Au 14e étage du Maybourne Rivera, sur la Côte d'Azur, on vient pour la vue et « les vues »

VUE D’EN HAUT (6/7) Les hauteurs de nos villes fourmillent de vie et d'activité, parfois surprenantes. A Roquebrune-Cap-Martin, près de Nice et Monaco, la plus haute terrasse de l’hôtel Maybourne Riviera culmine à 350 m au-dessus de la mer

Fabien Binacchi
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Au bar Ceto, on vient pour la vue mais aussi pour « les vues ».
Au bar Ceto, on vient pour la vue mais aussi pour « les vues ». — Fabien Binacchi / ANP
  • Ils sont peu visibles au quotidien, celui du rez-de-chaussée. Pourtant, des hommes et femmes évoluent chaque jour, pour se loger, travailler ou s’amuser, dans les hauteurs de nos villes.
  • 20 Minutes vous raconte leurs histoires en sept épisodes publiés cette semaine.
  • Aujourd’hui, zoom sur la plus haute terrasse de l’hôtel cinq-étoiles Maybourne Riviera, à Roquebrune-Cap-Martin, où une clientèle cosmopolite se presse pour profiter d’un incroyable panorama et cumuler les vues.

« Je vole, Jack. » A l’angle des larges garde-fous en verre, où la terrasse s’avance dans le vide comme la proue d’un paquebot, les selfies s’enchaînent. Et certains clients rejouent la scène. Entre Kate Winslet et Leonardo Di Caprio. « C’est notre coin Titanic », s’amuse Sébastien Rey. Le directeur du restaurant Ceto, au dernier étage de l’hôtel Maybourne Riviera, sait qu’il peut compter sur une vue « incroyable ». A 350 m au-dessus du niveau de la mer, le 14e étage de l’établissement de Roquebrune-Cap-Martin (Alpes-Maritimes) domine tout. La ville française en contrebas. L’Italie, à gauche. Monaco, sur le côté droit.


Roquebrune-Cap-Martin et Monaco en contrebas à l'est
Roquebrune-Cap-Martin et Monaco en contrebas à l'est - Fabien Binacchi / ANP

« On a un panorama à couper le souffle et sur trois pays en même temps. C’est assez unique. Par temps clair, le matin, on voit même la Corse », décrit Bastien Rémillieux, le responsable du bar éphémère, qui vient d’ouvrir pour toute la belle saison sur le pignon Est de l’établissement cinq-étoiles. Et les oiseaux de paradis en fleur dans les grandes jarres posées sur la terrasse ne sont pas là au hasard. On tutoie le ciel. Les goélands, à quelques battements d’ailes, et les avions, au loin, volent à hauteur de vue.

« Notre terrasse est très instagrammable »

Ici, on vient pour les cocktails (à 28 euros) et les tapas, en musique. On vient pour les plats de poisson maturé du restaurant étoilé de Mauro Colagreco. Mais on est (surtout ?) là pour la vue (et « les vues »). Et plutôt tirés à quatre épingles. Depuis l’inauguration, en 2021, les publications accompagnées des mots-dièses #MaybourneRiviera et #CetoBar se multiplient sur les réseaux sociaux. « Notre terrasse est très instagrammable », confirme Sébastien Rey, toujours impressionné par ce qu’il y a à voir.


Sa phobie du vide ne l’a d’ailleurs pas épargné à cette hauteur. « Il y a encore des endroits où je ne m’aventure pas trop, sourit-il, jaune. Mais ça va quand même beaucoup mieux qu’au début. Lors d’une de mes premières rencontres avec les responsables du projet, on s’était installé tout près du bord. J’avais un vertige affolant. J’ai dû maîtriser mes émotions. Mais je m’accrochais vraiment à mon siège. » Il n’est pas le seul. « L’été dernier, un couple était venu pour dîner. La dame voulait absolument manger en bordure. Son mari n’a pas pu, raconte-t-il. Il a été pris d’une crise de panique. Littéralement ».

« Une espèce de vaisseau en vol stationnaire »

Mais la plupart des visiteurs sont bien là pour ça. Pour ce frisson. iPhone en main, un homme d’une quarantaine d’années, venu avec sa femme et des amis, s’avance vers le bord. « Amazing », lâche-t-il dans un fort accent slave. Les visiteurs du Ceto viennent parfois de loin. « Ils font le déplacement exprès. Pour l’expérience. Une clientèle souvent huppée, habituée des standards des palaces, mais aussi beaucoup d’autres gens qui sont là pour essayer. Dont un tiers de locaux. »

Arnaud est domicilié dans le Var, voisin de plusieurs dizaines de kilomètres. Il n’a pas l’habitude de ce genre d’établissement. Mais « les photos vues dans un magazine [l’]avaient convaincu ». « Ce qui est fou, c’est qu’on a l’impression de flotter. D’être dans une espèce de vaisseau en vol stationnaire. On ne dirait pas qu’on repose sur quoi que ce soit », souffle-t-il, vite rassi après quelques photos.

Fixé avec 3.000 pieux de soutènement

Posé sur un éperon rocheux, en lieu et place de l’ancien Vista Palace qui avait été construit là à la moitié du siècle dernier, le Maybourne Riviera a nécessité un chantier titanesque. « Et spectaculaire. Techniquement, quand on y pense, c’est fou. Tout ou presque a été refait. Il a fallu fixer l’hôtel à la paroi, avec 3.000 pieux de soutènement pour tenir la structure dans la montagne, détaille Sébastien Rey. Parmi les chambres, toutes avec vue mer, certains sont troglodytes, creusées dans la roche. »


Une quarantaine d'employés s'activent au 14e étage de l'hôtel, au bar et au restaurant Ceto.
Une quarantaine d'employés s'activent au 14e étage de l'hôtel, au bar et au restaurant Ceto. - Fabien Binacchi / ANP

Pour la quarantaine d’employés du 14e étage, en cuisine et au service, travailler à cette hauteur a posé quelques soucis. Tout au début. Manon Chaix, qui gère la salle, se souvient. « Juste avant l’ouverture, quand les ascenseurs n’étaient pas encore en service, il avait fallu transporter tout un restaurant, du matériel de cuisine jusqu’à la vaisselle, par les escaliers. Ça nous avait bien fait les cuisses à l’époque. »

Fin de journée. Les falaises projettent leur ombre un peu partout, mais pas encore sur la terrasse du Ceto. Le soleil est battu. Du côté de Monaco, les bateaux, suivis d’une traînée, sont comme à l’arrêt. Les voitures et les grues ressemblent à des jouets. Le palais princier paraît tout petit. D’ici, on domine tout.