Pourquoi les étudiants boursiers sont dans le viseur de la Cour des comptes

FINANCES La Cour des comptes pointe un contrôle de l'assiduité des étudiants boursiers «très insuffisant», dans son rapport annuel publié mercredi...

Delphine Bancaud
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Une étudiante au Crous de Paris, en septembre 2014.
Une étudiante au Crous de Paris, en septembre 2014. — ISA HARSIN/SIPA

Encore une proposition explosive de la Cour des comptes. Dans son rapport annuel publié mercredi, elle suggère de réformer la mise en œuvre du contrôle d’assiduité des étudiants boursiers.

«Inégalité de traitement entre boursiers»

Car depuis 1951, les étudiants boursiers doivent respecter une obligation d’assiduité aux cours magistraux, travaux pratiques ou dirigés et aux stages obligatoires et de se présenter aux examens, en contrepartie de l’aide financière qui leur est octroyée. Mais selon la juridiction financière «la définition de l’assiduité est variable, avec des pratiques particulièrement hétérogènes dans les universités».

En effet, alors que certaines facs pointent systématiquement la présence des étudiants au TD et au TP, d’autres se contentent de ne signaler aux Crous que leurs absences aux examens. Ces derniers peuvent demander ensuite aux étudiants de rembourser les sommes indûment perçues. Un système qui «introduit une inégalité de traitement entre boursiers et encourage les fraudes», selon la Cour des comptes.

Les organisations étudiantes contestent l'analyse de la Cour

Du coup la Cour de comptes suggère que toutes les universités «instituent un contrôle de la présence aux cours, aux TD et aux TP». Une idée qui scandalise les organisations étudiantes. «Si l’on durcit le contrôle de l’assiduité des étudiants boursiers, cela va pénaliser certains d’entre eux, comme ceux qui sont salariés et qui ne sont pas inscrits au contrôle continu, car ils veulent assister le plus possible aux cours. Alors oui, il leur arrive de rater certains TD ou TP, mais est-ce pour autant qu’il faut leur demander de rembourser leur bourse?», interroge William Martinet, le président de l’Une, contacté par 20 minutes.

Pour Alexandre Leroy, la Cour des comptes relaye «le mythe de l’étudiant qui s’inscrit en fac pour gratter 100 euros de bourses sans aller en cours», ce qu’il dénonce. «Quand on sait que seulement un quart des étudiants sont boursiers, mais que la majorité d’entre eux ne touchent que 100 ou 200 euros par mois, on ne voit pas très bien l’intérêt qu’ils auraient à prendre le risque de frauder», poursuit-il.

Le ministère de l’Enseignement supérieur ne «partage pas l’appréciation de la Cour

William Martinet explique aussi que certains étudiants boursiers se voient déjà demander par le Crous de rembourser leur bourse pour de mauvaises raisons: «C’est le cas par exemple, des étudiants qui ratent leurs cours parce qu’ils sont hospitalisés et qu’ils oublient d’envoyer leur certificat de maladie au Crous», précise-t-il. Les organisations étudiantes s’inquiètent de voir régulièrement remis sur la table le débat sur les étudiants boursiers «comme si on voulait faire croire qu’ils étaient responsables des difficultés financières des Crous», estime Alexandre Leroy.

De son côté le ministère de l’Enseignement supérieur fait savoir à 20 minutes qu’il ne «partage pas l’appréciation de la Cour des comptes sur les dysfonctionnements du contrôle des étudiants boursiers», en rappelant qu’en 2013-2014, seulement 1,1% des étudiants boursiers ont fait l’objet d’un ordre de reversement de leurs bourses, considérées par les Crous comme indues. Et alors que les contrôles n’avaient auparavant lieu qu’après les premiers examens des étudiants, le ministère rappelle aussi qu’une circulaire de juillet 2014 a instauré un contrôle de l’inscription pédagogique de l’étudiant (le fait qu’il s’inscrive en TD et en TP) au début du premier semestre. De quoi limiter encore le nombre d’étudiants boursiers fraudeurs…