Chantage à la sextape à Saint-Etienne : Le maire Gaël Perdriau doit-il démissionner ?

POLITIQUE Soupçonné d’être impliqué dans une affaire de chantage à la sextape, le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau a été auditionné mardi en garde à vue

Caroline Girardon
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Gaël Perdriau, le maire LR de Saint-Etienne.
Gaël Perdriau, le maire LR de Saint-Etienne. — Jean-Philippe KSIAZEK
  • Auditionné pendant près de 5 heures mardi, Gaël Perdriau est ressorti libre, sans être mis en examen à ce stade de l’enquête.
  • Le maire de Saint-Etienne et président de la métropole stéphanoise est soupçonné d’être impliqué dans une affaire de chantage à la sextape.
  • Doit-il démissionner pour autant ? Députés LR et élus de l’opposition demandent désormais qu’il se mette en retrait de ses fonctons politiques.

« Des méthodes ignobles. » Au lendemain des dernières révélations de Médiapart, le parti des Républicains a lancé une procédure d’exclusion à l’encontre de Gaël Perdriau, le maire de Saint-Etienne soupçonné d’être impliqué dans une affaire de chantage à la sextape. Mardi, l’élu a été placé en garde à vue dans les locaux de la PJ de Lyon afin d’être entendu. Il en est ressorti au bout de cinq heures sans être mis en examen, ni soumis à un contrôle judiciaire à ce stade de l’enquête.

« S’il revient à la justice de se prononcer sur la culpabilité et le degré d’implication de Gaël Perdriau, les méthodes utilisées pour éliminer un rival politique sont indignes d’un élu de la République », tranche Annie Genevard, présidente des Républicains, au sein desquels le maire stéphanois n’est désormais plus le bienvenu. 

« Ces citations sont condamnables en tout point », abonde François Massardier, président des Stéphanois de Paris, qui s'interroge néanmois sur l'impact d'une éviction au sein des LR. « Gaël Perdriau n’est pas forcément extrêmement impliqué dans les instances nationales du parti. Il ne s’entend pas très bien avec les responsables locaux, il entretient des relations fraîches avec Laurent Wauquiez. Il n’a jamais vraiment eu besoin du soutien des Républicains pour tenir la ville », analyse-t-il. 

Conversations accablantes

La question est désormais de savoir si l’élu peut encore rester à la tête de la mairie et de la métropole. Les élus de la majorité se sont bien gardés de répondre à la question, même s’ils condamnent « avec la plus grande fermeté les propos tenus » et diffusés lundi soir par Médiapart. Les conversations en question s’avèrent accablantes pour l’élu et son directeur de cabinet Pierre Gauttieri. Elles ont été enregistrées par la victime du chantage Gilles Artigues, ancien premier adjoint, qui a été filmé à son insu lors d’une rencontre avec un escort-boy, en 2014.

« J’ai une vidéo vous montrant le cul à l’air avec un mec. Ça ne vous dérange pas ? Le très catholique député Gilles Artigues très bon père de famille dans un truc comme ça ? », lance alors le chef de cabinet dans un enregistrement audio datant de juillet 2018. Face à son interlocuteur, l’homme revendique n’avoir « aucune foi ni loi », assume de « fonctionner comme un criminel » et le menace d’envoyer la vidéo à ses enfants. Perdriau, lui, le met en garde : si l’élu venait à porter plainte, la vidéo pourrait être diffusée « en petits cercles, par parcimonie » ou sur Internet. Ce qui le briserait immédiatement « Une fois que c’est sur les réseaux, ce n’est plus du chantage, c’est une exécution », l’avertit le maire.

« Méthodes de collabos »

Des propos qui ont « choqué » Dino Cinieri, député Les Républicains de la Loire. Avec les trois autres parlementaires LR du département, il a cosigné un texte exigeant de Gaël Perdriau qu’il « se mette immédiatement en retrait » de ses fonctions politiques. « Je suis écœuré, furieux, confie-t-il. Gaël Perdriau rêvait d’être candidat à la présidentielle, il espérait devenir ministre. Aujourd’hui, il n’est que grandeur et décadence. » Fidèle soutien de Gilles Artigues qu’il qualifie de « belle personne » et de « loyal », le député ligérien « hurle de colère ». Déplore des méthodes dignes des « collabos ». « Rendez vous compte de la méchanceté, de la lâcheté, de la bassesse. Ces propos, ces manipulations sont inacceptables. Perdriau et son équipe de barbouzes ne méritent plus d’être à la tête de la mairie et de la métropole de Saint-Etienne », assène-t-il.

« Sur le plan juridique, rien ne justifie sa mise en retrait », nuance de son côté François Massardier qui juge néanmoins « l’affaire surprenante » ainsi que « les méthodes employées ». « La défense de Gaël Perdriau vole en éclat, jour après jour. La confiance en sa parole est parfaitement rompue, tout comme celle placée dans son directeur de cabinet qui assume ses méthodes de criminel », estime Pierrick Courbon, élu du groupe d’opposition Saint-Etienne Demain. Lui aussi, attend que le maire et l’ensemble des protagonistes suspectés se mettent en retrait.

« Indépendamment de l’enquête judiciaire, la situation politique est intenable, argumente-t-il. Cela permettrait d’assurer avec sérénité la continuité du travail mené à la mairie et à la métropole, juge-t-il. Aujourd’hui, les réunions sont annulées en cascade, les rendez-vous ne se tiennent pas. Il faut des interlocuteurs disponibles, pleinement mobilisés. Or, on n’avance plus. On ne peut dès lors pas continuer comme ça. »