En 2016, le Défenseur des droits a été saisi plus de 1.200 fois dans le cadre d'interventions policières

LIBERTÉ Dans son rapport annuel d’activité 2016 dévoilé ce jeudi matin, le Défenseur des droits s’inquiète de « relations tendues entre une partie de la population et les forces de l’ordre »…

Hélène Sergent
Une interpellation en fin de manifestation contre la Loi Travail, le 11 mai à Toulouse.
Une interpellation en fin de manifestation contre la Loi Travail, le 11 mai à Toulouse. — H. Murail - 20 Minutes

« Un fait de société qu’il faut traiter à la hauteur de l’enjeu pour notre pays », voilà les mots employés par le Défenseur des droits, Jacques Toubon, pour qualifier l’interpellation brutale d’un jeune homme de 22 ans à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Replaçant les violences policières au cœur du débat social et politique, « l’affaire Théo » donne au rapport annuel d’activité du Défenseur des droits, dévoilé ce jeudi, une résonance particulière.

En 2016, l’autorité indépendante dirigée par Jacques Toubon a été saisie 1225 fois contre 910 en 2015 en lien avec l’intervention des forces de sécurité. Soit une augmentation de 34,6 % en un an. Si le nombre de manquements avérés après enquête reste stable, le rapport pointe des « relations tendues entre une partie de la population et des forces de l’ordre ». Etat d’urgence, perquisitions administratives et manifestations contre le projet de loi Travail ont eu un impact majeur.

L’état d’urgence

Instauré au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, ce régime d’exception a été prolongé à cinq reprises. Il court désormais jusqu’au 15 juillet, soit après l’élection présidentielle d’avril-mai et les législatives de juin. Un tiers des saisines concerne le déroulement de perquisitions administratives intervenues entre novembre 2015 et février 2016. Période au cours de laquelle les forces de l’ordre ont été extrêmement sollicitées.

Les six premiers mois, 3.594 perquisitions ont été ordonnées par les autorités. « Procédure de nuit, impressionnante par la présence d’effectifs nombreux, munis d’armes de poing et/ou cagoulés (…) une partie des réclamants a fait ensuite état de violences physiques, violences psychologiques, notamment à l’égard des enfants présents », précise le rapport.

La loi Travail

La gestion du maintien de l’ordre, érigé pendant des années en modèle à l’étranger, a été violemment remise en cause en 2016 dans le cadre des manifestations contre le projet de loi Travail. Le Défenseur des droits a reçu 120 réclamations en 2016, « une augmentation sans précédent », stipule le rapport : « Un grand nombre de celles-ci (…) mettent en cause principalement l’utilisation de gaz lacrymogènes, de grenades, de matraques et de lanceurs de balle de défense (LDB) ».

L’usage des grenades de désencerclement a également été remis en cause après la blessure d’un manifestant à Paris, touché par un tir effectué par un policier du groupe d’intervention de la préfecture de police de Paris. Dans un rapport sur les violences policières, publié par l’association Acat (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), la directrice des programmes Anne-Lise Lierville déplorait : « Avant, les forces de l’ordre avaient recours à des techniques de mise à distance. Désormais, on blesse ».