« Fun » et « fédérateur », le haka fait une étonnante percée dans les entreprises
Ka Mate Alors que la Coupe du monde de rugby bat son plein, il n’y a pas que les All Blacks qui pratiquent le haka. Cette danse guerrière est de plus en plus prisée dans les entreprises à des fins de « team building »
- Pratiqué sur les terrains de rugby notamment par les All Blacks, le haka s’invite aussi dans les entreprises où la traditionnelle danse guerrière est utilisée lors de séances de team building.
- De nombreuses structures proposent cette activité, qui serait idéale pour « fédérer » les équipes, « lâcher prise », mais aussi révéler les talents.
- Mais plaquer une chorégraphie en plein milieu de la salle de réu, tout en grimaçant devant son boss, est-elle toujours chose aisée ?
« C’était impressionnant ! Tout le groupe donnait de la voix, tapait fort sur ses jambes… Avec les vibrations, c’était fort, j’ai vraiment ressenti qu’on était tous ensemble. » Si aucun match de rugby impliquant l’équipe de Nouvelle-Zélande ne commence sans le fameux haka, il n’y a pas que sur les terrains que la célèbre danse se pratique. Depuis quelques années, de plus en plus de salariés français (sûrement un peu moins tatoués) se prennent pour des All Blacks, grâce à des séances de team building qui utilisent le traditionnel chant maori.
Au lycée général professionnel et agricole de Briacé, au Landreau (Loire-Atlantique), c’est en tout cas ainsi que l’année scolaire a démarré pour les 130 personnels administratifs et enseignants de l’établissement, réunis pour l’occasion dans le grand amphithéâtre. « Le haka, c’est se donner du courage et savoir en donner, estime Domitille Maillard, adjointe de direction, encore marquée par l’expérience. Tout ce dont ont besoin les profs qui s’apprêtent à accueillir des élèves ! Nos équipes sont réparties sur deux sites donc c’était aussi un bon moyen pour les fédérer, lancer l’année tous ensemble, dans une bonne énergie. »
Lancer un projet, travailler ensemble…
Coutume qui se déclinait déjà sous différentes formes, le haka serait donc devenu au XXIe siècle un séduisant outil de management, encore plus demandé en période de coupe du monde. En témoignent les nombreuses entreprises de team building qui se sont lancées dans la mêlée. « J’interviens dans toute la France pour des séminaires, le lancement d’un nouveau projet, la fusion de deux groupes, ou tout simplement pour le fun et le lâcher prise, observe Brad Edwards, un Néo-Zélandais à la tête de Kiwi animations. Le haka s’adapte très bien à ces situations puisque en plus d’être une danse guerrière qui intimide, il est aussi utilisé pour accueillir, s’exprimer, montrer son respect ou préparer son mental. Il est d’ailleurs pratiqué partout, même dans les mariages ou les enterrements. »
Ces séances entre collègues, de 30 minutes à 1 heure, commencent en général par une petite histoire. Celle du chef maori Te Rauparaha qui, poursuivi par les membres d’une tribu ennemie, répétait Ka maté, ka maté (je meurs) caché dans son abri, avant de finalement s’en sortir, chantant alors à la vue de la lumière Ka ora, ka ora (je vis). Une fois dans l’ambiance, c’est à l’open space de transformer l’essai. « Quand c’est possible, j’aime bien faire des petits groupes pour que chacun imagine son propre haka, explique Arman Vossougui, comédien et coach chez Haka team. C’est un prétexte pour faire connaissance et apprendre à travailler ensemble. Chacun invente sa propre méthode : certains commencent par les gestes, d’autres par les paroles… » Une activité qui permettrait en plus aux personnalités de se dévoiler. « Certains mènent la danse et se révèlent de vrais leaders, note Arman Vossougui. Ça peut aider les RH à conforter certains choix. »
Si c’est juste se frapper les cuisses, « ce n’est pas intéressant »
Mais plaquer une chorégraphie en plein milieu de la salle de réu, tout en grimaçant devant son boss, est-elle toujours chose aisée ? S’il y a toujours des timides ou des réfractaires, les animateurs assurent que l’exercice en lui-même permet aisément de se lâcher, même si c’est au fond de la salle et que les gestes ne sont pas assurés. « Tout le monde bouge et chante comme un seul être, sans jugement ni hiérarchie, estime Brad Edwards. Si on vient juste pour se frapper les cuisses, sans comprendre toute la signification et le respect qu’il y a derrière, ce n’est pas intéressant. C’est plus simple de tirer la langue et d’ouvrir de grands yeux, quand on sait que c’est une façon de montrer que l’on n’a pas peur. »
Pour Domitille Maillard, c’est aussi le fait d’avoir personnalisé l’expérience, en réfléchissant en amont aux valeurs communes entre le projet d’établissement et la philosophie du haka, qui a permis de marquer des points. « J’étais inquiète de comment ça allait être perçu, mais finalement ça a hyper bien pris, se félicite l’adjointe de direction. Dès qu’il y a du sens derrière, ça passe toujours beaucoup mieux. Et tout le monde avait la banane. »