Violences sur les femmes: «Il est indispensable d'oser en parler», estime Roselyne Bachelot

INTERVIEW La troisième campagne de lutte contre les violences faites aux femmes est lancée jeudi. L'occasion pour la ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, de revenir sur la politique gouvernementale pour combattre ce fléau...

Propos recueillis par Delphine Bancaud
— 
La ministre des Solidarités Roselyne Bachelot lance la troisième campagne de lutte contre les violences faites aux femmes, le 24 novembre 2011.
La ministre des Solidarités Roselyne Bachelot lance la troisième campagne de lutte contre les violences faites aux femmes, le 24 novembre 2011. — C. PERNOT / 20 MINUTES

 Avec cette nouvelle campagne, voulez vous inciter les 2,5 millions de femmes victimes de violences chaque année qui se taisent, à parler ?
 Avec cette nouvelle campagne, voulez-vous inciter les 2,5 millions de femmes victimes de violences chaque année à parler?

C’est exactement cela. Car chaque année, seules 650.000 femmes  portent plainte ou déposent une main courante pour les violences  qu’elles subissent. Elles ne représentent que 20% des victimes. Et  sachant qu’une femme sur dix subira des violences dans sa vie, il est  indispensable d’oser en parler.

Ces campagnes sont-elles efficaces?

Oui, car à chaque nouvelle campagne, on constate un doublement des  appels sur le 3919, numéro destiné aux victimes de violences conjugales.  On est passé ainsi de 60 000 appels en 2009, à 100 000 en 2010. En  2011, nous estimons que nous allons dépasser les 150 000 appels. Il faut  d’ailleurs rappeler que ce numéro est gratuit depuisun poste fixe et  qu’il n’apparaît pas sur les factures, ce qui garantit la  confidentialité vis-à-vis du conjoint.

Beaucoup de témoignages font état de la difficulté de porter plainte, comment aider les victimes à sauter le pas?

C’est pour cela que plan interministériel 2011-2013 prévoit la  création de référents violence dans chaque département, chargés  d’accueillir les femmes dans les commissariats et d’assurer la  coordination des différents acteurs (associations, médecins…).  Actuellement, 43 ont déjà été déployés. Le plan triennal prévoit aussi  un effort de formation sur ce sujet en direction des policiers, des  gendarmes et des magistrats.

Les associations déplorent un déficit de centres d’accueils spécifiques. Quels sont vos projets dans ce domaine?

Le plan triennal prévoit une augmentation de 30% des crédits pour la  lutte contre la violence faites aux femmes. Cela va permettre de donner  davantage de moyens aux associations pour créer des places d’accueil.

En avril, vous aviez annoncé la création d’un centre d’accueil de jour par département. Où en est-on?

Il existe déjà des lieux d’écoute et de conseils pour aider les  femmes à préparer leur départ du domicile. Ils sont pour l’heure mal  connus. C’est pour cela, qu’à l’horizon 2013, chaque département  disposera d’un accueil de jour labellisé. Nous allons aussi mettre en  place des lieux de visite familiales entre les parents auteurs de  violences et leurs enfants, dans tous les départements qui n’en  disposaient pas.

La loi de juillet 2010 prévoit une ordonnance de protection des  victimes permettant de les soustraire en urgence à leur conjoint en  évinçant celui-ci du domicile. Or, elle est très inégalement appliquée…

C’est la raison pour laquelle nous allons avec Michel Mercier, garde des Sceaux, engager un important travail d’information auprès des magistrats.

Le bracelet électronique chargé de tenir à distance les conjoints violents sera-t-il expérimenté dès 2012?

Il sera testé sur les auteurs de violences graves ou de tentatives de  meurtres sur leur conjointe, condamnés à au moins 5 ans de prison. Je  vous annonce d’ailleurs, qu’il sera expérimenté à Amiens, Strasbourg et Aix-en-Provence. Et si le test est concluant, nous le généraliserons.