Reforme des retraites : Les jeunes membres des professions libérales en première ligne de la mobilisation

REPORTAGE Près de 20.000 manifestants exerçant une profession libérale ont manifesté ce lundi à Paris pour dénoncer la réforme des retraites. Parmi eux, plusieurs jeunes racontent pourquoi ils sont descendus dans la rue pour la première fois.

Charles-Edouard Ama Koffi
Près de 20 000 manifestants issus de 14 professions libérales ont manifesté ce lundi 16 septembre contre la réforme des retraites.
Près de 20 000 manifestants issus de 14 professions libérales ont manifesté ce lundi 16 septembre contre la réforme des retraites. — C.-E.AK
  • Quatorze professions libérales ont répondu à l’appel à manifester du collectif SOS Retraites ce lundi à Paris.
  • Dans leur ligne de mire : le projet de réforme des retraites du gouvernement qui prévoit de fusionner les 42 régimes existants en un seul et devrait entraîner une hausse des cotisations pour les professions libérales.
  • 20 Minutes s’est rendu dans le cortège parisien pour recueillir les témoignages des jeunes manifestants, inquiets pour l’avenir de leur retraite.

Dans un concert de sifflets, plusieurs slogans criés à tue-tête sur l’air de Meunier, tu dors se font entendre : « Macron, si tu savais ta réforme où on s’la met ! » A Paris, entre la place de l’Opéra et Bastille, infirmiers, avocats, orthophonistes ont uni leur voix ce lundi pour protester contre le projet de loi sur   la réforme des retraites menée par Jean-Paul Delevoye.

Ils étaient environ 20.000 issus de 14 professions libérales à brandir pancartes hostiles au gouvernement selon le conseil national des barreaux (CNB), l’un des organisateurs de la manifestation. Parmi eux, plusieurs jeunes primo manifestants de 30 ans ou moins.

Dans leur ligne de mire : le projet de réforme des retraites du gouvernement qui prévoit de fusionner les 42 régimes existants en un seul et devrait entraîner une hausse des cotisations pour les professions libérales.

« Nous sommes une génération à qui on demande beaucoup d’efforts »

C’est le cas de Jessica, tout juste trentenaire et avocate libérale collaboratrice dans un cabinet parisien. « C’est la première fois que je manifeste, je suis d’une famille plutôt traditionnelle de droite, confie-t-elle. Aujourd’hui, je cotise à 14 % pour les retraites et je suis assurée d’obtenir 1.400 euros de retraite après 42 années de cotisation. La réforme prévoit de passer mon taux de cotisation à 28 % ! Nous sommes une génération à qui on demande beaucoup d’efforts, j’estime que nous en faisons déjà beaucoup. Je touche 2.100 euros nets par mois mais rapporté à mes horaires, je suis en dessous du smic. »

Un sentiment partagé par Thomas Tribot, vice-président de l’Union des Jeunes Avocats (UJA) de Marseille, âgé de 30 ans. « C’est une réforme qui va remettre en cause le principe de solidarité au détriment des jeunes à cause de l’explosion des cotisations. Selon les projections du CNB avec mes 2.000 euros nets par mois, ce sera 500 euros en moins tous les mois. Il y a déjà un avocat sur quatre qui quitte le barreau avant dix ans de métier, cette réforme peut remettre en cause l’investissement des plus jeunes. »

« Je fermerai mon cabinet si la réforme passe »

En blouse blanche, Melvina, âgée de trente ans craint également que la réforme la pousse à mettre la clé sous la porte. « Nous payons beaucoup de charges. Nous sommes conventionnés avec la Sécu et ne pouvons pas modifier nos honoraires, déplore Melvina qui officie à Lognes-sur-Marne (Seine-et-Marne). Les gens pensent que nous sommes bien payés mais ce n’est pas le cas. La moitié de notre chiffre d’affaires est distribuée dans les différents organismes sociaux. Si la réforme passe telle quelle, je sais que je fermerai mon cabinet et laisserai beaucoup de patients sur le côté. »

Un peu plus loin dans le cortège, Romane, 18 ans manifeste près de sa mère, infirmière à Saint-Nizier-sous-Charlieu (Loire). « Je ne suis pas du tout concernée à titre personnel par cette réforme. Je viens pour soutenir ma mère. C’est la première fois que je manifeste et je suis très déterminée ! »

Elise, orthophoniste de 30 ans à Champigny-sur-Marne se prépare à un long bras de fer. « C’est la première action mais je sais qu’il y en aura d’autres », explique-t-elle. De son côté, Jean-Paul Delevoye se veut rassurant. « Il y a des solutions pour chacune des professions », avec « des durées de transition adaptées à chacun des cas », assure le haut-commissaire aux retraites, qui recevra ce mardi avec la garde des Sceaux Nicole Belloubet, les responsables du CNB, de la Caisse Nationale des Barreaux Français (CNBF) et de la Conférence des bâtonniers.