Affaire Delphine Jubillar : Impulsif, fourbe, autoritaire… Ce que dévoile l’enquête de personnalité sur le mari

Enquête Selon l’enquête réalisée sur plusieurs mois, dont des pans ont été dévoilés par BFM, Cédric Jubillar aurait été marqué par les abandons successifs dans son enfance et aurait développé une personnalité manipulatrice et autoritaire

Béatrice Colin
Cédric Jubillar, ici lors d'une marche à Albi, est mis en examen depuis le 18 juin 2021 pour le meurtre de sa femme.
Cédric Jubillar, ici lors d'une marche à Albi, est mis en examen depuis le 18 juin 2021 pour le meurtre de sa femme. — F. Scheiber / AFP
  • Depuis le 18 juin 2021, Cédric Jubillar est en détention provisoire pour le meurtre de sa femme, Delphine, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 du domicile conjugal de Cagnac-les-Mines.
  • Dans le cadre de l’instruction, une enquête de personnalité a été ordonnée, dont le rapport de 35 pages vient d’être versé au dossier.
  • Cédric Jubillar y est décrit selon ses proches et connaissances à la fois comme un manipulateur, fanfaron et fourbe, mais aussi travailleur, ayant souffert d’une enfance où il a été ballotté en familles d’accueil.

Depuis le 18 juin 2021, Cédric Jubillar est mis en examen pour le meurtre de sa femme, Delphine, une infirmière de Cagnac-les-Mines disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 du domicile conjugal. Et dont le corps n’a pas été retrouvé. Dans le cadre de l’instruction, une enquête de personnalité a été ordonnée quelques jours après le placement en détention du Tarnais, qui clame son innocence.

Après des entretiens menés auprès d’une quarantaine de personnes et du principal accusé, un document de 35 pages a été rédigé et joint au dossier. Les traits de caractère du principal accusé y sont exposés et BFM a pu le consulter.

Immaturité affective, sentiment de rejet

Selon la chaîne d’informations, il y est évoqué l’enfance difficile du plaquiste, mais aussi son comportement avec sa famille, son épouse mais aussi sa façon d’être en société. Selon l’intervenante sociojudiciaire qui a réalisé l’enquête, Cédric Jubillar a souffert des placements qu’il a vécus au cours de son enfance et qui « ont pu être vécus par Cédric Jubillar comme des répétitions à rejet d’une part, d’injustice d’autre part », relève l’enquêtrice.



« Entre 0 et 18 ans, il a eu deux ou trois familles d’accueil, il a été un peu déplacé comme un paquet de linge sale. L’immaturité, notamment affective en lien avec son enfance, c’est quelque chose que les experts psychiatriques avaient déjà souligné, sans relever de trait de perversité. La conclusion de l’enquêtrice, qui fait l’analyse de tout ce qu’elle a recueilli, c’est aussi un peu ça. Il est décrit comme fanfaronnant et c’est un gars qui durant longtemps a cherché à avoir une place, de l’amour et qui a pas mal souffert du rejet qui était le sien », reconnaît Me Emmanuelle Franck, une des trois avocats de Cédric Jubillar.

Et ce besoin de reconnaissance passe aussi par un rabaissement de sa femme en public afin de capter la lumière sur lui, simple plaquiste quand sa femme est infirmière et gagne bien mieux sa vie que lui. « Il l’a toujours reconnu et dit que c’est sa façon d’être », relève son avocate. La volonté de Delphine de le quitter aurait aussi été très mal vécue à l’été 2020, « déjà repéré comme réfractaire aux ruptures amoureuses qu’il a subies alors qu’il était adolescent », cite BFM.

Incompétent ou travailleur, c’est selon

Mais ce ne sont pas les seuls traits de caractère qui ressortent, certains le décrivent comme un manipulateur, « fourbe », impulsif et infidèle. Mais aussi autoritaire, notamment avec son fils Louis sur qui il aurait fait un transfert, ne lui laissant rien passer, sans pour autant lui faire subir les violences dont lui-même aurait été victime dans son enfance.

« L’enquête n’est pas tranchée, il y a des gens qui ne vont pas pouvoir le blairer et dire les pires horreurs. Et puis il y a la famille d’accueil qui va décrire quel adolescent il était, qu’il ne supportait pas l’autorité, fumait du cannabis mais dans le fond était gentil. Il y a de tout. Des gens concèdent qu’il était très travailleur, d’autres qu’il était incompétent comme plaquiste et que c’est pour cela qu’il n’avait pas de CDI », raconte Me Franck.

Une chose est sûre, ils sont nombreux à avoir voulu « apporter leur pierre » à cette enquête de personnalité. Celle qui l’a menée a indiqué dans son rapport que lorsqu’elle fixait un entretien à une connaissance de Cédric Jubillar, il n’était pas rare que lorsqu’elle arrivait sur place elle trouve cinq personnes présentes qui avaient quelque chose à dire.

Ce passage au crible de la vie du principal accusé, ses réactions au fil des années, viendra éclairer les jurés si le Tarnais de 35 ans est renvoyé définitivement devant les Assises. Ce qui ne devrait pas arriver avant l’automne prochain. Si la reconstitution, l’un des derniers actes d’enquête a eu lieu en décembre dernier, les trois avocats avaient aussi fait des demandes d’acte. Rejetées, elles devraient être audiencées en appel d’ici le mois de février.

Un rapport d’enquête sur les activités Internet au Wi-Fi de la maison, via lequel l’infirmière se connectait pour accéder à ses réseaux sociaux via son téléphone jamais retrouvé, est aussi attendu.

Les deux juges d’instruction devront ensuite clôturer le dossier et rédiger leur ordonnance de mise en accusation, dont les avocats du principal suspect devraient faire appel. Cédric Jubillar ne devrait pas se retrouver à la barre de la cour d’assises avant l’été 2024.