Attaques de gendarmeries : Les familles de gendarmes de plus en plus inquiètes pour leur sécurité
SECURITE Après que trois gendarmeries ont été prises pour cibles ces dernières semaines, des familles de militaires redoutent de nouvelles attaques…
- L’incendie criminel contre la brigade de gendarmerie de Meylan (Isère) visait « directement » les militaires et leurs familles, selon le procureur de Grenoble.
- Il s’agit de la troisième attaque en quelques semaines contre une gendarmerie.
- Des familles de gendarme, apeurées, estiment nécessaire d’améliorer la sécurité des brigades et des casernes.
Nadine ne le cache plus : elle a peur. Deux jours après qu’un incendie criminel a ravagé les véhicules personnels des gendarmes de la brigade de Meylan (Isère), elle redoute que la caserne dans laquelle elle et sa famille habitent soit, à son tour, prise pour cible. « On essaie de continuer à vivre normalement. Mais le sentiment d’inquiétude est chaque jour de plus en plus fort », confie à 20 Minutes cette épouse de gendarme mobile, résidant en région parisienne, et qui a souhaité conserver l’anonymat. « On est de plus en plus méfiant », dit-elle. « Mais on ne peut pas rester 24 heures sur 24 à regarder par la fenêtre ce qu’il se passe dehors. »
Pour la troisième fois, en quelques semaines, une gendarmerie fait l’objet d’une attaque. Dans la nuit du 18 au 19 septembre, cinq véhicules appartenant au groupement de gendarmerie de la Haute-Vienne ont été détruits par un incendie à Limoge. Deux jours plus tard, c’est une quarantaine d’engins qui étaient détruits par les flammes à Grenoble. Les deux attaques ont été revendiquées par des groupuscules d’ultra-gauche sur le site Indymedia, affirmant agir en soutien aux personnes condamnées récemment pour avoir incendié une voiture de police, le 18 mai 2016, quai de Valmy, à Paris.
L’incendie de la gendarmerie de Meylan n’a pas encore été revendiqué et toutes les pistes sont étudiées. « Est-ce que nous sommes en présence d’anarcho-libertaires ? Je ne peux pas répondre, il est trop tôt pour le dire », a indiqué le procureur de Grenoble. Jean-Yves Coquilla a toutefois noté quelques similitudes avec l’incendie volontaire survenu à la gendarmerie de Grenoble.. Autre fait troublant, cette attaque survient trois ans jour pour jour après la mort de Rémi Fraisse, un manifestant décédé à Sivens lors d’affrontement avec les gendarmes mobiles. Est-ce un hasard ?
« Craintes légitimes au sein des gendarmes et de leurs familles »
Une chose est néanmoins certaine. En incendiant, dans la nuit de mercredi à jeudi, les véhicules personnels des gendarmes dans l’enceinte de la brigade de Meylan, les auteurs ne voulaient pas s’en prendre à l’institution, « mais aux gendarmes et à leurs familles », a souligné le procureur au cours d’une conférence de presse. « Il y a des craintes légitimes au sein des gendarmes et de leurs familles », a pour sa part déclaré le commandant du groupement de gendarmerie de l’Isère, Yves Marzin.
La protection du personnel de Meylan a été renforcée et une cellule psychologique a été proposée aux gendarmes et aux familles qui en auraient besoin. Mais pour Nadine, la sécurité des casernes fait trop souvent défaut, notamment à cause du « manque de moyens » alloués. Elle regrette notamment le faible nombre de caméras de surveillance, et pointe les problèmes rencontrés avec les barrières installées aux entrées et qui ne sont jamais réparées. « On laisse les choses aller, alors que dans les casernes vivent des familles entières qui peuvent être prises pour cibles facilement. »
1.200 euros par caserne
La sécurité des proches des gendarmes constitue « un point d’inquiétude », estime Frédéric Le Louette, président de l’association professionnelle nationale de militaires GendXXI. « Le budget alloué à la sécurité des casernes s’élève en 2018 à 5 millions d’euros. Mais il y en a près de 3.000. Cela fait environ 1.200 euros par caserne. C’est largement insuffisant », explique ce sous-officier à 20 Minutes. Il note que ce problème avait été identifié quand Bernard Cazeneuve était encore ministre de l’Intérieur. Un effort budgétaire avait été réalisé. « Mais les besoins sont bien supérieurs. »
Des plus en plus d’épouses de gendarmes, à l'instar de Nadine, ont rejoint ces dernières semaines l’association Femmes de force de l’ordre en colère. « Elles se sentent plus en sécurité du tout. Avant, comme elles vivent en caserne, elles se sentaient davantage protégées que les épouses de policiers. Mais plus maintenant », remarque Aurélie, la présidente de cette association, jointe par 20 Minutes. « Avant, on craignait pour nos maris quand ils étaient en service », confie cette épouse de CRS, très marquée par le drame de Magnanville. « Maintenant, on a peur pour nous quand nous sommes à la maison. »
La protection des familles doit être « une priorité »
Frédéric Le Louette estime pourtant que des « choses qui ne coûtent pas très cher » peuvent être mises en place pour renforcer la sécurité des casernes et des brigades. Notamment, dit-il, « un système performant pour alerter les familles par SMS en cas de soucis ». La protection des familles des gendarmes doit être « une priorité ». « Les militaires sont formés et armés pour se défendre, mais ce n’est évidemment pas le cas de leurs familles. Elles n’ont pas à subir les foudres de quelqu’un d’extérieur. »