Pourquoi le mal-logement des jeunes Européens s’accroît?

SOCIAL Une étude de la Fondation Abbé-Pierre et la Fédération européenne des associations nationales (Feantsa) publiée ce mercredi montre que la proportion des 18-24 ans parmi les mal-logés en Europe augmente depuis 2010…

Delphine Bancaud
Illustration logement des jeunes.
Illustration logement des jeunes. — Pixabay/stocksnap
  • Les conditions de logement des jeunes Européens se sont dégradées depuis 2010.
  • Ils dépensent plus pour se loger et sont plus nombreux à vivre dans des logements de mauvaise qualité.
  • Cela s’explique par la hausse continue des prix de l’immobilier et la baisse des aides au logement dans plusieurs pays européens liée aux politiques d’austérité.

C’est l’Europe côté face, celle qui est moins reluisante. Selon un rapport de la Fondation Abbé-Pierre et la Fédération européenne des associations nationale (Feantsa) publié ce mercredi, les jeunes Européens sont de plus en plus confrontés à des problèmes de logement.


Car pour avoir un toit sur la tête, beaucoup d’entre eux doivent se serrer la ceinture. Une situation qui s’explique d’abord par la hausse continue des prix de l’immobilier dans de nombreux pays. « Entre 2010 et 2016, le coût du logement pour les ménages pauvres a augmenté dans trois-quarts des États membres de l’UE », pointe le rapport.

Les jeunes de 18 à 24 ans, les plus touchés, lui consacrent près de 40 % de leurs revenus, une proportion qui peut atteindre 46,9 % en Grèce, 38,6 % au Danemark, 21,2 % en Bulgarie, 19,9 % aux Pays-Bas, 19 % au Royaume-Uni, 17,1 % en Allemagne et 11,5 % en France.

Plus confrontés aux logements surpeuplés

« Si les jeunes sont en première ligne, c’est d’abord parce que leur précarisation a augmenté ces dernières années : ils ont à la fois les premières victimes de la  hausse du chômage en Europe, mais aussi des coupes budgétaires dans les aides sociales dues aux politiques d’austérité menées dans plusieurs pays », explique Sarah Coupechoux, chargée d’études Europe à la Fondation Abbé-Pierre.


Autre constat : les jeunes Européens sont de plus en plus nombreux à vivre dans des logements de piètre qualité. « Ils vivent plus souvent que leurs aînés dans des logements insalubres, dans des colocations surpeuplées ou dans des logements mal chauffés. Notamment dans les grandes villes où le marché du logement est tendu, mais où les opportunités d’emploi sont aussi les plus importantes », observe Chloé Serme-Morin, chargée de mission à la Feantsa. En effet, la part des jeunes de 16 à 24 ans vivant dans des logements surpeuplés a augmenté dans dix pays de l’Union européenne entre 2010 et 2016, en particulier aux Pays-Bas, en Autriche, en Grèce, en Belgique et en Espagne.

Des facteurs sociaux qui aggravent les difficultés de logement

Mais tous les jeunes ne sont pas logés à la même enseigne. « Les plus fragilisés face aux logements sont les jeunes étrangers, ceux qui sortent de l’aide sociale à l’enfance, ceux qui n’ont pas de diplôme et les familles monoparentales », constate Chloé Serme-Morin. D’où la proportion plus importante ces dernières années de jeunes Européens parmi les SDF.

Résultats : les politiques « reste chez tes parents » se sont multipliés dans plusieurs pays, comme le Royaume Uni, l’Allemagne, le Danemark ou les Pays Bas. « Or, on ne peut pas bloquer l’autonomisation des jeunes en demandant à leurs parents d’être leurs soutiens ad vitam aeternam », estime Sarah Coupechoux.


Face à ces constats, les associations engagées dans la lutte contre le mal-logement réclament des actions fortes : « Des fonds européens pourraient être dédiés à l’aide aux logements des jeunes », suggère Sarah Coupechoux. « Il faut aussi privilégier le "housing first" ("logement d’abord") comme le fait la Finlande, qui consiste à ne pas faire transiter les jeunes à la rue par l’hébergement d’urgence, mais de les remettre tout de suite dans un logement, en leur offrant un accompagnement social en parallèle. Cela évite qu’ils se désocialisent et leur permet de se réinvestir directement dans un projet d’emploi ou de formation », souligne Sarah Coupechoux.