Egalité femmes-hommes : La Cour des comptes critique des « avancées limitées » et des « erreurs de méthode »

Progrès « L’éducation est vraiment l’angle mort » de la lutte contre les violences conjugales notamment, estime Pierre Moscovici

20 Minutes avec AFP
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Un rapport de la Cour des comptes se penche sur la « grande cause nationale » du premier quinquennat.
Un rapport de la Cour des comptes se penche sur la « grande cause nationale » du premier quinquennat. — Retmen

« Peut mieux faire. » C’est, en substance, l’appréciation donnée par la Cour des comptes à la politique en faveur de l’égalité femmes-hommes, « grande cause nationale » du premier mandat d’Emmanuel Macron. Malgré une « mobilisation indéniable », la politique de l’exécutif sur ce thème « ne se traduit encore que par des avancées limitées », conséquence « d’erreurs de méthode », estime jeudi la Cour dans un rapport portant sur la période 2017-2022.

Désignée « grande cause nationale donc » l’égalité entre les femmes et les hommes ne bénéficie pourtant pas d’une « stratégie globale », ni d’un « pilotage efficace ». La Cour des comptes relève ainsi une « diversité » de plans stratégiques, qui n’ont pas été consolidés « en une feuille de route unique ». « L’approche par catalogue de mesures échoue à faire en sorte que cette thématique fondamentale irrigue l’ensemble des politiques publiques », a commenté lors d’une conférence de presse Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes.

Un plan plus précis

Le pilotage de cette politique a en outre été rendu « difficile » par « des lacunes dans la conception des mesures elles-mêmes » : nombre d’entre elles ne sont « pas fondées sur un diagnostic précis des situations et des besoins ». De plus, de nombreuses mesures « n’ont été assorties ni de moyens, ni de calendrier de réalisation, ni d’indicateurs de résultats, ni de cibles, ce qui rend leur évaluation impossible », déplorent les Sages de la rue Cambon.

Ils recommandent ainsi de décliner le nouveau plan interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2023-2027 en « une feuille de route mesurable et évaluable », qui précise les « moyens » alloués, les calendriers et les « cibles ». La Cour des comptes préconise également de concevoir un « programme interministériel d’évaluation des actions » menées par l’Etat et par les organismes qu’il finance.

« L’éducation est vraiment l’angle mort de cette politique »

Pour l’heure, la lutte contre les violences conjugales et pour l’égalité professionnelle, deux chantiers devenus prioritaires, n’ont « avancé que partiellement », selon la Cour des comptes. En ce qui concerne la lutte contre les violences conjugales, elle salue les avancées pour la protection des victimes (renforcement des dispositifs d’écoute et d’accompagnement, distribution de « téléphones grave danger ») et l’accompagnement des auteurs (qui peuvent être pris en charge dans des centres spécialisés, ou se voir imposer des bracelets anti-rapprochement). Elle regrette toutefois l’absence de mesures « pour faire évoluer les mentalités », comme celles relatives à la prévention axée sur l’éducation.

« L’éducation est vraiment l’angle mort de cette politique, qui s’est concentrée sur les auteurs, les victimes d’aujourd’hui sans chercher suffisamment à lutter dès la formation des esprits contre l’idée qu’on peut imposer sa volonté à son conjoint par la violence », a estimé Pierre Moscovici. En matière d'égalité au travail, les progrès dans la réduction des inégalités dans le secteur privé restent « lents, malgré un arsenal législatif croissant depuis plusieurs décennies ».