Pénurie de carburant : Bras de fer engagé par la CGT contre le gouvernement et les réquisitions dans les raffineries
tensions Le syndicat s’apprête à organiser une journée de grève interprofessionnelle mardi
Le ton se durcit chez la CGT. Face aux réquisitions dégainées par le gouvernement pour contrer la grève dans l’industrie pétrolière, le syndicat parie sur une extension du mouvement en faveur des hausses salariales et s’apprête à organiser une journée de grève interprofessionnelle mardi, en dépit du mécontentement d’une partie de l’opinion.
Les salariés du site Esso-ExxonMobil de Gravenchon-Port-Jérôme (Seine-Maritime) ont ainsi reconduit jeudi après-midi le mouvement. Même décision chez les salariés de TotalEnergies, a annoncé la CGT. Par ailleurs, selon Céline Verzeletti, secrétaire confédérale du syndicat, « un appel à une journée nationale de grève pour le 18 octobre va être diffusé dans la journée ». Le texte devrait être publié à l’issue d’une rencontre intersyndicale en fin d’après-midi, à laquelle doivent participer la CGT, FO, Solidaires, la FSU et l’Unsa.
Anticipant cette annonce, la FNME-CGT (énergie) a fait savoir jeudi matin qu’elle « impulsera et coordonnera la grève nationale interprofessionnelle à l’appel de la CGT, le mardi 18 octobre ». La CGT-cheminots avait de longue date prévu de manifester à Paris mardi. La fonction publique et l’agroalimentaire pourraient aussi joindre leurs forces à celles des raffineurs.
Vers une convergence des luttes ?
Signe des convergences à venir ? Mercredi soir, un rassemblement a réuni sur le parvis de l’Hôtel de Ville des militants CGT, FO, Solidaires et de nombreux responsables politiques de gauche dont Jean-Luc Mélenchon. « Le fait de réquisitionner, ça a mis le feu aux poudres », a accusé le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez sur BFMTV jeudi matin. Ça a été un « détonateur », corrobore Simon Duteil de Solidaires.
Interrogé mercredi soir sur France 2, le président de la République a répété que l’État n’hésiterait pas à utiliser cette arme des réquisitions pour permettre la distribution de carburants. Menace mise à exécution jeudi dans un dépôt pétrolier TotalEnergies situé près de Dunkerque, après le dépôt Esso-ExxonMobil de Notre-Dame-de-Gravenchon mercredi.
Interrogé jeudi matin sur France Inter, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a condamné ces réquisitions, qui nourrissent selon lui une « escalade » dans le conflit. La CFDT ne se joindra pour autant pas aux manifestants mardi. « L’appel à la grève, ça change quoi à la fin ? Ça ne change rien », a-t-il déclaré. La CFDT et la CFTC avaient déjà pris leurs distances avec le mouvement dans les raffineries ce week-end, se désolidarisant des grèves chez TotalEnergies, qualifiées de « préventives ».
Une opinion publique qui peut basculer
« On va accélérer notre processus de mobilisation », dit Céline Verzeletti. De nombreux militants syndicaux seront comme elle présents à la manifestation « contre la vie chère » organisée par la Nupes dimanche, avant peut-être l’organisation d’une journée commune des partis de gauche et des syndicats, plus tard.
La CGT ne craint-elle pas avec ces grèves et manifestations de se mettre à dos les Français, pour beaucoup excédés des difficultés à faire le plein ? « Bien sûr que quand on fait une heure de queue à la station-service on est énervé. Mais la question du partage des richesses est dans la tête de tout le monde », répond Céline Verzeletti.
Selon un sondage Elabe pour BFMTV, une courte majorité de Français approuvent la mobilisation des salariés de TotalEnergies et ExxonMobil (42 % approuvent, 40 % désapprouvent, 18 % y sont indifférents). Pour le politologue Dominique Andolfatto, la CGT « sait qu’elle clive ». Mais elle « fait sans doute le calcul que c’est plutôt positif pour elle », notamment « vis-à-vis de sa base et des soutiens ».