Abaya à l’école : L’association Action Droits des Musulmans saisit le Conseil d’Etat

DISCRIMINATIONS Les plaignants craignent que « cette interdiction encourage les personnels de l’Éducation nationale à exiger des élèves qu’ils divulguent leurs convictions religieuses » pour déterminer le caractère religieux ou non de leur tenue

20 Minutes avec AFP
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Une femme portant l'abaya à Mantes-la-Jolie.
Une femme portant l'abaya à Mantes-la-Jolie. — Eliot BLONDET

Pour eux, l’interdiction de l’abaya à l’école « porte atteinte aux droits de l’enfant, car elle vient viser principalement les enfants présumés musulmans, créant ainsi un risque de profilage ethnique à l’école ». L’association Action Droits des Musulmans (ADM) a saisi vendredi le Conseil d’État en urgence pour qu’il suspende la décision du nouveau ministre de l’Education, selon le recours déposé par les avocats.

Trois jours avant la rentrée scolaire, Droits des Musulmans demande au juge des référés de « suspendre la décision du 27 août 2023 » interdisant le port de cette longue robe traditionnelle dans les écoles, collèges et lycées publics, selon le recours déposé par Me William Bourdon et Vincent Brengarth. « Cette restriction de l’abaya risque encore de stigmatiser davantage les musulmans et de porter atteinte à leurs droits fondamentaux sur les plans social, culturel et éducatif », expliquent-ils dans leur recours.

« Contre-productif »

Dans la pratique, ces mesures « amèneront le personnel scolaire à cibler injustement des jeunes filles en fonction de leurs origines ethniques arabes ou africaines ». Un tel ciblage « est contre-productif et pourrait aboutir à l’exclusion de jeunes filles du système éducatif », selon le recours. Autre argument développé : les élèves concernés se verront interdire une tenue « leur permettant d’exprimer leur attachement à une culture ou à une région » géographique. « Or, une telle attitude ne porte nullement atteinte à la laïcité », ajoutent les plaignants.

L’abaya n’est pas un vêtement religieux à proprement parler car il n’existe pas en tant que tel d’habit religieux en islam, ce n’est donc pas un habit islamique. C’est ce qu’explique notamment le Conseil français du culte musulman (CFCM) dans un communiqué datant de juin dernier.

Droit au respect de la vie privée

Le référé dénonce une interdiction « formulée de manière floue et large ». Avec pour conséquence que « l’absence d’indication permettant de définir les tenues » incriminées pourrait viser des élèves souhaitant simplement porter des « vêtements amples susceptibles d’être qualifié d’abayas ou de qamis ».

Les plaignants craignent donc que « cette interdiction encourage les personnels de l’Éducation nationale à exiger des élèves qu’ils divulguent leurs convictions religieuses » pour déterminer le caractère religieux ou non de leur tenue. Ce qui constituerait « une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée des élèves ». « Cette immixtion injustifiée dans l’exercice du culte musulman est une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte », ajoute le recours.

Vendredi à Orange, Emmanuel Macron a assuré que « nous devons être intraitables » pour interdire à l’école l’abaya et le qamis, et promis que le gouvernement « ne laissera rien passer ».