Coronavirus en Nouvelle-Aquitaine : L’approvisionnement en gel hydroalcoolique assuré par la solidarité

EPIDEMIE En Dordogne, des vignerons sont venus à la rescousse de l'entreprise Bouchillou Alkya et l'ont approvisionnée en glycérine

Marion Pignot
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Un centre de fabrication de solution hydroalcoolique pour les professionnels dans une pharmacie parisienne.
Un centre de fabrication de solution hydroalcoolique pour les professionnels dans une pharmacie parisienne. — ROMUALD MEIGNEUX/SIPA
  • La préfète de Nouvelle-Aquitaine a annoncé, ce lundi, qu’un marché avait été passé avec une entreprise girondine pour la fourniture de dix tonnes de gel hydroalcoolique.
  • Dans le même temps, en Dordogne, les entreprises locales se serrent les coudes pour approvisionner tout le département, voire l’Est de la Gironde.
  • Les initiaves essaiment dans toute la région, si bien que la Nouvelle-Aquitaine ne devrait pas manquer de solution hydroalcoolique jusqu’à la fin de la crise de Covid-19.

Il venait à manquer, mais l’approvisionnement est désormais assuré. La Nouvelle-Aquitaine, le département de la Gironde en tête, ne devrait plus craindre de manquer de gel hydroalcoolique. Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, la Préfecture ou la Région s’organisent pour relayer les initiatives ou mobiliser le savoir-faire afin que les professionnels de santé et autres salariés en « première ligne » puissent avoir de quoi se désinfecter les mains. La chaîne de solidarité a fonctionné. Exemples en Gironde et en Dordogne.

« Il n’y a plus de politique, on revêt le gilet bleu blanc rouge et on fonce »

« J’ai 56 ans je ne pensais jamais voir ça de ma vie, mais là il n’y a plus de politique, on revêt le gilet bleu blanc rouge et on fonce ». Xavier Hien est le directeur commercial de l'entreprise Ciron, à Barsac. C’est elle qui arrive en renfort cette semaine et arrose la Gironde de solution hydroalcoolique, « qui élimine l’ennemi exactement comme le gel ». En pleine explosion de l’épidémie, Ciron SA, dénaturateur agréé de 26 salariés, a très vite su qu’elle allait pouvoir mettre la main à la pâte et « participer à l’effort de guerre ». L’entreprise a alors contacté le sous-préfet de la ville de Langon et a été « rapidement entendue ».

La Préfecture de la Nouvelle-Aquitaine a fait le reste, soit lever des obstacles administratifs avec la participation des douanes pour l’alcool et de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) pour les autorisations. « Les règles ont été assouplies pour toutes les entreprises capables de produire du gel et pour faciliter la mise sur le marché », a expliqué à 20 Minutes Martin Gespereau, préfet délégué pour la défense et la sécurité.

Résultat dix tonnes de solution hydroalcoolique vont être produites, « au fur et à mesure de l’arrivée d’éthanol par camion-citerne de 30.000 litres ». La centrale nucléaire de Braud (Haute-Gironde), ce samedi, ou Enedis sont déjà venus se servir. Pour le reste, dix points d’approvisionnement sont répartis en Gironde pour « alimenter » principalement les pharmacies, et non les particuliers. « On se serait arrêtés dans tous les cas et là, les gars sont super contents de servir la nation », précise Xavier Hien, avant d’assurer qu’il y a « les quatre matières premières en stock pour deux semaines de production » et de quoi « couvrir le temps que devrait durer la crise ».

« Tenter d’être plus rapides que le Covid-19 »

Pareil à Bergerac, en Dordogne. Où une « petite entente entre entreprises voisines » est devenue une chouette chaîne de solidarité permettant d’approvisionner tout le département en gel hydroalcoolique. L’expert en peintures industrielles Bouchillou Alkya avait de l’éthanol dénaturé pour fabriquer la précieuse solution, mais pas les autres matières recommandées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Sollicitée par une conseillère municipale, l’entreprise a été « propulsée dans un autre domaine d’activité ». « Quand on vous demande 50 litres de gel pour un Ehpad vous n’avez pas le droit de dire "non". Dans dix jours il y aura du gel hydroalcoolique partout en Dordogne, grâce à une énorme mobilisation », explique le directeur général Fabien Marche, qui croule sous les demandes de gel et les offres de collaborations.

Car la conseillère municipale a lancé un appel à tous les fournisseurs susceptibles d’approvisionner Bouchillou, notamment en glycérine et en eau oxygénée. Un appel relayé sur les réseaux sociaux par la Région nouvelle-Aquitaine, dès vendredi matin. Les caves coopératives de Sigoulès (glycérine), les entreprises Eurenco ou Hydro Sud ont rapidement répondu présentes. Et le soir même, à 18 heures, plus de 600 kilos de gel partaient vers les Ehpad ou les hôpitaux de Dordogne, voire ceux de Saint-Foy-la-Grande, en Gironde. Le lendemain 1.200 litres approvisionnaient « les Uber, les pompes funèbres, les maisons d’arrêt, les livreurs de pizzas ». Quelque 3.000 litres devraient suivre cette semaine.

Depuis, le « gel des combattants » est distribué gratuitement aux professionnels de santé devant l’entreprise. « Plus de 80 institutions sont venues d’approvisionner. Nous avons même ouvert samedi pour satisfaire le besoin et tenter d’être plus rapides que le Covid-19, précise Fabien Marche. Quand on voit des médecins généralistes, des infirmières libérales ou des aides-soignants repartir avec leurs bocaux de confiture, leurs bidons ou leurs bouteilles de jus d’orange pleines de gel on se dit qu’on sert vraiment à quelque chose. »