 %. « L'engin étant automoteur, nous économisons un chauffeur de tracteur. Par ailleurs, nous pouvons traiter différents calibres de fruits pour nous adapter aux demandes spécifiques de l'industrie agroalimentaire ou de la grande distribution. » W