En immersion dans un centre d’éducation de chiens guides d’aveugles
ANIMAUX L’association Les chiens guides d’aveugles de Provence Côte d’Azur Corse, dont le siège est à Nice, permet depuis plus de 50 ans « d’améliorer l’autonomie et la mobilité des personnes non voyantes et malvoyantes »
- L’association Les chiens guides d’aveugles de Nice fait partie des treize écoles référencées en France.
- Depuis sa création, elle a remis gratuitement 635 chiens à des personnes souffrant de déficience visuelle.
- Ce samedi aura lieu la journée portes ouvertes, une manière pour les éducatrices du centre, de donner davantage d’informations sur leur métier et sur les chiens guides.
À l’occasion de la fête des chiens guides d’aveugles et la journée portes ouvertes, 20 Minutes a pu visiter le centre de Nice. Cette matinée-là est un peu spéciale pour Catherine. Elle va rencontrer pour la première fois, lors d’un « repas de remise », la famille d’accueil qui a appris la propreté, l’obéissance et la socialisation à Pop, sa future chienne guide.
« Ma vue a commencé à vraiment baisser ces deux dernières années, raconte cette dame de 63 ans. J’ai alors demandé à l’association Les chiens guides d’aveugle de Provence Côte d’Azur Corse d’avoir une aide afin d’être plus autonome, de ne plus avoir peur de sortir de chez moi et de pouvoir me déplacer en confiance dans la rue. »
« Ma vie va complètement changer »
Depuis la création de ce centre d’éducation en 1966, dont le siège est à Nice, plus de 635 chiens ont été remis gratuitement à des personnes souffrant de déficience visuelle. Pour Pop, un labrador couleur sable, et Catherine, « ça a été comme un coup de foudre ». « Je l’attendais vraiment, je ne pensais plus qu’à elle depuis que je l’ai rencontrée en juillet. Ma vie va complètement changer », résume-t-elle, très émue.
Philippe et Pascale, la fameuse famille d’accueil, ont également les yeux humides. « C’est très difficile de s’en séparer », lâchent-ils simplement en regardant la chienne près de sa nouvelle maîtresse. Ils l’ont reçue chez eux alors qu’elle n’avait que deux mois.
Trois mois plus tard, Pop a fait « sa première rentrée scolaire » et passait une semaine par mois au centre d’éducation pour s’habituer aux lieux publics. « Au début, les chiens restent beaucoup avec la famille car le but est d’avoir un super animal de compagnie, une sorte de chien des dessins animés, image Audrey, éducatrice au centre de Nice depuis six ans. Les chiens guides d’aveugle sont des chiens de compagnie à 80 % de leur temps, ils "travaillent" seulement pour les déplacements. »
Le chien doit passer son « bac » d’abord
Pour Catherine, originaire de Haute-Savoie et récemment installée dans le Var, il faut tout réapprendre avec Pop, notamment, « les ordres ». « Droite, gauche, en avant », pendant une heure, accompagnée de Julia, une autre éducatrice, elles ont toutes les trois travaillé les trajets en ville en traversant des voies de tram, contourné des obstacles.
« Pour cette équipe [comprendre le chien et la personne souffrant de déficience visuelle], il y a eu une fusion depuis le début, s’exclame l’éducatrice. Je ne peux pas vraiment décrire, ce n’est pas palpable mais ça s’est directement senti ». Mais chaque chien a ses caractéristiques qui vont convenir à un ou une bénéficiaire. « La personne qui court des marathons et celle qui est retraitée n’aura pas les mêmes besoins de déplacements », précise la professionnelle.
C’est aux alentours des deux ans, après l’obtention d’un « bac » , que les chiens sont remis aux bénéficiaires. Leur carrière sera de huit à dix ans maximum avant de partir à la retraite. A ce moment-là, ils sont adoptés, le plus souvent par la famille d’accueil. La personne malvoyante ou non voyant a, quant à elle, un autre chien qui lui est remis.
Ne pas caresser les chiens guides sans le demander
Comme chaque année, le dernier week-end de septembre est consacré à des journées portes ouvertes pour les treize « écoles » de l’association, à l’occasion de « la fête des chiens guides ». Dans la région, ce sera à la délégation de Lançon, dans les Bouches-du-Rhône. Une façon pour les éducatrices de faire connaître leur métier au « grand public ». A commencer par la différence avec un centre de dressage : « On parle d’école et de centre d’éducation parce que le chien doit aussi pouvoir nous désobéir s’il a analysé un danger », souligne Audrey.
« Si vous croisez une équipe, il faut interpeller la personne qui est au bout de la laisse pour savoir si c’est ok de caresser le chien, pointe Julia. Il peut être en plein travail, c’est donc une question de sécurité. Un bruit, une distraction par une papouille, ça peut être dangereux. Vous ne lanceriez pas un ballon à un chauffeur de bus ? C’est pareil, le chien est le moyen de déplacement d’une personne souffrant de déficience visuelle. » Et Audrey complète : « On sait aussi que le chien est trop beau mais il faut éviter d’invisibiliser la personne. Et d’un autre côté, on voit aussi que ça permet de casser les clichés. Les gens ne vont pas forcément se rendre compte tout de suite que la personne souffre d’une déficience visuelle et le lien va se créer plus facilement qu’avec une canne qui, avec le geste qui l’accompagne, chasse ce qui l’entoure. Le tout est de penser qu’on est en face d’une équipe. »
Elle conclut : « Et pour les personnes non voyantes ou malvoyantes, sachez qu’on ne peut pas vous refuser l’accès d’un lieu public avec votre chien guide. Mais n’oubliez pas non plus qu’il n’est ni un GPS ni un super-héros, même après des années de vie commune, continuez de lui parler. »