Coronavirus : Gare à ces propos tronqués de Bill Gates sur la « dépopulation par la vaccination forcée »

FAKE OFF Une citation mal interprétée de Bill Gates, prononcée en 2010, donne lieu, une décennie plus tard, à une intox sur la vaccination

A.O.
Le milliardaire Bill Gates en 2019 (illustration).
Le milliardaire Bill Gates en 2019 (illustration). — CHINE NOUVELLE/SIPA
  • Bill Gates, figure honnie et récurrente des rumeurs complotistes, fait de nouveau l'objet d'une intox liée à la vaccination.
  • La une d'un journal de 2011 est aujourd'hui utilisée comme preuve que le milliardaire aurait ouvertement affiché son intention de réduire la population mondiale de 10 à 15 % grâce à la vaccination.
  • Certains propos tenus en 2010 par Bill Gates lors d'une conférence sur la réduction de carbone sont ainsi détournés et mal interprétés, puisqu'il faisait en réalité référence à une réduction de la croissance démographique.

Bill Gates n’en finit plus d’effrayer les internautes opposés à la  vaccination, qu’elle porte sur le  Covid-19 ou d’autres maladies. Le milliardaire américain, qui fait l’objet  d'innombrables rumeurs complotistes sur  les thématiques de santé depuis des années, a ainsi été ciblé, ces derniers jours, par un tweet viral qui le renverrait à une affirmation vieille d’une décennie.

« Une dame a soigneusement conservé et protégé sous un plastique transparent un journal un peu jauni datant de 2011 où Bill Gates […] fait les gros titres et la une de "Sovereign IndépendanT" », affirme le message, illustré d’une photo montrant une femme brandir le journal en question, sur lequel figurent une photo de Bill Gates et le titre « Dépopulation par la vaccination forcée : la solution zéro carbone ».


« Non, vous n’hallucinez pas ! Il est écrit noir sur blanc et à côté du visage souriant de Bill Gates que la dépopulation au travers d’une vaccination forcée est la solution Zéro Carbone ! Le message est à la fois clair et prophétique, vous ne trouvez pas ? », poursuit ce texte aux accents alarmistes. Quitte à prêter au milliardaire des propos tronqués, en s’appuyant sur une source douteuse.

FAKE OFF

La quatrième édition du Sovereign Independent, un journal irlandais relayant des théories complotistes sur des sujets variés (du  11-Septembre à la  mort de Ben Laden), a bien été publiée en juin 2011 : une version numérique de ce numéro reste   toujours consultable en ligne, comme l’indiquaient récemment  nos confrères de l'AFP Factuel.

En page 10, l’article consacré à Bill Gates précise l’origine de son prétendu projet de dépeuplement via la vaccination : « Lors d’une intervention à une conférence TED, en février 2010, Gates a sous-entendu que les vaccins jouaient un rôle dans la réduction de la population. Il soutient [par ailleurs] de nombreux programmes de vaccination. »

Or, si Bill Gates s’est bien exprimé sur ce sujet lors de cette conférence consacrée à la réduction de carbone, un simple visionnage de son intervention permet de constater que ses propos étaient d’une teneur bien différente.

Une diminution du taux de croissance démographique de 10 à 15 %, et pas de la population

A compter de 4’31, il évoque ainsi les quatre facteurs à l’origine de l’émission de CO2, dont « le nombre de personnes ». Il ajoute ensuite : « Le monde compte aujourd’hui 6,8 milliards de personnes. On devrait atteindre 9 milliards. Si nous faisons un très bon travail sur les nouveaux vaccins, la santé et la santé reproductive, on pourrait réduire cela de peut-être 10 ou 15 %, mais on gardera un taux de croissance [démographique] d’environ 1,3 ».

Si cette citation est reprise dans le Sovereign Independent et interprétée comme une volonté affichée de réduire la population, Bill Gates faisait en réalité référence à un infléchissement du taux de croissance démographique de 10 ou 15 %.

Ce pourcentage ne concernait donc pas une réduction de la population mondiale, d’autant que le millardaire vantait dans la foulée les mérites de la vaccination dans la réduction des émissions de CO2, puisqu’elle permet, selon lui, de réduire la mortalité infantile et donc d’inciter certaines familles à avoir moins d’enfants.