Ces buteurs brésiliens que la L1 a laissé filer

FOOT Comment le championnat français n'a pas su exploiter le talent de trois attaquant de la Seleçao...

Romain Scotto, à Port-Elizabeth
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Les attaquants du Brésil, Luis Fabiano et Nilmar lors d'un match contre le Chili, le 28 juin 2010 en 8e de finale de la Coupe du monde, à Johannesbourg.
Les attaquants du Brésil, Luis Fabiano et Nilmar lors d'un match contre le Chili, le 28 juin 2010 en 8e de finale de la Coupe du monde, à Johannesbourg. — A.Scorza/AFP

De notre envoyé spécial à Port-Elizabeth (Afrique du sud),

Pour certains, il faut dépoussiérer un album Panini pour trouver traces  de leur visage dans un effectif de L1. Sur les quatre attaquants du  Brésil, trois ont pourtant joué au moins une saison dans le championnat  de France. Luis Fabiano (à Rennes entre 2000 et 2002), Nilmar (en  2004-2005 à Lyon) puis Grafite (en 2006-2007 au Mans) n'y ont pourtant  pas connu la même expérience, avant de ressortir du bois à la Coupe du  monde.

Luis Fabiano, trop lent pour Rennes
Les supporters rennais se pincent encore pour le croire. Le buteur  titulaire de la Seleçao, successeur de Romario et Ronaldo, est bien un  ancien de la maison. L'attaquant n'y a pas laissé beaucoup de souvenirs,  si ce n'est celui d'un immense flop. Recruté pour 12 millions d'euros à  une époque où le club dépensait sans compter, il a quitté la Bretagne  sans jamais avoir marqué (en 12 matchs de L1). Dix ans après, Hervé  Guégan, alors entraîneur adjoint de Christian Gourcuff, ne parvient  toujours pas à expliquer les difficultés de celui qui n'était alors âgé  que de 20 ans. «Je ne sais pas s'il était trop jeune... L'adaptation est  toujours difficile. Au niveau des déplacements, ce n'était peut-être  pas ce que recherchait le coach.» Le club n'a pas attendu longtemps pour  refourguer son attaquant, devenu par la suite la machine à buts du FC  Séville. «Quand on investit sur un joueur, il faut des retombées  immédiates. A partir du moment où les dirigeants ont eu l'occasion de le  recaser, ils l'ont fait.» Les regrets, eux, n'arrivent que bien après.

Nilmar, trop jeune pour Lyon
Quand il voit l'ancien Lyonnais chantonner l'hymne brésilien, Bernard  Lacombe oscille entre deux sentiments. De l'affection, d'abord, pour un  garçon dont il revendique la découverte à Dubaï, lors des championnats  du monde des moins de 20 ans, en 2003. Puis une pointe d'amertume, pour  ce buteur précoce, dont l'OL n'a jamais su exploiter le talent. A Lyon,  Nilmar n'a réussi que ses débuts. Face à Rennes, le buteur arraché à  l'International Porto Alegre réalise un doublé juste après son entrée en  jeu. Et puis plus rien en L1. La suite de son aventure lyonnaise se  résume à une double rupture des ligaments croisés et un transfert impayé  aux Corinthians. «C'était un gamin. On aurait pu être plus patients  avec lui, mais la règle du football est celle de l'impatience», regrette  aujourd'hui Bernard Lacombe. Pour le conseiller du président Aulas, les  choses auraient pourtant pu se passer autrement pour l'attaquant de 19  ans. «Pour moi, ça s'est joué à rien du tout. Une occasion manquée  contre Manchester en Ligue des champions. Sur un centre de Malouda, il  peut marquer un but. Si c'est le cas, peut-être qu'on l'aurait regardé  différemment.» A l'époque, Nilmar est jugé trop jeune, et pas assez  mature pour s'imposer dans une équipe qui compte quelques gros bras en  attaque. «On n'a pas pu l'empêcher de rentrer chez lui, puisque c'est ce  qu'il voulait.» Un bon choix.

Grafite, trop fort pour Le Mans
Révéler chaque année quelques talents pour les vendre à prix fort  l'année suivante, c'est une nécessité pour le MUC qui a bien réussi son  coup avec Grafite, l'une de ses plus belles affaires (6 millions de  plus-value). Cela a aussi permis à un attaquant qui tournait en rond au  Brésil de forcer en douceur les portes de l'Europe. A l'époque, Daniel  Jeandupeux recrute l'attaquant. Yves Bertucci, alors entraîneur de la  réserve du Mans, se souvient d'un «garçon sympathique et à très fort  potentiel, même si, le club n'attendait pas autant de lui.» Auteur de 17  buts en une saison et demi, le MUC n'a même pas cherché à retenir son  attaquant vedette. «C'était impossible de toute façon, enchaîne  Bertucci. Le président a toujours été clair. Il a rendu de gros service  au club, il pouvait partir à Wolfsburg. Personnellement, je n'aurais pas  imaginé qu'il joue une Coupe du monde quatre ans plus tard.» A 31 ans,  Grafite, qui n'a joué que 5 minutes en Afrique du sud pour jusqu'à  présent, reste quand même l'une des grosses surprises de la sélection de  Dunga, qui a donc préféré des anciens de la L1 à Pato, Ronaldinho et  Adriano. Avec succès pour l'instant.