Pourquoi une faute d'orthographe sur votre CV peut tuer votre candidature

EMPLOI A compétences égales, une candidature contenant des fautes d’orthographe a trois fois plus de chances d’être rejetée que la même sans erreur...

Delphine Bancaud
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Illustration salarié au travail.
Illustration salarié au travail. — SUPERSTOCK/SUPERSTOCK/SIPA

Qui n’a jamais oublié un s au pluriel ou confondu le futur et le conditionnel ? Des erreurs bien humaines, mais qui peuvent coûter cher dans la sphère professionnelle. C’est ce que démontre une étude de la chercheuse en sciences de gestion à l’université de Toulon, Christelle Martin-Lacroix, rendue publique ce jeudi. Elle a transmis des candidatures identiques à 536 recruteurs, à ce détail près que certaines contenaient beaucoup de fautes d’orthographe, d’autres un peu et les dernières pas.

Et le verdict est sans appel : une candidature avec expérience, mais contenant des fautes d’orthographe, a trois fois plus de chances d’être rejetée que la même sans erreur. « La faute à l’écrit justifie le rejet du dossier, car les recruteurs jugent que cela dénote un manque de correction, de rigueur, de professionnalisme de la part du candidat et cela témoigne d’un refus d’adhésion à l’autorité », explique la chercheuse. Ceux qui cumulent les impairs à l’écrit ne sont pas les seuls à être sanctionnés car « le rejet de la candidature peut intervenir dès la première faute », observe la chercheuse. Un handicap réel pour les chercheurs d’emplois, étant donné que 90 % des recrutements en France passent par l’étude du  CV et d’une lettre de motivation.

De plus en plus d’écrits professionnels

Cette intolérance des recruteurs vis-à-vis des fautes d’orthographe se justifie par l’importance croissante de l’écrit dans la vie professionnelle. « Aujourd’hui, 70 % des salariés rédigent quotidiennement des documents dans le cadre de leur travail et 31 % consacrent le quart de leur journée à l’écrit », indique la chercheuse. Cette prolifération de l’écrit professionnel s’explique aussi parce que certains métiers qui ne l’utilisaient pas il y a 15 ans, le font désormais, en raison de l’explosion des mails. « Un professionnel envoie en moyenne 33 mails par jour », précise Christelle Martin-Lacroix.

Et lorsque leurs employés ne maîtrisent pas suffisamment bien le français écrit, les entreprises en payent les pots cassés. « Cela génère pour elles des coûts cachés car du temps est perdu pour relire et corriger les écrits de certains employés, ce qui aboutit au final à une perte de productivité pour l’entreprise », indique la chercheuse. L’image de l’entreprise risque aussi d’être écornée si des mails de ses salariés aux clients contiennent des fautes, ou si son site comporte des fautes de syntaxe ou de conjugaison. « Les clients ont tendance à mettre en doute la qualité et le sérieux des services proposés par l’entreprise », souligne Christelle Martin-Lacroix.

La mauvaise orthographe des salariés génère aussi des coûts directs pour certains employeurs qui sont obligés de financer des formations de remise à niveau ou de s’offrir les services d’un correcteur. Sans compter les cas extrêmes ou l’entreprise est contrainte de licencier un salarié pour insuffisance professionnelle, lorsque sa mauvaise orthographe pénalise grandement son travail.

Des solutions pour s’améliorer

De plus en plus conscients de l’enjeu que représente la bonne maîtrise du français écrit, de plus en plus de salariés passent le certificat Voltaire, un examen de trois heures qui permet d’évaluer sa maîtrise de l’orthographe pour la spécifier sur son CV. En 2015, 35.000 d’entre eux l’ont passé. «D’après l’étude des tests passés entre 2010 et 2016, il apparaît que les Français maîtrisent plutôt bien l’orthographe lexicale. En revanche, ils ont encore du mal avec la grammaire (notamment avec l’accord des participes passés, la confusion entre le futur et le conditionnel) et les paronymes », indique Julien Soulier, professeur de Français et membre du comité d’experts du projet Voltaire. Ceux qui n’arrivent pas à obtenir un bon score investissent aussi de plus en plus dans des séances de remise à niveau. «Mais le premier secret pour bien maîtriser l’orthographe c’est de lire», rappelle Julien Soulier.