Coronavirus : Hausse des hospitalisations en Martinique et en Guadeloupe, où la couverture vaccinale reste faible
EPIDEMIE Les Antilles sont frappées par une vague épidémique de coronavirus très virulente en raison d’une très faible couverture vaccinale
- Hausse des contaminations et des hospitalisations : la Martinique et la Guadeloupe subissent de plein fouet une forte vague épidémique de Covid-19.
- En cause, la faible couverture vaccinale sur les deux îles, où une partie de la population reste réticente face au vaccin.
- Pour le gouvernement, l’urgence est désormais d’accélérer la campagne vaccinale dans ces territoires ultramarins.
Moins d’un adulte sur cinq vacciné en Martinique. Des contaminations et des hospitalisations qui grimpent en flèche sur l’île et en Guadeloupe voisine. Aux Antilles, où sévit une quatrième vague épidémique particulièrement virulente de coronavirus, la situation sanitaire se dégrade, alors que la campagne de vaccination anti-Covid peine à décoller.
Pour le gouvernement, la course contre la montre est lancée pour déjouer les réticences locales et accélérer la campagne de vaccination anti-Covid.
Taux d’incidence et hospitalisations en hausse
Si en France métropolitaine, les taux d’incidence les plus élevés observés la semaine dernière étaient en Corse (630 cas pour 100.000 habitants, -4 %), en Provence-Alpes-Côte d’Azur (590, +3 %) et en Occitanie (413, -2 %), en Outre-mer, « le taux d’incidence était très élevé et atteignait 1.893 [cas] pour 100.000 [personnes] (+116 %) en Guadeloupe et 1.181 (+8 %) », où « la situation est très préoccupante en Guadeloupe et en Martinique », souligne Santé publique France dans son bulletin épidémiologique publié ce jeudi. Soit deux fois plus que dans les régions métropolitaines où le virus circule le plus activement.
Conséquence : le retentissement hospitalier de cette quatrième vague épidémique se poursuit, avec « des taux hebdomadaires de nouvelles hospitalisations et admissions en soins critiques en augmentation en Guadeloupe. Les taux les plus élevés étaient enregistrés en Martinique et en Guadeloupe », loin devant la Guyane et La Réunion, poursuit l’agence sanitaire, qui observe en outre une « mortalité liée au Covid-19 élevée en Martinique ». « Les patients sont jeunes, très jeunes. Aux urgences, ils ont 40-50 ans. En réanimation, ils peuvent avoir 20 ans ou 30 ans », a souligné le ministre de la Santé Olivier Véran lors d’un point presse avec son collègue des Outre-mer Sébastien Lecornu, à l’issue d’une visite du CHU de Fort-de-France.
« La situation sanitaire est sans commune mesure avec ce que nous avons pu voir au cours des vagues précédentes et notamment en métropole », a ajouté Olivier Véran. Cette semaine, 274 soignants de métropole se sont envolés vers les Antilles pour prêter main fortes dans les hôpitaux en tension.
Réticences face à la vaccination
Car cette vague épidémique qui frappe les Antilles déferle avec une virulence particulière. En cause, les réticences d’une partie de la population face à la vaccination. A 74 ans, Edwige Dupuy, n’est « pour le moment pas vaccinée ». « Je ne suis pas contre le vaccin, mais je trouve qu’on n’a pas assez de recul », explique cette retraitée qui vit au Diamant, qui préfère encore « attendre un peu ». Et comme elle, beaucoup de Martiniquais préfèrent « attendre la version 2 du vaccin », et « ne pas vouloir jouer à la roulette russe ».
Jeannette Coton-Pelagie, 63 ans, la sœur d’Edwige, est quant à elle vaccinée, mais elle justifie les réticences de certains par l’affaire du chlordécone, pesticide longtemps utilisé dans les bananeraies des Antilles, considéré comme perturbateur endocrinien et classé cancérogène probable par l’OMS. « Le président Emmanuel Macron nous a précisé que le chlordécone n’avait pas été nocif sur le sol antillais [lors de son déplacement aux Antilles en septembre 2018]. Mais quand on voit la quantité de patients atteints de troubles de la prostate, on a l’impression que la République nous ment », dit-elle. « Maintenant on dit que le vaccin peut nous aider à lutter contre le Covid, mais comment voulez-vous qu’on ne soit pas méfiant ? »
« La population se sentait immunisée » par « son insularité »
Des hésitations partagées aussi par les élus locaux. « La question de la vaccination se pose encore. Je crois que véritablement dans les Outre-mer ce sera quelque chose de compliqué », estime le maire de la commune du Diamant, Hugues Toussay, qui n’est lui non plus pas vacciné, mais « va peut-être évoluer dans [sa] réflexion ». Outre « des mois de lutte avec l’Etat concernant le chlordécone », pour l’édile, domine aussi le sentiment que les populations antillaises ont connu un décalage de l’épidémie dans le temps par rapport à l’Hexagone. « La population se sentait immunisée, protégée » par son « insularité », estime-t-il, déplorant également l’influence délétère « des réseaux sociaux » sur l’opinion.
Joyce Thelam, jeune homme de 33 ans, préfère ainsi les « remèdes efficaces » traditionnels, estimant que le vaccin « ne sert à rien », dans une rhétorique reprenant certaines théories complotistes véhiculées par les réseaux sociaux. « Regardez Jacob Desvarieux [le fondateur du groupe Kassav], il avait reçu trois doses de vaccin et il est décédé du Covid », cite-t-il en exemple. Un cas pourtant très particulier, puisque le chanteur, greffé d’un rein, avait un système immunitaire extrêmement faible en raison du traitement immunosuppresseur qu’il prenait, rendant le vaccin moins efficace.
Accélérer la campagne vaccinale aux Antilles
Alors, pour éviter une vague épidémique totalement hors de contrôle, le gouvernement fait tout pour accélérer la campagne vaccinale aux Antilles. « La vague de covid qui frappe les Antilles est la conséquence d’une vaccination trop faible. Elle fait des milliers de malades, des dizaines de morts par jour et met en tension le système sanitaire », a martelé le ministre de la Santé sur Twitter.
Pour l’heure, à peine 18 % de la population martiniquaise est entièrement vaccinée, soit moins d’un adulte sur cinq. Et en Guadeloupe, seuls 31,3 % des plus de 18 ans ont reçu leur première dose de vaccin, selon les chiffres de l’ARS de l’île. « L’hôpital est rempli de malades qui avaient peur du vaccin au lieu d’avoir peur du virus. C’est insupportable, parce que c’est évitable », a déploré Olivier Véran. Pourtant, « il y a ici des vaccins pour tout le monde, les mêmes qu’en métropole. Efficaces, sûrs, ils sauvent des vies partout, en quantité », a-t-il ajouté à l’adresse des plus réticents au vaccin, jugeant qu’il n’y avait « pas d’explication rationnelle » au retard de vaccination aux Antilles. « La vaccination ça a plus d’un siècle, c’est la prévention par excellence », a-t-il insisté.