Incendies en Gironde : La traque des derniers « points chauds » par les pompiers, « phase la plus ingrate mais essentielle »

REPORTAGE Si le feu de Landiras qui a ravagé plus de 20.000 hectares de forêt aux mois de juillet et août en Gironde, est aujourd’hui maîtrisé, il n’est toujours pas éteint, en raison de nombreux points chauds que pompiers et militaires continuent de traquer

Mickaël Bosredon
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Les pompiers doivent continuer à traiter les points chauds après l'incendie dans la forêt d'Hostens
Les pompiers doivent continuer à traiter les points chauds après l'incendie dans la forêt d'Hostens — Mickaël Bosredon/20 Minutes
  • De la tourbe parfois incandescente continue de représenter un danger de reprise de feu, dans le sous-sol de la forêt autour de Landiras, en Gironde.
  • Quelque 300 pompiers et militaires sont encore mobilisés pour traquer et noyer ces points chauds.
  • Pour y parvenir tous les moyens sont bons, notamment les drones qui donnent une vue aérienne et générale avant un traitement plus chirurgical au sol.

Les murs de flamme au cœur de l’été, ont fait place à un tapis de cendres. Depuis que le feu dit de Landiras, en Gironde, a été déclaré fixé le 14 août, puis maîtrisé le 25 août, les équipes de sapeurs-pompiers, soutenues par des unités de la Sécurité civile encadrant des militaires, sont entrées dans une nouvelle phase, celle du traitement des lisières de forêt et des « points chauds » qui se trouvent en sous-sol.

« C’est la phase la plus ingrate de l’opération, et pourtant elle est absolument essentielle, car le feu de Landiras n’est pas complètement éteint, insiste le commandant des sapeurs-pompiers de la Gironde, Matthieu Jomain. Nous avons encore 300 personnels, pompiers et militaires, mobilisés, même si nous allégeons progressivement ce dispositif, au regard de l’évolution de la situation et des conditions climatiques, qui deviennent petit à petit plus propices que ce que l’on a connu au cœur de l’été. »

Le spectacle de désolation donne une idée de la puissance du feu

Il fait pourtant encore 34°C dans l’air ce mercredi 31 août, quand nous accompagnons une équipe de sapeurs-pompiers au cœur de la forêt entre Hostens et Saint-Magne, ravagée durant la reprise du feu de Landiras le 9 août dernier. Végétation calcinée, odeur de brûlé, couche de cendres sur plusieurs dizaines de centimètres au sol… Les conditions de travail des soldats du feu et des militaires intégrés restent pénibles, et le spectacle de désolation donne une idée de la puissance du feu, qui a détruit en tout plus de 20.000 hectares sur ce périmètre de Landiras, en juillet puis en août.

La forêt a été ravagée par l'incendie de Landiras
La forêt a été ravagée par l'incendie de Landiras - Mickaël Bosredon/20 Minutes

« A certains endroits, nous avons une couche au sol d’environ 80 cm qui a entièrement brûlé, puis une autre couche de 80 cm de tourbe qui reste incandescente, et parfois de la lignite [minerai proche du charbon] qui favorise la circulation du feu souterrain », explique l’adjudant-chef François, conseiller technique à l’unité d’instruction et d’intervention de la Sécurité civile 7 de Brignoles (Var). Il encadre des sections militaires intégrées, qui ont été formées durant deux jours et équipées par la Sécurité civile et les pompiers, pour aider au traitement de ces points chauds.

Les camions prennent le relais des drones

C’est cette couche de tourbe incandescente que pompiers et militaires traquent sans relâche. Car c’est de là que le feu peut repartir à tout moment. Mélange de racines et de déchets végétaux qui se sont accumulés au fil du temps, la tourbe est extrêmement présente dans le sous-sol de cette forêt des Landes de Gascogne. Il s’agit d’une matière très inflammable pouvant propager le feu en souterrain.

Pour détecter les points chauds, tous les moyens sont bons, comme les drones des pompiers de la Gironde, utilisés pour la première fois sur un feu de grande ampleur, depuis mercredi. « Les drones permettent de survoler les zones incendiées et identifier les points chauds, explique le capitaine Adrien. Quand ils sont repérés, on envoie des camions, avec des coordonnées précises. »

Râteau, tractopelle et bulldozer pour « ouvrir les points chauds »

« On fait intervenir le drone au petit matin, au moment où le sol est encore frais de la nuit, ce qui permet de mieux détecter les points chauds à l’écran, complète le capitaine Isner. L’idée est de donner une vision aérienne, prioriser les premiers points chauds, pour ensuite envoyer dessus les personnels au sol, en particulier les unités de la Sécurité civile qui vont aller travailler en profondeur pour aller chercher ces points chauds. »

« On ouvre les points chauds avec l’aide de râteaux, ou de tractopelles et de bulldozers pour couvrir des zones plus grandes, ajoute l’adjudant-chef François, et ensuite on noie le feu à l’aide de bâches à eau ou de camions à grosse citerne. Le noyage du feu reste la technique la plus sûre, même si c’est très consommateur en eau puisqu’on peut aller jusqu’à 2.500 litres par minute ». C’est à ce prix que l’ensemble de ces points chauds, mesurés jusqu’à 600°C par une caméra thermique, pourra être durablement traité.

Camion-citerne traitant un point chaud en forêt d'Hostens (Gironde)
Camion-citerne traitant un point chaud en forêt d'Hostens (Gironde) - Mickaël Bosredon/20 Minutes

Dans l’attente des pluies automnales

Et si de premiers sylviculteurs ont été autorisés à pénétrer dans la forêt ces derniers jours, pour commencer à récupérer la ressource exploitable, le gros du travail de nettoyage et d’élagage, ne pourra véritablement démarrer que lorsque la forêt sera considérée sans danger, ce qui est loin d’être le cas d’aujourd’hui.

« Les pluies qui sont tombées récemment restent relativement faibles, et seule la couche superficielle a été mouillée, elles n’ont pas été suffisamment pénétrantes pour travailler à cœur ces couches moyennes et profondes, explique le capitaine Isner. Il suffit que les conditions météo redeviennent défavorables pour que les couches superficielles sèchent à nouveau, et qu’un point chaud résurgent déclenche un nouveau départ de feu. C’est pourquoi nous sommes vraiment en attente des pluies automnales. » Un dispositif d’intervention restera basé à Hostens jusque-là.