Alcool, météo, suicide… Ces clichés qui collent à la peau des Bretons et de la Bretagne

FAKE NEWS Rédactrice en chef adjointe du magazine « Bretons », la journaliste Maiwenn Raynaudon-Kerzerho démonte dans un ouvrage les clichés agaçants et autres idées reçues sur la Bretagne et ses habitants

Jérôme Gicquel
A chaque fois qu'il est de sortie, le Breton aime exhiber son drapeau.
A chaque fois qu'il est de sortie, le Breton aime exhiber son drapeau. — L. Venance / AFP
  • La journaliste Maiwenn Raynaudon-Kerzerho démonte dans un livre les clichés et idées reçues sur la Bretagne et les Bretons.
  • On y apprend notamment que les Bretons ne sont pas ceux qui boivent le plus fréquemment de l’alcool même s’ils ont une tendance plus marquée à l’ivresse.
  • Il ne pleut pas non plus tous les jours en Bretagne, Bordeaux et Biarritz enregistrant par exemple plus de jours de pluie par an que Rennes.

Les Bretons ont beau être les gens les plus sympas sur Terre (on exagère à peine), ils trimballent quand même un bon paquet de clichés plus ou moins reluisants. Selon la légende, ils seraient tous alcooliques, ploucs, chauvins ou bornés. Vantée pour la beauté de ses paysages, leur région en prend aussi régulièrement pour son grade. Outre une météo pourrie, la Bretagne serait ainsi la région la plus touchée par le suicide et une terre uniquement peuplée de pêcheurs et de paysans parlant un patois.

Autant de clichés dont les Bretons ont appris à s’amuser au fil du temps, en revendiquant même certains avec fierté. Née à Nantes, la journaliste bretonne Maiwenn Raynaudon-Kerzerho a tout de même voulu mettre les points sur les « i » en balayant dans un ouvrage, sorti en fin d’année « toutes ces idées reçues d’un autre temps et qui ne correspondent plus à rien. » Rédactrice en chef adjointe du magazine Bretons, elle démonte pour 20 Minutes certains clichés toujours vivaces.

La Bretagne n’est pas la région où l’on boit le plus

Comme dit le dicton : « En Bretagne, on n’a pas de montagne mais on a une bonne descente. » En matière d’alcool, les Bretons sont en effet connus pour ne pas mettre à côté. Un penchant pour la boisson qui ne date pas d’hier. « Il y a toujours eu une tradition d’alcool festif en Bretagne où l’ivresse n’est pas taboue, souligne Maiwenn Raynaudon-Kerzerho. Dans les pardons au XVIIIe siècle, les gens se mettaient déjà la tête à l’envers. » Ce goût prononcé pour la biture ne fait pas pour autant des Bretons des alcooliques. Ces derniers ne sont d’ailleurs pas les plus gros buveurs en France. En tout cas pas au quotidien. Selon une étude de Santé publique France, 10,7 % des Bretons boivent de l’alcool chaque jour, un chiffre légèrement supérieur à la moyenne nationale mais inférieure à d’autres régions comme l’Occitanie ou la Nouvelle-Aquitaine.

Quand vient le week-end en revanche, les Bretons aiment se lâcher. Selon les mêmes données de Santé publique France, ils sont les « champions » pour les fortes alcoolisations ponctuelles (six verres ou plus). En résumé, la Bretagne n’est pas donc la région où l’on boit le plus fréquemment en France. Mais quand ils le font, les Bretons ne font pas les choses à moitié.

Le taux de suicide n’y serait pas plus élevé qu’ailleurs

Le sujet est sensible. Avec un taux de suicide de 21,6 cas pour 100.000 habitants, la Bretagne aurait le taux le plus élevé de France. Des chiffres que la journaliste préfère prendre avec des pincettes. « Il y a trop de disparités entre les régions dans les données qui sont remontées dans les certificats de décès, souligne-t-elle. La comparaison entre territoires n’a donc aucun sens. » Pour expliquer ce fléau, certains ont tenté de faire le lien avec la météo morose, l’alcool ou la plus forte proportion d’agriculteurs.

Beaucoup d’indices vont pourtant à l’encontre de ce sentiment présumé de mal-être dans la région. Ils tendent même à prouver que la Bretagne est un endroit où il fait plutôt bon vivre. Maiwenn Raynaudon-Kerzerho évoque notamment « le taux de chômage, qui est le plus bas de France, ou les inégalités de revenus qui sont moindres qu’ailleurs ». « On peut aussi citer la vie sociale et culturelle qui y est très riche avec un nombre record de festivals, le tissu associatif qui y est très fort ou le fait que les Bretons sont ceux qui donnent le plus leur sang, poursuit-elle. Tout ceci donne l’image d’une région simple, apaisée et généreuse, ce qui va plutôt à l’encontre des chiffres sur le taux de suicide dont la véracité pose question. »

Non, il ne pleut pas tous les jours en Bretagne

Parfois capricieuse, la météo bretonne a longtemps été l’objet de moqueries. Mais à l’heure du réchauffement climatique, ces blagues ne font plus rire grand monde. Alors que les épisodes caniculaires se multiplient, la Bretagne fait même figure d’eldorado et pourrait devenir à terme un refuge pour les réfugiés climatiques. « Cela a d’ailleurs déjà commencé, assure Maiwenn Raynaudon-Kerzerho. Des gens viennent déjà s’installer en Bretagne car il fait moins chaud. »



Si l’on s’attarde sur les données météorologiques, on constate également que la Bretagne n’est pas la région où il pleut le plus. « On a tendance à oublier que la Bretagne, c’est une multitude de climats, souligne la journaliste. Celui de Brest n’a rien à voir avec celui de Vannes par exemple. » Avec 156 jours de pluie par an, Brest décroche en effet la palme de la ville la plus arrosée de France. A l’inverse, Rennes n’enregistre que 116 jours de pluie par an en moyenne, ce qui est un peu plus que Toulouse (100 jours de pluie) et moins qu’à Bordeaux (128 jours) et à Biarritz (144 jours).

En quantité, il pleut également moins d’eau à Rennes (676 millimètres) ou Saint-Brieuc (738) qu’à Nice (803). « Il ne pleut donc pas tout le temps en Bretagne mais il ne faut pas le dire trop fort non plus », sourit la journaliste.