Réforme des retraites 2023 : Yaël Braun-Pivet annonce qu’elle va faire barrage à l’examen de la mesure d’abrogation

Vous ne passerez pas Mathilde Panot a annoncé l’intention de LFI de déposer une motion de censure contre le gouvernement

20 Minutes avec AFP
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Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale lors d'un séance de questions au gouvernement , à Paris, le 30 Mai 2023
Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale lors d'un séance de questions au gouvernement , à Paris, le 30 Mai 2023 — ISA HARSIN/SIPA

L’examen de la proposition du groupe indépendant Liot d’abrogation de la retraite à 64 ans ne se fera pas. Son sort était suspendu à une décision de la présidente de l’Assemblée nationale. Et Yaël Braun-Pivet (Renaissance) a annoncé faire barrage à l’examen de cette mesure, ce mercredi.

« Sur ces amendements de rétablissement de l’article 1, [qui prévoit de repasser à 62 ans], je suis très claire : ils seront déclarés irrecevables par moi-même dans la journée », a déclaré Yaël Braun-Pivet sur BFMTV. « J’applique la règle, rien que la règle », a-t-elle ajouté, une allusion à l’article 40 de la Constitution qui proscrit toute proposition parlementaire créant une charge pour les finances publiques.

Motion de censure contre le gouvernement

«On ne tord pas la Constitution pour faire plaisir aux oppositions», a défendu le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, ajoutant « on est dans le respect strict des règles constitutionnelles ». De son côté, la cheffe de file des députés insoumis Mathilde Panot a annoncé l’intention de son groupe de déposer une motion de censure contre le gouvernement, après cette annonce ce mercredi.

« Évidemment nous déposerons une motion de censure parce qu’il est inacceptable que l’on puisse faire un tel coup de force sans qu’il y ait une réaction derrière », a déclaré Mathilde Panot devant des journalistes, sans préciser quand elle serait déposée, ni avec quel autre groupe elle pourrait l’être. « On va en discuter avec eux », a-t-elle ajouté.

« Une attaque inédite contre les droits du Parlement »

Le groupe de députés indépendant et centriste Liot, à l’origine de la proposition, a dénoncé « une attaque inédite contre les droits du Parlement » après l’annonce de la présidente de l’Assemblée qu’elle ferait barrage à l’examen de cette mesure, programmé jeudi dans l’hémicycle.

« Sous la pression de l’exécutif, la présidente de l’Assemblée nationale a donc fait [ce] choix », a relevé le groupe Liot, dénonçant « une attaque inédite contre les droits du Parlement », et « un nouveau déni de démocratie ». « Notre ambition reste la même, permettre un vote de l’Assemblée sur la réforme des retraites, seule condition pour apaiser le pays », ont-ils ajouté.

Faire taire d’éventuels « amendements de rétablissement »

Le reste de la proposition de loi, portée par le groupe de députés indépendant Liot et soutenue par la plupart des oppositions, pourra tout de même être examiné jeudi. Mais donc sans vote possible sur sa mesure phare qui visait à abroger le recul de l’âge légal de départ à 64 ans. Le texte Liot a entretenu la flamme des opposants à la réforme promulguée mi-avril, même si la participation mardi à la 14e journée de mobilisation a été la plus faible enregistrée en cinq mois de manifestations.

L’annonce de la titulaire du perchoir n’est pas une surprise. « Je prendrai mes responsabilités », avait-elle plusieurs fois assuré ces derniers jours, qualifiant d'« inconstitutionnelle » l’abrogation des 64 ans. La mesure en question avait déjà été retoquée la semaine dernière en commission, au terme d’un vote serré (38 voix contre 34), mais les oppositions comptaient pouvoir rejouer ce match jeudi dans l’hémicycle, en déposant des « amendements de rétablissement ». C’est à ces derniers que va faire obstacle Yaël Braun-Pivet, comme l’y autorise le règlement de l’institution.

Débat sur « la conception de la démocratie »

Le patron des députés Liot, Bertrand Pancher, qui a accusé le camp présidentiel de « jeter de l’huile sur le feu » d’un pays fracturé, en tentant d’empêcher un vote jeudi. Déjà résignés quant à l’impossibilité de voter sur la mesure d’abrogation jeudi, son groupe et la gauche ont échafaudé des plans de repli. Ils ont déposé une série d’amendements alternatifs avec l’objectif qu’un scrutin symbolique ait tout de même lieu autour des mesures d’âge, sans s’exposer au couperet de l’article 40. Certains proposent par exemple d’établir « un objectif d’abrogation » des 64 ans à l’horizon 2024.

Le dépôt d’une nouvelle motion de censure contre le gouvernement est aussi débattu entre les groupes d’opposition qui élargissent déjà leur combat au-delà des retraites. Le mouvement de contestation est « passé d’une question sociale à un débat sur la conception de la démocratie », a jugé mardi le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, en référence au passage au forceps du report de l’âge de départ à 64 ans. Le patron des députés communistes André Chassaigne a estimé que le pays était devenu « une démocrature qui demain peut ouvrir à une dictature ».