Rentrée des classes 2022 : L’enseignement privé lui aussi touché par la crise de recrutement des profs ?
EDUCATION Même l’enseignement catholique a eu du mal à mettre « un professeur devant chaque classe » à la rentrée, comme le souhaitait Pap Ndiaye
- La pénurie de professeurs dans certaines disciplines affecte aussi l’enseignement catholique.
- Pour assurer la rentrée, les chefs d’établissements ont recruté des suppléants, les équivalents des contractuels dans le public.
- Mais les recruter est une gageure, notamment car ils sont moins bien payés dans le privé que dans le public.
Les parents qui ont inscrit leurs enfants dans le privé cette année, en pensant qu’ils n’auraient jamais de trous dans leurs emplois du temps, risquent d’être déçus. Car l’enseignement catholique n’est pas épargné par la crise des vocations enseignantes. « Si en ce début d’année, nous avons presque réussi à mettre un professeur devant chaque élève, la question des remplacements va rapidement se poser », a reconnu ce jeudi Philippe Delorme, le secrétaire général de l’Enseignement catholique, lors de sa conférence de presse de rentrée.
« Nous avons eu quelques remontées de trous dans les emplois du temps. Mais les problèmes ont été vite résolus. On reste cependant inquiet sur la capacité qu’auront les établissements à remplacer les profs en arrêts maladies dans les prochains mois », abonde Gilles Demarquet, président de l’Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (Apel).
Les suppléants appelés en renfort
Car si plus de 4.000 postes d’enseignants, sur un total de 27.332, n’ont pas été pourvus lors des concours 2022 de l’enseignement public, le problème se pose aussi pour ceux de l’enseignement privé : « Dans le premier degré, 800 postes n’ont pas été pourvus (soit 1,6 %), et 2.800 dans le second (soit 3,1 %) », indique Yann Diraison, adjoint au secrétaire général de l’enseignement catholique. « Comme dans le public, ce sont surtout les maths, l’anglais, l’allemand, les lettres classiques, les SVT et la physique-chimie qui posent problème. Et les académies de Créteil et Versailles sont les plus touchées », précise Philippe Delorme.
Pour faire face à ce manque de profs, l’enseignement catholique sous contrat fait appel à des suppléants, l’équivalent des profs contractuels dans le public. Un recours qui ne semble pas poser problème aux parents d’élèves : « Bien souvent, ils ne connaissent pas le statut des enseignants. Par ailleurs, les suppléants, dont beaucoup ont travaillé dans d’autres secteurs auparavant, apportent une expérience différente aux élèves », estime Gilles Demarquet.
Le public paye mieux ses contractuels
Mais pas évident de les recruter sachant qu’un prof vacataire est mieux payé dans le public que dans le privé : « Le différentiel s’est réduit ces dernières années, mais il est encore de l’ordre de 300 à 400 euros bruts par mois », constate Yann Diraison. Les suppléants démarrent donc à environ 1.500 euros bruts pour un plein-temps. Et ces nouvelles recrues sont d’autant plus difficiles à trouver qu’après les confinements, certains suppléants ont quitté les grandes villes pour s’installer en province.
Pour attirer les candidats, l’enseignement catholique a lancé en mars dernier une grande campagne de communication nationale intitulée « Je deviens enseignant, pourquoi pas vous ? ». « Des flyers ont été distribués, des vidéos ont été diffusées sur les réseaux sociaux, et les directeurs diocésains se sont mobilisés pour prêcher la bonne parole et organiser des réunions d’information. Et certains parents d’élèves qui réfléchissaient à une reconversion nous ont entendus », explique Nathalie Tretiakow, adjointe au secrétaire général de l’enseignement catholique.
L’accompagnement humain
Le privé mise aussi sur le bon accueil des suppléants pour susciter des vocations. A la différence du public, dans le privé, ce sont les chefs d’établissement qui constituent leur équipe. « Ils s’efforcent de recruter des personnes qui sauront travailler collectivement et soutenir le projet d’établissement », observe Gilles Demarquet. Le fait que le chef d’établissement soit le recruteur joue aussi sur la qualité de l’accompagnement des nouveaux embauchés, selon Philippe Delorme : « Ils prennent le temps avec les suppléants, font en sorte qu’ils soient parrainés, les rencontrent régulièrement pour voir si tout se passe bien et les incitent à passer les concours internes ».
Mais comme dans le public, les suppléants bénéficient d’une formation minimaliste de quelques jours, dans les meilleurs cas, avant d’être propulsés en classe. Ils se forment donc sur le tas. Ce qui ne réussit pas à toutes les nouvelles recrues…