Quand l’inflation permet de lutter contre le gaspillage alimentaire

ALIMENTATION Face à l’augmentation des prix, plusieurs communes françaises ont décidé de réduire les portions servies dans les cantines scolaires. Une mesure qui limite la hausse des coûts et réduit les quantités d’aliments jetés

Mikaël Libert
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Une cantine scolaire à Strasbourg (illustration).
Une cantine scolaire à Strasbourg (illustration). — G. VARELA / 20 MINUTES
  • Avec l’inflation, le prix de revient des repas dans les cantines a fortement augmenté ces derniers mois.
  • Pour réduire la facture, certaines mairies ont décidé de modifier les menus servis aux enfants.
  • Une mesure qui permet par ailleurs de lutter contre le gaspillage alimentaire.

Ne jeter ni l’argent, ni la nourriture par les fenêtres. L’inflation extraordinairement élevée que subit la France ces derniers mois induit un serrage de ceinture généralisé qui n’a rien de réjouissant, tant pour les particuliers que pour les collectivités. Chacun cherche des solutions à son échelle pour économiser des bouts de chandelle. Des solutions qui mettent parfois à jour des aberrations dont on se souciait peu avant. C’est ainsi que plusieurs villes françaises, font d'une pierre deux coups contre l’inflation et le gaspillage alimentaire.

Pour faire face à l’augmentation de leurs charges de fonctionnement, les collectivités, notamment les mairies, ont la possibilité d’actionner le levier de l’impôt. Une option que les élus rechignent cependant à mettre en œuvre pour ne pas pénaliser des ménages déjà en souffrance. Alors, il leur faut trouver des ficelles à tirer pour économiser sur tous les plans, y compris sur les repas servis aux enfants dans les cantines scolaires. A Hazebrouck, dans le Nord, les prix des fournisseurs ont augmenté de 10 à 15 % ces derniers mois. A Caudebec-lès-Elbeuf, en Seine-Maritime, la hausse du budget cantines était de 30.000 euros au printemps dernier. « Dans une année normale, on aurait pu l’absorber, mais avec 800.000 euros d’augmentation de l’énergie, ce n’était pas possible », reconnaît Laurent Bonnaterre, le maire.

Réduire les portions ou augmenter les prix

A Hazebrouck, la ville a décidé, en novembre dernier, de réduire les menus servis aux enfants des écoles. Une initiative que Caudebec-lès-Elbeuf avait déjà prise quelques mois plus tôt : « En comité de pilotage, avec les parents d’élèves, on a présenté deux solutions : réduire les composantes des menus des cantines ou augmenter le prix », explique le maire normand. La première solution a fait l’unanimité selon lui.



Les menus sont ainsi passés de 5 à 4 composantes, faisant sauter d’un jour à l’autre l’entrée ou le dessert. « On n’affame pas les enfants, les quantités restent les mêmes. C’est le fait de jouer sur le choix qui fait baisser les prix de notre prestataire », affirme Laurent Bonnaterre. Et en bossant sur le sujet, une donnée a sauté aux yeux des élus : le gaspillage alimentaire. « Rien que pour les cantines, on jetait environ 14 tonnes de nourriture par an, 21 kg par enfant. C’est énorme pour une petite ville comme la nôtre », déplore l’élu.

« Moins de nourriture termine à la poubelle »

Cela fait donc quatre mois que les enfants de Caudebec-lès-Elbeuf sont soumis à ce nouveau régime et les retours semblent plutôt positifs. « On n’a pas encore de données arrêtées, déclare le maire, mais le personnel des cantines nous confirme que beaucoup moins de nourriture termine à la poubelle. » En matière de finances, cette mesure a permis de « contenir la hausse » à 6.000 euros au lieu des 30.000 euros chiffrés.

Si la réduction des menus des cantines a pu faire couler de l’encre et pleuvoir les critiques, elle ne peut néanmoins pas être faite n’importe comment. Parce que, de toute façon, la composition des repas est encadrée, réglementée et normée par l’Education nationale. Le bulletin officiel du ministère prévoit d’ailleurs des repas à 4 ou 5 composantes dont le grammage varie en fonction des aliments. Ainsi, la ville de Toulouse avait déjà diminué les rations servies dès la rentrée 2021, passant de 5 à 4 composants et de 450 à 350 g. A l’époque, l’inflation n’était pas la raison invoquée, l’idée étant de réduire le gaspillage alimentaire. Le résultat avait néanmoins fait réagit Agathe Roby, une élue LFI de l’opposition municipale, qui dénonçait des « assiettes ridicules » et l’absence récurrente de féculents. « Rien de tel chez nous, se félicite le maire normand. Les parents nous ont même soutenus devant les caméras. »