«La décision de la Cour de cassation va à l’encontre des évolutions récentes en faveur des personnes intersexuées»
JUSTICE La Cour de cassation a rejeté, ce jeudi, sa demande de bénéficier d’un état civil de « sexe neutre »…
- Né avec les deux organes génitaux, Gaëtan n’est « ni homme ni femme »
- La Cour de cassation a refusé de lui faire bénéficier d’un état civil « neutre »
- Ses avocats vont saisir la Cour européenne des droits de l’homme
« Comme si la Cour de cassation avait érigé une peur derrière laquelle elle peut désormais s’abriter… » Bertrand Périer, l’un des avocats de Gaëtan*, a donc annoncé, ce jeudi après-midi, qu’ils allaient saisir la Cour européenne des droits de l’homme pour faire reconnaître le « sexe neutre » de leur client.
Né « avec un vagin rudimentaire, un micropénis mais pas de testicules », Gaëtan, 66 ans, s’est vu refuser, ce jeudi par la Cour de cassation, le droit de faire apposer la mention « sexe neutre » sur son état civil. « Une décision dogmatique qui va à l’encontre de toutes les évolutions récentes en faveur des personnes intersexuées », critique Mila Petkova, avocate historique de Gaëtan.
Le sexe, fondement d’une dizaine de lois
Dans son arrêt que 20 Minutes a pu consulter, la Cour de cassation estime notamment que la reconnaissance de la particularité de Gaëtan « impliquerait de nombreuses modifications législatives de coordination ». Reconnaître qu’il existe une autre voie possible que celles du système binaire (masculin ou féminin) inscrites sur tous les papiers administratifs aurait, en effet, quelques conséquences.
« Une dizaine environ, liste Benjamin Moron-Puech, docteur en droit et spécialiste du sujet. Le sexe intervient notamment dans les lois ou décrets sur la séparation entre les hommes et les femmes dans les prisons ou dans les vestiaires de sport, dans le domaine de la filiation et aussi pour tout ce qui relève de la discrimination positive, la parité. Mais il n’y a, là, rien d’insurmontable. »
François Hollande lui-même a critiqué les « mutilations »
Interrogé par 20 Minutes, Gaëtan a toujours indiqué qu’il se battait pour être « en paix avec lui-même » mais surtout pour toutes les personnes qui naissent aujourd’hui avec ce type d’anomalies génétiques. Les projections estiment que cela concerne 200 des 800.000 naissances annuelles en France.
Contrairement à Gaëtan né en 1952, les bébés intersexués subissent, aujourd’hui, ce qu’on appelle des opérations d’assignation sexuelle. En 2016, la France a été condamnée à trois reprises par l’ONU pour cela. Et récemment, François Hollande, lui-même, a reconnu qu’il fallait en finir avec ces « mutilations ». « La décision de la Cour de cassation va donc clairement à rebours de la reconnaissance progressive des personnes intersexuées en Europe et dans le monde entier, déplore ainsi Benjamin Pitcho, un autre avocat de Gaëtan. Nous allons continuer à nous battre. »
* Le prénom a été changé