Que peut faire le gouvernement face au blocage des sites pétroliers?

MOUVEMENT SOCIAL Le blocage des sites pétroliers, au cœur de la contestation du projet de loi travail, s’est durci ce mardi…

L.C.
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Des salariés bloquent la raffinerie Total de Feyzin, le 23 mai 2016, pour protester contre le projet de loi travail.
Des salariés bloquent la raffinerie Total de Feyzin, le 23 mai 2016, pour protester contre le projet de loi travail. — JEFF PACHOUD / AFP

Le bras de fer engagé entre les syndicats et le gouvernement se durcit. La contestation du projet de loi travail se radicalise et le blocage de plusieurs sites pétroliers fait planer sur l’Hexagone la menace d’une pénurie de carburant. François Hollande a dénoncé ce mardi le « blocage » des raffineries et dépôts de carburant par « une minorité ». Concrètement, que peut faire le gouvernement contre ces blocages ?

Débloquer les sites par la force

Cette option coercitive a déjà été employée ce mardi à Fos-sur-Mer dans les Bouches-du-Rhône. Les accès de la raffinerie Esso et du dépôt de carburants, occupés depuis lundi par des manifestants, ont été dégagés par la police qui a expulsé les « bloqueurs ». Peu après, le Premier ministre Manuel Valls a affirmé que « d’autres sites (de raffinerie) seraient libérés ».

« C’est illégal de débloquer les raffineries », a immédiatement réagi Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT. Que dit la loi ? Si ni l’employeur ni l’Etat ne peuvent remettre en cause le droit à la grève, inscrit dans la Constitution. En revanche, « le blocage de l’accès à un site, l’occupation des locaux afin d’empêcher le travail des non-grévistes sont des actes abusifs. De telles actions sont illégales et peuvent donc être sanctionnées pénalement », peut-on lire sur le site Service-public.fr. En revanche, le statut des barrages filtrants est particulier.

En octobre 2010, Nicolas Sarkozy avait aussi opté pour le déblocage alors que les douze raffineries que comptait la France étaient à l’arrêt et qu’une vingtaine de dépôts (sur plus de 200) étaient bloqués au plus fort de la contestation contre la réforme des retraites.

Réquisitionner des grévistes

Pour faire à nouveau tourner les raffineries et garantir un approvisionnement minimum en carburant, le gouvernement et les préfets peuvent réquisitionner les grévistes dans des cas bien précis définis par le législateur. Cette décision peut être prise par décret en Conseil des ministres ou par arrêté préfectoral.

Le préfet peut réquisitionner du personnel, même dans le secteur privé, « en cas d’urgence, lorsque l’atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publique », selon l’article L2215-1 du Code général des collectivités territoriales. Dans ce cas, les salariés réquisitionnés sont obligés de reprendre le travail sous peine de sanctions civiles et pénales. La réquisition peut faire l’objet d’un recours devant un juge administratif.

Une pénurie de carburant représente-t-elle une menace à l’ordre ? En 2010, les autorités avaient estimé que oui.En Seine-et-Marne et dans les Yvelines, les préfets avaient donc réquisitionné les personnels des raffineries. Une mesure qui avait constitué un tournant dans le mouvement social contre la réforme des retraites mais qui avait été condamnée par l’ Organisation Internationale du Travail (OIT).

Saisie par la CGT, l’OIT avait demandé au gouvernement « de privilégier à l’avenir, devant une situation de paralysie d’un service non essentiel mais qui justifierait l’imposition d’un service minimum de fonctionnement, la participation des organisations de travailleurs et d’employeurs concernées à cet exercice, et de ne pas recourir à l’imposition de la mesure par voie unilatérale ».

En revanche, le Conseil d’Etat avait estimé que la réquisition des salariés du site pétrolier de Gargenville (Yvelines) ne portait pas atteinte à l’exercice du droit de grève.