Béziers: La professeur qui a tenté de s'immoler devrait s'en sortir, le lycée va rouvrir
FAITS-DIVERS Enseignants et élèves sont toujours sous le choc...
Une professeur de mathématiques, présentée comme très fragile psychologiquement, était dans un état grave après avoir tenté de s'immoler par le feu jeudi matin dans la cour du lycée Jean-Moulin de Béziers, un geste qui a profondément choqué enseignants et élèves.
Vendredi, le lycée devait rouvrir ses portes. Enseignants et élèves pourront être accueillis par la cellule de soutien, mise en place immédiatement après les faits et qui a déjà pris en charge quelque 80 élèves jeudi après-midi. Elle «restera active aussi longtemps que nécessaire», a promis le ministre. Selon le procureur de la République à Béziers, Patrick Mathé, la professeur «devrait s'en sortir», son pronostic vital n'étant plus engagé, grâce à l'intervention rapide des lycéens devant qui elle a accompli son geste, puis des secours.
«Je fais ça pour vous»
Cette femme de 44 ans, brûlée au troisième degré, donnait des cours depuis 10 ans dans ce grand établissement de 3.000 élèves et 280 enseignants - deuxième cité scolaire du Languedoc-Roussillon - situé aux abords du centre-ville, dans un quartier tranquille. Selon plusieurs témoins, elle a annulé le cours qu'elle devait donner entre 9h et 10h. Puis, peu avant la récréation, elle s'est placée sous le préau et s'est s'aspergée d'essence très calmement avant d'y mettre le feu.
«Je l'ai vue arriver le corps en feu, les mains sur la tête en avançant. A plusieurs on a essayé de l'éteindre. Elle disait: "non, laissez-moi, j'ai pas besoin d'aide". Les profs ont mis un drap sur elle, ses habits avaient fondu», a raconté Karim, qui a assisté à la scène. «Je fais ça pour vous», aurait-elle lancé, d'après plusieurs élèves qui affichaient jeudi à la mi-journée un visage blême. «Les gens pleuraient, criaient, couraient partout. On s'est approché, beaucoup de jeunes faisaient des malaises», relataient Camille et Priscillia, arrivées juste après le drame.
«C'est l'acte de quelqu'un de désespéré»
Le ministre de l'Education nationale Luc Chatel s'est rendu jeudi après-midi au CHU de Montpellier, où elle a été transportée par hélicoptère. «Le temps ce soir est au recueillement, à l'émotion (...). Ensuite l'enquête déterminera le détail de la situation et ce qui a pu la pousser à un geste désespéré comme celui-ci», a par la suite déclaré Luc Chatel lors d'un bref point presse à la sous-préfecture de Béziers.
«C'est une professeur qui est en situation de grande fragilité. Elle était suivie par nos équipes et bénéficiait d'un accompagnement pédagogique et médical. Cela avait d'ailleurs entraîné une décharge (horaire) en début d'année à sa demande», a-t-il ajouté. «C'est l'acte de quelqu'un de désespéré», avait affirmé un peu plus tôt Patrick Mathé, évoquant une «tentative de suicide en lien avec l'activité professionnelle» de l'enseignante.
«Un état de fragilité qui fait que la pression ambiante était trop forte»
D'après des parents d'élèves, cette femme, qui enseignait dans la filière d'enseignement général du lycée, avait fait une dépression nerveuse et était en conflit avec certains élèves, qui la trouvaient trop sévère et contestaient ses méthodes. Très affectée par le décès de son neveu l'an dernier, elle «était dans un état de fragilité qui fait que la pression ambiante était trop forte», a souligné, sous couvert de l'anonymat, un de ses collègues, qui s'est dit «très abattu et triste».
>> Suicide par immolation: «Du désespoir, de la révolte, et le désir de la rendre visible». Notre décryptage par ici.
«L'acte qu'elle a commis, l'heure, l'endroit et la façon qu'elle a choisis pour le faire, sont des marques très fortes qui nous interpellent et qui nous font prendre conscience que la population enseignante est fragilisée», a-t-il témoigné, déplorant un manque d'écoute et «une politique gouvernementale qui vise à supprimer des postes, surcharger des classes».