Comment mieux contrôler les antécédents judiciaires des personnes qui encadrent les mineurs ?

JUSTICE C’est l’une des recommandations du Défenseur des droits dans son rapport annuel sur les droits de l’enfant

Delphine Bancaud
Illustration d'une enfant en détresse
Illustration d'une enfant en détresse — Pixabay
  • « Les enfants sont encore trop souvent victimes d’actes violents ou de harcèlement, commis par des professionnels ou par des pairs », a souligné ce lundi le Défenseur des droits, Jacques Toubon, en présentant son rapport annuel sur les droits de l’enfant.
  • Il recommande que soit rendue obligatoire la consultation du bulletin n°2 du casier judiciaire et du Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) avant tout recrutement de professionnels ou de bénévoles devant intervenir auprès de mineurs.
  • Car même si ces vérifications sont déjà possibles aujourd’hui, elles ne sont pas systématiques, notamment dans le cas de recrutements effectués dans l’urgence.

Plusieurs cas d’animateurs de centres aérés suspectés d’agressions sexuelles sur enfants, un directeur d’école de Villefontaine (Isère) mis en examen pour des viols perpétrés sur ses élèves… Ces dernières années, plusieurs faits divers sordides ont souligné la vulnérabilité des enfants accueillis dans des établissements scolaires, sociaux ou médico-sociaux.

« Les enfants sont encore trop souvent victimes d’actes violents ou de harcèlement, commis par des professionnels ou par des pairs », a souligné ce lundi le Défenseur des droits, Jacques Toubon, en présentant son rapport annuel sur les droits de l’enfant, deux jours avant la Journée internationale des droits de l’enfant. D’où sa recommandation de rendre obligatoire la consultation du  bulletin n°2 du casier judiciaire et du Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) avant tout recrutement de professionnels ou de bénévoles devant intervenir auprès de mineurs.

Un contrôle qui n’est pas systématique actuellement

Car jusqu’ici, cette consultation est déjà possible, mais elle n’est pas systématique. Et ce parce que « ces procédures peuvent prendre du temps et ne permettent pas, en cas de recrutement pour faire face à un besoin immédiat de personnel, de s’assurer de l’absence d’antécédent judiciaire et d’inscription au FIJAISV du candidat au poste à pourvoir », indique le rapport du Défenseur des droits.

Cette absence de vigilance a des conséquences graves, même si la réalité des violences sexuelles envers les enfants dans les institutions est difficile à quantifier, les données étant rares. L’enquête Virage, menée en 2015 par l’Ined, indique que huit femmes sur 1.000 et trois hommes sur 1.000 déclarent avoir subi des violences sexuelles commises par des professionnels pendant leur minorité. Un grand nombre de ces violences se seraient produites dans le cadre de la scolarité, 20 % pour les femmes et 50 % pour les hommes. Les garçons seraient par ailleurs plus souvent victimes que les filles lorsque les faits sont commis par un éducateur, un animateur ou un travailleur social.

Une solution suffisante ?

« D’où notre recommandation d’un dispositif législatif pour que la consultation du casier judiciaire et du FIJAISV soit obligatoire préalablement à tout recrutement d’intervenant auprès des mineurs », insiste Jacques Toubon. Les institutions et les collectivités pourraient craindre que ces vérifications prennent trop de temps quand elles sont pressées de recruter. Mais Geneviève Avenard, Défenseure des enfants, propose une solution qui repose sur l’anticipation : « Il faut mettre en place un pool de remplacement, comme cela est pratiqué dans le milieu hospitalier pour faire face à l’absentéisme des soignants. Il s’agit d’une équipe dont on a vérifié en amont les antécédents judiciaires et dont certains membres peuvent être mobilisés pour prendre un poste en urgence », explique-t-elle.

Si cette recommandation est adoptée, reste à savoir si elle sera suffisante. Car pour s’assurer de la probité de leurs candidats, les institutions ne devront pas se contenter de vérifier leurs antécédents judiciaires au moment de leur embauche, mais aussi après, tout au cours de leur carrière. Car après l’affaire de Villefontaine, l’Education nationale avait fait un contrôle des casiers judiciaires de ses personnels… qui avait abouti en janvier 2018 à la radiation de 26 fonctionnaires.