Noël : La boule en verre, objet d’art et star incontestée du sapin
Hotte stuffs (2/5) « 20 Minutes » vous accompagne durant les fêtes de fin d’année avec sa série « Hotte Stuffs » pour vous donner des infos, certes, mais surtout vous faire passer un moment au chaud et rigolo
- Comme chaque année, la rédaction de 20 Minutes vous accompagne durant les fêtes de décembre. Et comme chaque année on court après les incontournables de la table et de la déco. En 2022, on vous en révèle un peu plus sur les rois de la fiesta.
- Du 23 au 25 décembre, retrouvez les dessous des « Hotte Stuffs », ces stars de Noël ou du Nouvel an. Autrement dit, le sapin, la boule de Noël, le papier cadeau, la bûche et, enfin, l’iconique orange. Le tout illustré par notre journaliste, reine des crayons, Diane Regny.
- Dans ce deuxième épisode, la boule de Noël prend la parole. Objet d’art indémodable, fruit du savoir-faire ancestral des souffleurs de verre, elle reste « la reine du sapin » et de nombreux amoureux des traditions n’hésitent pas à débourser des sommes conséquentes pour augmenter leur collection, année après année.
Je suis une pomme. Ou plutôt, j’étais une pomme. Mais cela fait bien longtemps que je ne suis plus comestible. Je suis apparue sous ma forme actuelle au milieu du XIXe siècle, mais on ne sait pas bien où, l’Allemagne et la Lorraine se disputant ma paternité. Mais au fond, qu’importe ma nationalité, car ce qui est indiscutable, c’est que je suis l’œuvre d’artisans verriers.
Depuis j’ai pris d’autres formes, j’ai été moulée dans d’autres matières, comme le plastique, le papier mâché, ou encore la porcelaine. Si les jouets sont distribués par milliers dans la chanson de Tino Rossi, moi, on me vend par millions. Selon un sondage Yougov de novembre 2019, 41 % des Français ajoutent des éléments tous les ans à leur décoration de Noël et 8 % la renouvellent intégralement. Et n’imaginez pas que parce que c’est la crise, on ne me sacrifie sur l’autel des économies. Noël, c’est sacré et le budget que les Français consacrent à mon achat a même augmenté de 2 euros par rapport à l’année dernière.
Classique, indémodable, iconique
Parmi toutes les décorations disponibles sur le marché, quelle est celle que préfèrent les clients ? Moi ! Je suis « la star du sapin », confirme Marie-Claire Gollentz, directrice de Féérie de Noël à Riquewihr (Alsace), le seul magasin de France 100 % dédié à Noël ouvert toute l’année. Dans cette boutique, « l’affluence commence dès juillet et août et ne fait que se renforcer jusqu’à la fin de l’année », accueillant jusqu’à 3.000 clients par jour pendant l’Avent. « C’est la forme ronde classique en verre de couleur rouge qui se vend le mieux », précise Marie-Claire Gollentz. Et pourtant, les clients ont le choix, parmi les 26.000 références du magasin. Mais que voulez-vous, le classique est indémodable.
Iconique, même. Certes, mes cousines chinoises en plastique et bon marché ravissent les petits budgets et les parents des jeunes enfants dont les mains indélicates s’approchent un peu trop près du sapin. Mais pour les vrais amoureux de Noël et de ses traditions, le verre, à défaut d’être incassable, est irremplaçable.
Elles représentent tout ce qu’on célèbre à Noël : la lumière et la vie au coeur de la nuit, l’espoir de revoir le printemps
Et pour cela, mon meilleur ambassadeur est sans doute Didier Oeuvray. Ce Suisse, propriétaire de la brocante Oethel et Cie à Porrentruy, me collectionne depuis une quarantaine d’années et en possède aujourd’hui des milliers comme moi, dont les plus anciennes datent des années 1880. « Plus elles sont vieilles, plus elles ont du charme. Leurs reflets sont incomparables, patinés par le temps. Elles représentent tout ce qu’on célèbre à Noël : la lumière et la vie au cœur de la nuit, l’espoir de revoir le printemps. »
Un savoir-faire unique
Je dois mon éclat aux gestes ancestraux des souffleurs de verre. En Lorraine, le Centre International d’art verrier de Meisenthal a fait renaître ce savoir-faire près de trente ans après la fermeture de l’usine, en 1969. Chauffé à plus de 1.000 degrés dans un four, le verre en fusion est soufflé à la canne par des bouches expertes. Cela me rend plus épaisse, et donc plus solide que lorsque je suis façonnée en verre filé, c’est-à-dire du verre chauffé à la flamme d’un chalumeau, puis travaillé et soufflé à travers un tube en verre. Mes reflets miroiteux viennent de la couche d’argenture sur ma face interne. Quant à ma face externe, elle est peinte, ou non.
Depuis 1998, donc, je retrouve mes couleurs d’antan dans les Vosges du Nord, pour la plus grande joie des clients, qui ont dévalisé les 70.000 pièces produites l’an dernier, dont les 3.500 exemplaires de leur création annuelle, vendue 24 euros pièce. Chez Féérie de Noël, mes camarades les plus chères « valent autour d’une quinzaine d’euros », détaille Marie-Claire Gollentz. L’immense majorité des références provient d’Europe de l’Est, tout comme une bonne partie de la collection de Didier Oeuvray. Car c’est en réalité là-bas que je suis majoritairement produite, et notamment en Tchécoslovaquie. Un savoir-faire tellement unique, que même « pendant la guerre froide, le pays, bien que sous domination soviétique, continuait à exporter ses décorations vers les Etats-Unis, raconte Didier Oeuvray. On en cachait juste la provenance. »
Objet précieux que l’on expose fièrement un mois dans l’année, je dois être accrochée avec soin pour ne pas glisser lorsque les branches de votre sapin commenceront à sécher et s’incliner vers le bas. Et pour cela, Marie-Claire Gollentz a une astuce : « Il faut une ficelle pas trop longue. On passe la branche dans la ficelle, on entortille le haut de la ficelle et on l’enroule autour de la branche. » Parce que me retrouver brisée en mille morceaux, c’est vraiment les boules (de Noël).