« Nous voulons proposer un choc d’offre sur le réseau ferroviaire du Grand Ouest » annonce la compagnie Le Train
INTERVIEW La directrice générale adjointe de la société Le Train, dévoile à « 20 Minutes » la stratégie de cette nouvelle compagnie ferroviaire privée, qui va se lancer dans le Grand Ouest de la France
- Le Train est une nouvelle compagnie ferroviaire française, créée en février 2020 en Charente, et basée désormais à Bordeaux.
- Elle ambitionne de lancer d’ici à fin 2025, début 2026, un réseau de trains à grande vitesse pour desservir le Grand Ouest de la France, de Bordeaux à Rennes.
- Fréquence de trains, tarifs, services… Catherine Pihan-Le Bars, directrice générale adjointe de l’entreprise, dévoile à « 20 Minutes » la stratégie de la compagnie ferroviaire.
Créé en février 2020, la compagnie ferroviaire Le Train ambitionne d’ici à fin 2025, début 2026, de desservir onze destinations de l’ouest de la France, notamment pour relier les métropoles de Bordeaux, Rennes, Nantes et Tours. .
« L’entreprise est partie du constat que la LGV Sud Europe Atlantique (SEA) était sous-utilisée, et qu’il y avait un manque de performance des dessertes sur le Grand Ouest, explique la directrice générale adjointe de l’entreprise basée à Bordeaux, Catherine Pihan-Le Bars. La façade atlantique est par ailleurs très attractive et dynamique démographiquement, c’est donc un très bon secteur pour lancer une nouvelle offre de transport. »
Trois ans après la création de la compagnie, où en êtes-vous de votre projet de faire circuler des trains à grande vitesse dans le Grand Ouest de la France ?
Le Train va offrir des liaisons grande vitesse en France, le Grand Ouest représentant la première phase de notre développement. L’idée est de proposer des liaisons entre Rennes et Bordeaux, Nantes et Bordeaux, Tours, Angoulême, avec des prolongements vers Arcachon. L’objectif est de réduire les temps de transport entre ces villes, puisque aujourd’hui ce sont des dessertes qui se font entre quatre et cinq heures en passant par Paris. Là, on va faire du Bordeaux-Nantes en moins de trois heures, du Bordeaux-Rennes en moins de 3h30. .
Vous avez réalisé une première levée de fonds de huit millions d’euros, quelle sera la prochaine étape ?
Une dernière levée de fonds va démarrer d’ici à la fin de l’année, avec des tickets à 10 millions d’euros minimum, pour un total de 45 à 55 millions d’euros à réunir. Cela servira à financer les démarches pré-opérationnelles, le montage des services, du système d’information…
Quand espérez-vous vous lancer ?
Notre démarrage est conditionné à la livraison de notre matériel roulant, qui est du matériel neuf qui sera conduit par l’industriel espagnol Talgo. Il doit être livré entre fin 2025 et début 2026. La date de démarrage est donc susceptible d’évoluer, à quelques mois près, puisque au-delà de la construction de ce matériel, il y aura aussi une phase d’homologation du matériel pour qu’il puisse circuler sur le réseau français.
Vous vous prévalez du titre de première compagnie ferroviaire privée française, or vous n’êtes pas tout seuls à vouloir vous lancer depuis l’ouverture à la concurrence ?
D’autres entreprises se lancent mais Le Train sera la première compagnie française à offrir des liaisons grande vitesse sur le marché.
Quand on parle de grande vitesse, on parle de quoi ?
On ne parle pas de TGV, qui est une marque déposée par la SNCF, mais de trains à grande vitesse, c’est-à-dire qui vont rouler entre 300 et 330 km/heure, globalement à 320 km/heure, sur les lignes à grande vitesse. Mais ils peuvent évidemment rouler également sur le réseau classique. Pour Bordeaux-Nantes par exemple, nous monterons jusqu’à Tours sur la ligne à grande vitesse SEA, à 320 km/heure, et nous débrancherons à Tours pour partir vers Nantes en passant par Angers, section qui n’est pas à grande vitesse. Mais nous allons optimiser le temps de trajet via le barreau LGV.
Il n’y aura pas de changement de train pour les voyageurs ?
Nous ne proposerons que des trajets directs. C’était très important pour nous, car toute correspondance est vue comme une zone de risque et d’inconfort pour les voyageurs. Et ce qui compte aussi, ce sont les horaires. En voiture, vous pouvez partir de Bordeaux à 6 heures du matin pour arriver à Nantes à 9 heures, aujourd’hui c’est ce qu’il manque sur cette offre, et Le Train proposera des trajets qui vont arriver avant 9 heures sur chaque bout de ligne, tous les jours.
Combien de trajets quotidiens proposerez-vous ?
Nous proposerons dès notre lancement cinq allers-retours par jour sur nos lignes, ce qui fait une cinquantaine de trains par jour. Nous voulons démarrer fort car nous sommes convaincus que c’est avec un choc d’offre qu’on attire les voyageurs sur le mode ferroviaire. Nous aurons aussi une liaison vers Arcachon, qui prolongera le bout de ligne vers Bordeaux, pour proposer aux voyageurs de Nantes ou de Rennes, de s’y rendre sans changer de train en gare de Bordeaux. Ce prolongement desservira également l’aéroport de Mérignac, via la halte de Pessac-Alouette, d’où part une navette permettant de rejoindre l’aéroport en treize minutes. Cela permettra aux personnes venant du grand ouest, de prendre un avion à Bordeaux- Mérignac, sans prendre leur voiture.
Quels tarifs allez-vous proposer ?
On proposera un Bordeaux-Nantes à 65 euros l’aller. Ce qui veut dire que nous sommes compétitifs par rapport à la voiture, si l’on prend en compte le péage et l’essence [il faut compter 67 euros pour un trajet en voiture d’un peu plus de 3 heures.] Il y aura aussi des abonnements pour les voyageurs réguliers.
Vous insistez sur les services que vous proposerez à bord. Quels seront-ils ?
On veut s’inspirer de l’aérien, par exemple avec des applications de réservation très fluides. A bord, nous aurons quarante places vélo, sans avoir besoin de démonter son vélo ou de le mettre dans une housse. Cela fait un voyageur sur dix qui pourra embarquer son vélo. C’est primordial, quand on sait qu’un des principaux freins à l’utilisation du train, c’est la façon d’accéder et de repartir de la gare. Nos trains seront conçus pour être très confortables, avec une connectivité wifi que l’on a particulièrement travaillée. Nous aurons de la restauration, avec deux espaces snack par rame et une voiture-bistro. Enfin sur le volet indemnisation et réclamation, où il y a une vraie insatisfaction des voyageurs aujourd’hui, nous proposerons des remboursements automatiques en cas de retard, en fonction d’une grille que nous dévoilerons avant notre lancement. Cela ne doit pas être au voyageur qui a subi un retard de devoir en plus dépenser de l’énergie et perdre du temps pour se faire rembourser.
Avec tous ces nouveaux opérateurs qui débarquent, il ne va pas se poser un problème de circulation des trains sur le réseau ?
Cela dépend des sections. Les opérateurs étrangers vont principalement rouler sur LGV où il n’y a pas de souci de capacité. On peut caler un train toutes les quatre minutes sur notre réseau grande vitesse, nous en sommes aujourd’hui très loin. Là où ça peut être un peu plus tendu, c’est sur les segments classiques, où on peut avoir plusieurs services ferroviaires, du TER, de l’intercité… Sur ce point nous travaillons avec les régions, et avec les autres acteurs, pour optimiser notre trafic.