Nantes : « On est démunis et écœurés… » L’incontournable Ressourcerie de l’île prête à baisser le rideau
REEMPLOI La structure de réemploi, où travaillent une trentaine de personnes, a déposé une demande de redressement judiciaire
- Après 15 ans d’activité, la Ressourcerie de l’île, qui emploie une trentaine de salariés, s’apprête à fermer son grand espace de vente de 1.000 m2 à Rezé, près de Nantes.
- La direction, qui a déposé une demande de redressement judiciaire, regrette aujourd’hui « le décalage entre le soutien moral affiché et le peu d’actes concrets » de la part de Nantes métropole.
Plus que trois semaines pour y dénicher des livres, vêtements vintage, ou objets déco de seconde main. Après quasiment 15 ans d’activité, la Ressourcerie de l’île s’apprête à baisser le rideau de son grand espace de vente de 1.000 m2 à Rezé, le 25 février prochain. Après avoir fermé son comptoir de dons il y a une dizaine de jours, cet acteur du réemploi pourtant incontournable dans l’agglomération nantaise (220.000 visiteurs s’y sont bousculés l’an dernier) n’arrive plus à sortir la tête de l’eau. « Nous avons déposé une demande de redressement judiciaire en raison de l’inquiétante situation de la trésorerie, annonce ce vendredi Monique Boutrand, la présidente. Si elle n’est pas acceptée, on va vers une liquidation. On est aujourd’hui démunis et écœurés… »
Installés depuis 2010 dans un grand entrepôt vétuste voué à la démolition (en vue de la construction de la future ZAC Pirmil-les-Isles), la ressourcerie et sa trentaine de salariés savent depuis longtemps qu’ils devront déménager. Mais le prix et la rareté du foncier, surtout pour une activité associative et qui nécessite beaucoup d’espace, ont rendu la recherche de nouveaux locaux très laborieuse.
Voyant le bâtiment actuel continuer de se dégrader, la structure a finalement décidé il y a un an de « prendre le risque » de transférer une partie de ses activités (la valorisation d’objets, 650 tonnes l’an dernier) dans d’autres murs, toujours à Rezé, où la vente est cependant interdite. « Nous savions qu’ils seraient trop chers et trop grands, mais nous pensions pouvoir trouver facilement des sous-locataires, ce qui n’a pas été le cas, regrette Monique Boutrand. La situation a mis à zéro notre trésorerie. »
« Inquiète », la métropole dit « ne rien lâcher »
Mines fermées, les membres du bureau regrettent aujourd’hui « le décalage entre le soutien moral affiché et le peu d’actes concrets » de la part de Nantes métropole, qui a pourtant fait de la consommation responsable une priorité. Si l’association dit aujourd’hui puiser 85 % de son budget dans ses recettes, elle dénonce l’absence de « politique de réserve foncière » pour les acteurs de l’économie sociale et solidaire. « Les pouvoirs publics nous ont laissés nous étrangler, pense Paul Rose, le trésorier. Sans cette question du foncier, notre modèle tournait très bien. » Une pétition a été lancée et a déjà récolté quelque 7.500 signatures.
Contactée sur ce dossier qui fait beaucoup parler depuis plusieurs semaines, Mahel Coppey, vice-présidente (EELV) à l’économie circulaire à Nantes métropole, affirme « avoir toujours travaillé main dans la main » avec la ressourcerie, et rappelle que la collectivité « a pris en charge » une partie de la fameuse sous-location. Elle indique aussi ce vendredi soir qu’une « cellule de 700 m2, pas dans la zone Atout-sud mais toujours à Rezé, a été trouvée et proposée » il y a quelques jours. « Il faut qu’ils s’en saisissent car la Ressourcerie est un acteur pionnier dont l’utilité sociale a été démontrée, et qui en a inspiré beaucoup d’autres dans la métropole, estime l’élue. Je suis tout de même inquiète car la situation se dégrade vite. Nous, on ne lâche rien. »
Au même moment, Stations services, un autre acteur majeur du réemploi de la métropole a aussi annoncé la fermeture de ses boutiques, dont Grand magasin, ouvert en 2018 en centre-ville de Nantes.