LGV Sud-Ouest : « Il y a un passage en force sur ce projet, il est temps d’en sortir par le haut », estime Pierre Hurmic
INTERVIEW•Alors qu’une mobilisation contre les LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax se tient en Gironde tout le week-end, « 20 Minutes » a interrogé le maire de Bordeaux Pierre Hurmic, opposant historique au projetMickaël Bosredon
L'essentiel
- Le maire de Bordeaux ne se déplacera pas ce week-end à la manifestation « non autorisée » organisée à Lerm-et-Musset, mais dit voir « la colère qui est en train de monter. »
- Il fustige le projet de LGV Sud-Ouest qui va artificialiser 4.830 hectares de terres.
- Pour l’élu écologiste, il est temps de « sortir par le haut » de ce dossier en organisant « une consultation citoyenne. »
Le collectif « LGV, non merci », rejoint par les Soulèvements de la Terre, sont réunis tout le week-end à Lerm-et-Musset, au sud de Bordeaux, pour une grande manifestation contre le projet de LGV vers le Sud-Ouest. Une opération intitulée « Freinage d’urgence contre les LGV », et qui doit permettre au mouvement de prendre une nouvelle dimension.
Plusieurs élus locaux, notamment en Gironde, sont également opposés au projet, plaidant pour une rénovation des lignes existantes. Parmi eux, le maire EELV de Bordeaux, Pierre Hurmic, est un opposant de la première heure au projet GPSO. 20 Minutes l’a interrogé.
Manifesterez-vous ce week-end avec les opposants contre le projet des LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax ?
Non, car c’est une manifestation interdite, dans ces conditions-là, je n’irai pas. Mais je vois la colère qui est en train de monter et je pense qu’il faut prendre des mesures pour y mettre un terme. Cinq sénateurs sur six de la Gironde, opposés au projet, ont demandé à ce que soit organisée une consultation citoyenne. Il faut les entendre. Il y a aussi l’appel que nous avons signé avec les maires de Bayonne et Irun, pour la rénovation des lignes existantes. Nous avons été rejoints par plus de 1.000 signataires, dont une centaine de maires. Ce sont des avertissements que les gouvernements successifs refusent d’entendre. Il y a un passage en force qui se fait autour de ce projet, il est temps d’en sortir par le haut.
Ne pensez-vous pas qu’il est trop tard pour arrêter le projet ?
Non, il n’est jamais trop tard. Le projet de Notre-Dame-des-Landes, qui était très avancé, a été arrêté, car le gouvernement a entendu qu’il n’était plus conforme aux nouvelles orientations climatiques. Je note au passage que Notre-Dame-des-Landes, c’était trois fois moins d’artificialisation que GPSO, qui porte sur 4.830 hectares de terres naturelles, agricoles et forestières qui vont disparaître.
Vous faites référence à un projet d’aéroport, alors que GPSO, c’est du ferroviaire, censé retirer des voitures et des camions de la route, et faire baisser le trafic aérien…
C’est faux. Le TGV n’est compétitif par rapport à l’avion que pour des durées de trajet inférieures à trois heures. Là, dans le meilleur des cas, ce sera 3h10 entre Toulouse et Paris. Quand le temps de trajet en train était de 3h10 entre Bordeaux et Paris, nous avions vingt navettes aériennes qui faisaient l’aller-retour. Si vous voulez faire l’aller-retour Toulouse-Paris dans la journée, vous ne prendrez pas un train qui mettra plus de trois heures, mais l’avion qui met une heure.
La LGV est également censée libérer des sillons pour développer le fret ferroviaire, ce serait une bonne chose, non ?
Le développement des lignes LGV ces vingt dernières années s’est précisément accompagné d’un recul des trains de marchandises, pour des raisons financières : l’argent que vous mettez dans les TGV, vous ne le mettez ni dans le fret ni dans les trains de proximité comme les TER.
La réalisation de ces LGV va cependant permettre la construction d’aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse, pour précisément développer les RER métropolitains et la circulation des TER…
Très bien, mais on s’arrête là, et on modernise les lignes existantes, ce qui est la priorité. Ce dossier est complètement anachronique, il date d’une époque où les impératifs climatiques n’étaient pas pris en considération comme aujourd’hui. C’était avant le zéro artificialisation nette des sols (ZAN) que l’on impose aux maires. Et le Premier ministre a en plus l’occasion d’économiser 14 milliards d’argent public…
De votre côté qu’allez-vous faire pour vous faire entendre ?
Je vais reprendre mon bâton de pèlerin pour rencontrer le nouveau gouvernement. Certes, ce projet est porté par le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et la présidente d’Occitanie, mais il faut aussi écouter les maires. Toutes les portes de sortie à ce dossier, qui est une impasse, existent.
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