Nantes: Après les fusillades, la ville lance son projet à 310 millions d’euros pour le quartier Bellevue

QUARTIERS Une réunion publique était organisée, mardi soir à Nantes, en présence de 250 habitants du quartier sensible de Bellevue

Julie Urbach
— 
illustration quartier Bellevue
illustration quartier Bellevue — J. Urbach
  • La mairie de Nantes a dévoilé les contours de son projet pour le « Grand Bellevue », dont l’investissement s’élève à 310 millions d’euros.
  • Des réponses en matière d’aménagement urbain, de logement, d’accès à l’éducation ou à la santé, ont été présentées pour ce quartier sensible en proie à divers trafics et actes de délinquance.

La rencontre était programmée avant les fusillades, qui ont récemment fait un mort dans le centre-ville de Nantes et quatre blessés à Bellevue. Ce mardi soir, dans un contexte particulièrement tendu au vu des événements, une réunion publique a réuni environ 250 habitants venus assister à la présentation par la mairie d’un « ambitieux projet » pour ce quartier sensible. Sur une dizaine d’années, une importante enveloppe de 310 millions d’euros va être investie (dont 20 % via l’ANRU) pour que Bellevue devienne un quartier « attractif et actif », a confirmé Johanna Rolland, la maire (PS) de Nantes. Mais aussi qu’il s’affranchisse de l’insécurité, des rodéos, ou autres trafics de drogue « qui nous pourrissent la vie », selon une mère de famille.

Et le combat, mené de longue date, n’est pas facile. L’an dernier déjà, dans ce quartier de 20.000 habitants à cheval entre Nantes et Saint-Herblain, un homme de 34 ans est mort, tué par balles, dans un règlement de comptes. « Une augmentation des atteintes aux biens et aux personnes a été relevée en 2018, indique Jean-Christophe Bertrand, le directeur départemental de la sécurité publique, invité pour l’occasion. Sur la même année, 41 usages d’armes ont été comptabilisés, dont neuf à Bellevue. Sur 2019, on en est à cinq sur le quartier. » « Ma petite-fille s’est fait attaquer à la sortie de la boulangerie, mon petit-fils braqué sur un parking », se désole un homme au micro. Et depuis le 1er avril, la police de sécurité du quotidien a été déployée. « Les flics, on ne les voit jamais », s’étouffe une femme.

Maison de santé, équipement sportif…

Après avoir une nouvelle fois rappelé que les problèmes de délinquance étaient de la responsabilité de la police nationale, la maire de Nantes a assuré de sa détermination pour « porter les besoins du quartier ». La réponse de la mairie, construite avec des habitants, se veut plurielle. Le projet du Grand Bellevue jouera donc sur l’aménagement du territoire (construction de nouveaux logements), l’éducation, la culture, la transition énergétique (rénovations thermiques) ou encore le développement économique. La place Mendes-France, sera par exemple réaménagée pour accueillir de nouvelles activités commerciales et un « centre d’affaires ». « Nous supprimerons tous les endroits qui servent de repères aux dealers », promet Bertrand Affilé, le maire de Saint-Herblain.

Alors que les habitants pressent la mairie d’agir, trois annonces ont été faites mardi soir pour montrer que « le projet est bel et bien lancé ». D’abord, une maison de la santé sera livrée en 2021 le long du boulevard Jean-Moulin, afin de lutter « contre la désertification médicale également présente dans les quartiers ». Un grand équipement sportif, notamment dédié à la boxe, sortira de terre aux abords de  la médiathèque Lisa Bresner. Enfin, la ville a confirmé l’agrandissement d’une école (Alain-Fournier) avec la création d’un centre de loisirs. Le parc de la Meta sera quant à lui réhabilité prochainement.

Image de synthèse de la future maison de santé de Bellevue (Nantes)
Image de synthèse de la future maison de santé de Bellevue (Nantes) - DLW

Hétérogénéité ou vivre ensemble ?

« Il y a de beaux projets, comme la reconfiguration de la place Mendes-France, mais je ne sais pas si ça réglera tous les problèmes, indique à la sortie Florian, un père de famille de 33 ans. Quand je suis arrivée à Bellevue, j’ai vite compris que la police ne s’y risquait pas, que c’était une zone de non-droit en quelque sorte. Il y a pourtant une hétérogénéité, une mixité, que l’on peut transformer en vivre ensemble. C’est ma conviction ».

Si l’on ressent de la lassitude voire de l’inquiétude chez certains, des pointes d’optimisme se retrouvent ça et là. « Les jeunes ne sont pas tous des délinquants, il y a ici des artistes, des sportifs, de la réussite et des choses très positives, a lancé sous les applaudissements Bouchra Akdim, l’une des coorganisatrices de la marche de dimanche. Personne n’a de baguette magique mais si on se met tous ensemble, il y a l’espoir que l’on s’en sorte. »